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IBK : Le naufrage de l’homme qui avait tout promis

La manifestation des forces politiques et mouvements associatifs du 05 juin 2020 sonne comme le chant du cygne pour le régime et surtout comme le naufrage d’un homme, IBK, qui, en sept ans, a perdu tous ses combats à la tête du Mali. Et sa pire défaite, contrairement à ce que l’on peut penser a priori, se situe sur le terrain des Valeurs républicaines, sociales et même sociétales qui ont été exaltées jusqu’au mysticisme par le candidat Ibrahim Boubacar KEITA, faisant oublier toutes les lacunes et insuffisances du personnage.

 

Au fond, ceux qui ont succombé à son discours quasi prométhéen ont dû se dire qu’un homme politique habité par un tel idéal aura assez de vertu pour chercher et trouver des hommes et femmes courageux à la tâche au quotidien (ce que lui-même n’est pas) pour se dédier à notre pays. Que le candidat, devenu président, agirait comme un bon DRH, en recrutant des hommes et femmes de vertu pour veiller sur la Res public (la chose publique) dans un contexte où les exigences sécuritaires pèsent davantage sur les maigres ressources nationales. Qu’en ayant réussi ce beau casting, le nouveau président consentirait, s’agissant de sa personne, à faire vœu de sobriété pour surprendre agréablement un pays habitué à ses excès et à sa vie dispendieuse.

Des Maliens qui ne demandaient qu’à le croire lui ont répondu : du passé faisons table rase ou du moins n’en retenons que ce qui conforte notre choix: donnons quitus à celui qui se vante d’avoir maté les élèves et étudiants grévistes sans jamais avoir apporté de réponses à leurs problèmes réels.

Avec IBK, la parole créa le président ! Et c’est cette parole construite, autour de toutes les valeurs désirées et désirables, qui s’est dramatiquement révélée une vaste duperie. Une de ses valeurs est la fidélité à ses alliances, à ses promesses. Le fait n’est pas banal : au meeting du 05 juin, l’imam Dicko a commencé son propos par un acte de contrition et d’excuse pour avoir entraîné en 2013 de nombreux Maliens dans une aventure qui se révèle une descente aux enfers pour le Mali. L’artisan de sa victoire au forceps en 2018, Soumeylou Boubeye Maïga, n’a pas connu un sort plus enviable. Il est jeté comme un malpropre et menacé aujourd’hui d’un procès pour sa gestion en tant que ministre de Défense.

La vertu gestionnaire n’a pas dépassé le stade de slogan de campagne mais, suprême coup de canif au contrat passé avec les Maliens, c’est la famille au sens proche et large qui est mise aux responsabilités et donc placée au cœur des succès (il y a en peu ou pas) et des scandales (à tous les étages) du régime. La Loi d’orientation et de programmation militaire, instrument essentiel dans un pays en crise sécuritaire, s’est révélée au fil des ans, un outil d’enrichissement et de prébendes sans précédent dans l’histoire de la corruption au Mali avec des avions qui ne volent pas, d’autres achetés incomplets sans oublier les surfacturations phénoménales, tout ce fric-frac sous la présidence d’un homme qui jurait par tous les saints n’avoir jamais digéré un franc indu du Mali. Quand Mahmoud Dicko dénonce les pillages et le blanchiment dans l’immobilier ailleurs qu’au Mali avec un doigt pointé sur Sébénicoro, il attaque le cœur du projet et de la promesse de 2013. Quand, en sept ans à la tête de l’Etat, la pandémie du Covid-19 a été la seule raison pour retenir deux mois de suite IBK à la maison, le discours patriotique enflammé ne suffit plus pour masquer le sentiment que le chef de l’Etat vit très bien ses éloignements réguliers du pays.

Après le 05 juin, la rengaine victimaire de celui qui n’avoue jamais ses fautes mais voit partout des critiques de gens aigris, cette rengaine victimaire n’opère plus. On ne peut plus occulter le fait qu’il y a un pays, le Mali, et son peuple, les Maliens, qui subissent les conséquences de tous les échecs et toutes les avanies du régime en place.
La marée humaine du 05 juin est un NON retentissant à toutes les régressions : la gouvernance, l’école, la sécurité, la pauvreté.

La goutte d’eau de trop a été ces élections législatives truquées qui ont envoyé aux Maliens le signal que le processus électoral n’offre plus de garantie d’alternance et d’alternative en matière de dévolution du pouvoir. Là, nous ne sommes plus loin du parjure de celui qui brandissait son brevet de militant du mouvement démocratique !

La démonstration peut s’arrêter là pour dire que le combat le plus important que IBK a perdu, est celui des valeurs républicaines et de la vertu gestionnaire. On se relève des déboires économiques, politiques ou sociaux mais on ne se remet pas d’une défaite morale quand la conquête du pouvoir s’est faite sur un serment de probité.

Bakary Diarra

In Refondation

L’AUBE

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