Le fief du MNLA dans le Nord-Mali, où nos deux journalistes ont été assassinés, est toujours au centre du débat ce lundi dans la presse de la sous-région. «Le Mali est-il encore un pays souverain, quelques mois après la libération du Nord ? Les derniers évènements montrent que la marge de manœuvre des nouvelles autorités de Bamako reste encore étroite à Kidal», relèveLe Journal du Mali. Toutefois, remarque-t-il encore, «les lignes semblent vouloir bouger, depuis l’incursion de l’armée malienne, vendredi. Une colonne parmi laquelle figure le général Gamou. Est-ce un début de réponse du Mali aux rebelles du MNLA, qui ont un contrôle évident sur Kidal ?», s’interroge Le Journal du Mali. «Il faut dire, tempère-t-il, que les dernières décisions des autorités n’étaient pas de nature à rassurer les Maliens et montrent que les Accords de Ouagadougou ne trouvent toujours pas leur application. L’administration absente à Kidal, le refus des groupes armés de se cantonner, et la récente levée des mandats d’arrêts contre d’anciens chefs rebelles, soupçonnés d’accointance avec Ansar Dine ou Aqmi, a créé l’incompréhension chez beaucoup.»
Avancées ?
Toutefois, il y a des avancées, note le site d’information Fasozine, avec cette promesse du MNLA qui a décidé de libérer dans trois jours deux lieux stratégiques du pouvoir à Kidal, à savoir le siège du gouvernorat et celui de la radiotélévision nationale. «Une annonce d’autant plus symbolique que l’occupation de ces bâtiments publics était le signe même du non-Etat à Kidalrelève Fasozine. Et lorsque le gouvernement malien déclarait que cette ville était la seule où la souveraineté de l’Etat malien était en souffrance, il avait tout à fait raison. C’est donc heureux de voir le MNLA et ses alliés faire un pas en direction de la république. Si le sang versé par Ghislaine Dupont et Claude Verlon peut aider le Mali à recouvrer son intégrité et son unité, les deux envoyés spéciaux de la ‘radio mondiale’ ne seront pas morts pour rien.»
L’Observateur Paalga , toujours au Burkina reste sceptique… «Attendons le 14 novembre pour voir si la décision prise par le MNLA de restituer à l’Etat le gouvernorat et la radio télévision de Kidal sera effective. C’est malgré tout le moment des grandes interrogations chez les jusque-là maîtres des lieux, relève le quotidien burkinabé (…). Bilal Ag Cherif, patron du MNLA et compagnie, sont visiblement à la croisée des chemins. En plus compliqué pour eux, se profilent à l’horizon les prochaines législatives maliennes. Ce sera l’heure du grand suspense, l’occasion pour les membres du Mouvement de convaincre que les populations des régions du Nord (Kidal, Gao et Tombouctou), dont ils jurent qu’ils défendent les intérêts, les portent dans leur cœur.»
Illusions ?
Sceptique également le site d’information Guinée Conakry Infos : «on serait tenté de voir dans l’annonce par le MNLA et ses alliés de leur décision conjointe de libérer le gouvernorat et le siège de l’antenne locale de l’ORTM à Kidal, un début de décrispation de la situation dans le nord du Mali. Mais en réalité, ce serait se bercer de trop d’illusions, affirme le site d’information guinéen. Dans les faits, poursuit-il, le contrôle des autorités souveraines du Mali sur le vaste territoire récemment libéré par les Jihadistes, n’est que très relatif, pour ne pas dire aléatoire. Des poches de résistance terroriste demeurent toujours en de maints endroits. Alors que, pour ce qui est des touarègues, le gouvernement malien a les mains liées, estime Guinée Conakry Infos, par la protection tacite que la communauté internationale, dans son ensemble et la France en particulier, leur témoignent. Une situation qui commence de plus en plus à agacer Bamako et qui pourrait constituer la raison d’un divorce prématuré entre François Hollande et un Ibrahim Boubacar Keïta, plutôt jaloux de la souveraineté de son pays. En dépit des efforts de discrétion et des subtilités des discours diplomatiques, relève encore Guinée Conakry Infos, l’opposition entre les autorités de Bamako et celles de la France, à propos de la position équivoque de Paris à l’égard du MNLA, est de plus en plus évidente… »
Enfin, retour à la presse burkinabé, avec le quotidien Sidwaya qui estime, lui, que la crise du Nord-Mali peut encore se résoudre par la stricte application des accords de Ouagadougou : «tant qu’on suivra cette feuille de route, il n’y a pas de raison que le Mali ne retrouve pas la quiétude, estime Sidwaya. Utiliser la violence pour désarmer les mouvements qui acceptent encore d’aller à la table de négociation, c’est disséminer des mines antipersonnel au Mali et même dans la sous-région. Il vaut mieux poursuivre le dialogue qui a déjà fait ses preuves.»