Le musée parisien poursuit son exploration de l’histoire des arts non-occidentaux. Cette nouvelle exposition accueille une centaine d’œuvres consacrées aux relations entre la Chine et l’Afrique.
Des œuvres d’artistes venus d’Afrique, d’Asie et d’Europe sont présentées dans le cadre de l’exposition Chine Afrique au Centre Pompidou à Paris jusqu’au 18 mai 2020. Elles illustrent des thèmes politiques et économiques liés au colonialisme ou au néocolonialisme.
Interrogée par RFI, l’une des commissaires de l’exposition, Alicia Knock, explique : “Chine – Afrique s’inscrit dans une histoire qui est aussi celle du Centre Pompidou, où il y a eu Les Magiciens de la Terre en 1989, mais surtout Africa Remix en 2006 et Modernités plurielles en 2013, qui essayait de redéfinir et d’ouvrir la notion de modernité à des territoires extra-occidentaux. Donc (cette manifestation) continue l’histoire et essaie de la reprendre. Il s’agit d’affirmer un axe de travail qui réfléchit à l’articulation de récits extra-occidentaux. Elle s’articule autour d’un passé qui nous concerne et continue à nous concerner. Aujourd’hui, on est dans des dispositifs où ces ingérences coloniales se sont transformées et sont peut-être moins visibles, mais elles sont toujours présentes.”
L’histoire occidentale se trouve questionnée
Au tournant du 20e siècle, le penseur américain du panafricanisme, W.E.B Du Bois, défend l’idée selon laquelle le monde asiatique peut tracer la route d’une émancipation raciale mondiale.
Les travaux de François-Xavier Gbré, Pratchaya Phinthong, Yonamine, Anawana Haloba Annie Anawana Haloba interrogent les transformations nées de cette relation entre la Chine et l’Afrique.
L’installation filmique de Kiluanji Kia Henda où l’on voit une antilope empaillée du Musée d’histoire naturelle de Luanda, symbole de l’identité nationale angolaise, raconte sa condition d’objet symbolique, comme artefact ethnographique traversé dans un même temps par la mémoire bouleversée de la guerre civile.
Musquiqui Chihying propose un travail sur une monnaie sonore, qui puisse être une alternative à la politique monétaire du franc CFA. Et Binelde Hyrcan s’inspire de l’envol du légendaire empereur chinois Wan Hu (vers 2000 av. J.-C.) pour faire écho à l’échec de la politique spatiale angolaise.
L’exposition propose aussi une série de récits intimes comme dans les films de Marie Voignier et Wang Bing. Ils observent respectivement les trajectoires d’une communauté de commerçantes camerounaises et d’un migrant nigérian à Guangzhou. Le travail d’Anawana Haloba est une restitution poétique de la construction en Zambie d’une ligne de chemin de fer par les Chinois.
Un espace d’interrogation sur des problématiques géopolitiques, économiques, idéologiques. Faut-il voir dans le lien sino-africain une forme totale d’affranchissement colonial ou l’apparition d’un nouveau rapport de domination ? Quelles réalités nouvelles émergent de cette rencontre transculturelle ? Quelles circulations, quelles villes, quelles communautés ? Quelles projections utopiques et dystopiques voient le jour ? Les questions qui découlent de cette relation libèrent un imaginaire critique.