Griotte aux talents multiples, Tomani Kouyaté fait partie de ces griottes qui font un mélange parfait de la musique traditionnelle et moderne. À travers sa voix et son énergie débordante, elle fait bouger le public au Mali qu’en dehors de nos frontières. Nous l’avons rencontré pour vous…
26 Mars : Qui est Tomani Kouyaté
Je suis Tomani Kouyaté. Je vie à Bagadagji. Je suis née dans une famille de griots. Je suis la fille de Sidiki Kouyaté, de Fanta Damba et de Maimouna Dramé. Mon père était policier. Et il n’a jamais exercé le métier de griot.
26 Mars : Comment êtes- vous venue à la musique ?
Je suis Djéli de sang et dans l’éducation. Les Kouyaté sont des griots de sang et de métier. Mon père n’a jamais chanté. Mais, ma mère chantait un peu. J’ai appris la chanson avec l’un de mes pères, Bouba Sacko et avec sa femme Djéssira Koné. Ils m’ont appris à travailler ma voix et à composer des chansons. Je les accompagnais de temps en temps aux mariages, baptêmes, et Sumu pour me perfectionner.
26 Mars : combien d’albums avez- vous sur le marché et quel message véhicules-tu dans tes chansons ?
J’ai un seul album sur le marché. Je fais autant la musique moderne que la musique folklorique. Dans mes chansons, Je parle des problèmes de notre société. Actuellement je suis en train de préparer un autre album.
26 Mars : pensez- vous qu’il y a une différence entre le djeliya d’aujourd’hui et d’avant ?
Je pense qu’il y a une grande différence entre les deux. Parce qu’avant, il y avait une hiérarchie dans le griotisme. On consultait toujours les ainées avant de poser des actes. Mais, la jeune génération ne respecte pas ces valeurs-là. On a trop d’orgueil et la cupidité a pris le déçu sur l’honneur et la dignité. Ce qui fait qu’on n’a souvent du mal à échanger avec les devanciers.
De nos jours, n’importe qui se proclame griot et chante comme il veut, sans tenir compte de l’essence même du métier. Le griotisme fait partie intégrante de notre tradition, donc il doit être exercé avec beaucoup de professionnalisme et de respect des valeurs. Moi personnellement, je demande toujours aux anciens avant de poser certains actes, car le griot est le porte flambeau de notre culture.
26 Mars : Que pensez- vous des querelles entre les griots ?
Moi, je n’appellerais pas ça querelle. Mais je dirai plutôt, des incompréhensions. Parce que, les griots sont aussi des hommes, c’est normal qu’il y ait souvent des mésententes. Le griotisme est une grande famille. Vous allez remarquer que ces mésententes ne durent pas, parce que les liens qui nous lient sont très forts. On se discute et on se réconcilie rapidement.
26 Mars : Que pensez- vous de la polygamie ?
Moi personnellement, je n’aime pas la polygamie. Mais, elle fait partie intégrante de notre tradition et de la religion musulmane. Ce qui fait que, nous sommes obligés de l’accepter. Mais, je pense qu’avant de se plonger dedans, on doit réfléchir à tous les paramètres. Aucune femme n’aime la polygamie. Si un homme décide de prendre plusieurs femmes, il doit être capable de les traiter de la même manière sans discrimination, c’est ce que le coran dit.
En général, quand un homme veut prendre une deuxième femme, il commence toujours par maltraiter la première, chose qui n’est pas normale. Aujourd’hui, au Mali, les foyers polygamiques font plus de divorces que les foyers monogamiques.
26 Mars : Que pensez- vous du processus de réconciliation qui a commencé dans notre pays ?
Pour moi, les maliens doivent se donner la main et accepter de se pardonner car, le Mali est un pays de paix et d’hospitalité. Avant, le Mali était un pays convoité parce que nous avions des valeurs qui attiraient les étrangers. Je prie chaque jour pour que la paix revienne au Mali. Les armes, seules, ne peuvent pas résoudre les problèmes. Il faut forcement s’assoir et discuter.
Propos recueillis par Rokya Berthé.