« La France ne lâchera jamais ses intérêts même si le Mali doit disparaître ». C’est moins, la conviction M. Macké Diallo, du reste convaincu que sous le prétexte de lutter contre le terrorisme, a fait de notre pays un terrain d’expérimentation militaire et de positionnement pour l’ancienne métropole. Il invite donc les Maliens à avoir l’intelligence de transformer ce traquenard en vrai partenariat et d’avoir la patience de l’amener en notre faveur. Voici sa réflexion.
Le Malien est superficiel, passionnel, plus regardant sur la richesse qui saute à l’œil. Tandis que les Occidentaux sont plus méthodiques, plus patients, plus portés sur le long terme.
Dans ce qui se joue au nord du Mali, le caractère des protagonistes impacte énormément sur les actes posés.
En 2012, la France en apportant son aide au Mali pour chasser les djihadistes avait surtout trouvé une belle occasion de se déployer dans le Sahara. Un espace vaste, idéal pour perfectionner son matériel militaire et surtout pour exhiber en situation réelle leurs performances.
Nos dirigeants connaissent l’importance stratégique de notre pays, ils sont au courant des enjeux, ils en profitent même souvent pour atteindre des buts personnels. Le nord du Mali a un tel poids géostratégique qu’il peut être un bon accélérateur pour la carrière d’un politique opportuniste qui peut s’en servir pour assouvir ses ambitions.
Dans la conscience collective des masses populaires, d’ailleurs une croyance sournoisement entretenue par les dirigeants, le Mali est pris en otage par les Français dans sa partie septentrionale. L’idée générale veut que cette partie du pays soit extrêmement riche malgré les apparences. Parait-il que les soldats français y exploitent des mines d’or à ciel ouvert, des images d’extraction du minerai prêt à l’emploi sont souvent partagées sur les réseaux sociaux, alors que l’or a besoin d’être traité après extraction pour son utilisation. Des images jamais démenties officiellement par nos autorités.
On parle d’exploitation en catimini d’autres matières naturelles dans cette zone du Mali par les Français, mais aussi des potentialités, eau potable, uranium, gaz naturel, pétrole, etc.
Pour les Maliens, l’armée française est juste là pour permettre l’exploitation de nos ressources naturelles, une grande ignorance de leur part, mais une situation qui permet au pouvoir malien de se positionner comme le rempart qui peut apaiser les populations et ainsi être un allié sûr, et lorsque le besoin se fera sentir, il va espérer aussi sur la protection des Français. Un jeu qui n’est pas forcement pour l’intérêt supérieur de la nation malienne. Les exigences du réalisme politique priment sur le patriotisme.
Alors que vaut le Mali pour la France ?
Aujourd’hui le Mali pour la France est un enjeu militaire et financier bien essentiel. Elle a besoin de montrer des muscles pour se faire respecter et elle a besoin de vendre ces engins militaires pour rehausser ses finances.
La France s’est toujours considérée comme une puissance militaire, mais elle n’avait jamais eu le respect qu’elle voulait avant le conflit au nord du Mali. Son intervention au Mali a permis à la France d’étaler son savoir-faire et de se faire remarquer militairement aux yeux du monde. Cette considération des autres lui a donné le rang qu’elle a toujours souhaité. Elle est désormais respectée grâce à sa puissance de feu et non pour son pouvoir sur les pays francophones d’Afrique colonisés par elle. Les regards des pays riches et potentiels acheteurs d’armement ont commencé aussi à lorgner vers Paris.
Le terrain au Mali est propice pour les expérimentations, la chaleur, les dunes de sable, l’immensité du territoire, les collines de gré. Une petite guerre djihadiste maîtrisable pour tester les engins et mettre à l’épreuve dans des situations réelles les soldats pour leur endurance. Le nord du Mali est carrément devenu une arrière-cour de l’armée française.
Les pays arabes sont les plus grands acheteurs d’armement. Le désert malien est identique à la géographie de ces pays, donc confronter les engins dans ce milieu est un argument de vente favorable aux armes françaises.
Les ingénieurs militaires français sont en train d’inventer de nouvelles armes, d’innover en rendant le matériel plus petit, plus efficace, et sollicitent de plus en plus le numérique. Les expériences de perfectionnement sont pratiquées dans les conditions réelles au Mali. Les potentiels clients observent en direct la puissance du matériel français, les manœuvres sur un terrain dur du « GRIFFON » une nouvelle génération de véhicule blindé climatisé, ou l’utilisation contre les bandits armés des « CHIENS AUGMENTES » c’est-à-dire dotés de camera pour mieux cerner d’autres visions.
Par ailleurs, il importe de savoir que le nord du Mali est un no mans ’land qui expose l’Europe. En effet, le Sahara peut être un véritable nid de djihadistes hostiles aux Occidentaux, et vu sa proximité, il peut être une menace sûre contre les pays d’Europe. La présence de l’armée française sert de sentinelle de protection, de rempart. Ce qui donne encore de l’envergure à la France sur son continent. Un leadership très important.
Nos autorités ont été obligées de signer un accord militaire qui permet à la France de formaliser sa présence. Ce que nos dirigeants n’ont pas encore pris en compte est que cette présence peut être transformée en avantage pour le Mali aussi. Mais pour arriver à cela, ils doivent être plus intelligents, plus courageux et surtout patriotes.
La présence de la France au Mali peut servir financièrement le Mali, elle peut nous permettre d’avoir une armée plus forte et ainsi sécuriser nos territoires. Pour l’atteinte de ces objectifs, notre pouvoir doit d’abord être sérieux, avoir un plan de renégociation de l’accord militaire, se donner une vision de reconstruction de l’armée malienne et surtout avoir une capacité énorme de proposition.
La France ne lâchera jamais ses intérêts même si le Mali doit disparaître, donc à nous d’avoir l’intelligence de transformer ce traquenard en vrai partenariat et d’avoir la patience de l’amener en notre faveur. Le temps peut être pour nous, l’appartenance naturelle au terrain est aussi un grand atout.
Mais tout est assujetti prioritairement à notre volonté de nous en sortir.
Macké Diallo
Info Matin