Le Reporter : Quel était le but de cette rencontre avec l’Urd ?
Modibo Sidibé : Vous le savez, nous avons tenu notre Congrès, il y a quelques semaines. Il était important qu’au sortir de ce Congrès, comme les résolutions le demandaient, de prendre attache avec un certain nombre de partis politiques, à commencer par les partis politiques représentés à l’Assemblée nationale, pour leur dire où est-ce que nous en sommes. Selon nos nouvelles orientations, nous nous réclamons de la sociale démocratie. Quel est le contenu de notre manifeste ? Il fallait clarifier notre positionnement. Vous savez, nous avons choisi d’être dans l’opposition républicaine et démocratique, par choix politique et idéologique ; par choix pour la République et la démocratie, pour que la pratique de l’opposition devienne naturelle, parce que c’est indispensable en tant que tel.
Voilà pourquoi nous sommes venus ici et nous continuerons, dans les jours à venir, à rencontrer d’autres partis politiques pour leur expliquer un peu un certain nombre de choses, discuter et échanger avec eux. Je dois dire que nous avons été bien reçus ; nous avons eu des échanges extrêmement importants qui pourront permettre que, sur un ensemble de choses relevant d’un véritable dessein républicain et démocratique, nous puissions mener des combats pour renforcer la démocratie, la République pour que les deux mamelles, la majorité et l’opposition, puissent fonctionner. Parce qu’il est clair qu’il ne s’agit pas de diaboliser l’opposition ou la majorité et qu’il ne s’agit pas pour l’opposition de vouloir paralyser la majorité dans l’exercice de ses choix pour conforter le peuple. Il y a un minimum de choses qu’il faut faire sur la base des règles républicaines et démocratiques.
À l’issue de votre Congrès, il y a eu des démissions. Quel commentaire en faites-vous ?
Vous demandez un commentaire ? Notre Congrès est clair, notre position est claire. Nous sommes dans l’opposition et c’est ce que nous avons fait valoir à l’Assemblée nationale. Il y a des militants et cadres du parti qui ont souhaité ne pas épouser cela et qui ont démissionné du parti. C’est un choix politique et démocratique. Pour le reste, nous nous continuons notre combat qui est notre positionnement dans l’opposition. Nous allons continuer à nous battre, parce que l’opposition ne veut pas dire que nous n’avons pas d’engagement patriotique ; ça ne veut pas dire qu’on n’a pas d’engagement pour notre pays. Ça veut dire tout simplement que nous serons critiques et vigilants ; que nous aurons à cœur de travailler à une alternance politique crédible. C’est ça aussi la démocratie pour que les Maliens aient à tout moment leur choix. Mais, nous serons là aussi, comme on l’a dit, pour soutenir ce que le gouvernement entreprendra et qui va dans le sens du pays. Ce qui ne va pas dans ce sens, je puis vous dire que nous serons là aussi sur la base de la République et de la démocratie. Ce que nous attendons des membres du gouvernement, c’est le respect de l’opposition. J’espère que cela va être entamé pour que nous allions vers un statut de l’opposition. Cela nous permettra de conforter notre démocratie et notre République.
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Soumaïla Cissé de l’Urd: «Nous revendiquons de construire ensemble une opposition crédible et républicaine, qui fera avancer le débat»
Le Reporter : Qu’est-ce qui ressort de cette rencontre avec les Fare ?
Soumaïla Cissé : D’abord, je vais vous dire qu’à l’Urd, nous avons été très honorés de la visite du président Modibo Sidibé et de l’équipe des Fare. Nous sommes très honorés, parce que nous avons combattu ensemble et ce que les gens oublient aujourd’hui, c’est que si nous sommes arrivés au retour à une vie constitutionnelle normale, aux élections législatives et à la présidentielle, c’est parce que des hommes et des femmes se sont battus. Des hommes et des femmes ont mis en avant des principes républicains et démocratiques. Et ceux et celles qui constituent les Fare et l’Urd font partie de ceux-là.
Aujourd’hui, nous nous retrouvons non pas par un esprit mesquin, mais parce que nous avons tous les deux un engagement patriotique réel. Nous revendiquons d’aimer ce pays, autant que chaque Malienne. Nous revendiquons de nous sacrifier pour ce pays, autant que chacun. Nous revendiquons d’avoir fait beaucoup pour ce pays et que nous sommes prêts à nous sacrifier pour ce pays et à faire encore plus pour ce pays. Nous revendiquons de construire ensemble une opposition crédible et républicaine, qui fera avancer le débat. Parce que nous manquons de débat. Nous revendiquons une opposition qui va critiquer et accepter ce qui va dans le bon sens. Une opposition qui va proposer de nouvelles choses pour que le pays avance tant au niveau de la relance économique et judiciaire, qu’au niveau du choix des hommes et des femmes qui vont diriger ce pays. C’est pourquoi nous sommes très fiers aujourd’hui de recevoir l’équipe des Fare. Et nous les félicitons pour leur Congrès, pour le courage de ces hommes et des ces femmes. Le combat sera difficile, mais nous y parviendrons. C’est pour vous dire qu’aujourd’hui, c’est avec beaucoup d’espoir que nous nous sommes rencontrés. Nous allons approfondir la discussion pour mettre en avant des solutions et des propositions concrètes pour faire avancer ce pays. Et je suis sûr qu’on pourra le faire au regard de l’expérience et de l’engagement patriotique des hommes et des femmes que j’ai rencontrés.
Comment se porte l’opposition aujourd’hui ?
L’opposition se porterait mieux, si les jeux étaient clarifiés de partout, si le statut de l’opposition était reconnu par le gouvernement, si les devoirs et les droits de l’opposition sont mis en avant, et si l’opposition est acceptée et confortée par le choix démocratique que le peuple malien a fait. Cela fait 20 ans que nous nous sommes battus ; ça fait 20 que nous avons mis en avant les principes républicains et démocratiques et il faut qu’il y ait une opposition qui puisse se mouvoir dans ce pays ; une opposition qui puisse avoir accès à l’Ortm ; une opposition qui ne soit pas zappée sur les images chaque fois que quelqu’un de l’opposition apparaît. Nous devons avoir des temps d’antenne pour expliquer que nous aimons ce pays comme les autres. Les populations doivent nous entendre pour savoir ce que nous proposons. Je demande solennellement au gouvernement de mettre en avant ces principes ; d’accepter très vite que nous discutions d’un statut de l’opposition ; que nous puissions avoir accès aux médias d’Etat, que nous ayons notre place dans cette République ; que nous assumions nos devoirs et que nous soyons prêts à les assumer. Après ça, vous reviendrez me poser la question et je vous répondrais.
Souhaiteriez-vous avoir d’autres partis politiques dans l’opposition ?
Bien sûr, je pense que nous allons élargir plus que possible, mais nous ne cherchons pas une majorité mécanique. Nous cherchons des gens qui défendent des principes. Nous cherchons des gens avec lesquels nous allons mettre des valeurs en avant ; des gens qui sont prêts à lutter, à se priver d’un certain nombre de confort parce qu’ils partagent nos idéaux ; des gens aptes à se battre pour ce pays, qui veulent réduire le chômage au niveau des jeunes, qui veulent une éducation qui marche, qui veulent que la santé soit là, que les routes existent et que le débat démocratique se fasse, et que la justice soit équitable. Je pense qu’il y a tellement de chantiers que nous allons mettre en avant. Nous avons des bras pour bâtir la maison, et mieux, la maison se portera.
Entretiens réalisés par Kassim TRAORE
SOURCE: Le Reporter