Faute de pouvoir surfer sur son bilan, jugé « catastrophique », pour se faire réélire, en juillet prochain, le régime IBK a entrepris une vaste opération de séduction de l’électorat. Chat échaudé, craignant l’eau froide, les Maliens n’entendent pas, dans leur écrasante majorité, refaire ce qu’ils appellent « l’erreur de 2013 » : le plébiscite d’IBK.
Octroi de plusieurs centaines de billets d’avion, avec tous frais payés, à des pèlerins ; propositions de postes ministériels ou d’ambassadeurs à plusieurs leaders politiques contre leur soutien à IBK dans le cadre de la présidentielle de 2018; distribution de véhicules 4X4 flambant neufs, création à coups de millions CFA d’associations de soutien à la candidature d’IBK, menace de poursuites judiciaires contre les candidats indépendants, soupçonnés ou accusés de détournements de fonds publics…
L’ « opération Hibou » lancée
A dix mois de l’élection présidentielle, tout semble être mis, désormais, en œuvre pour assurer, à « Maninka Bourama », un second et dernier bail à Koulouba. Outre les cadeaux, en nature et en espèces, gracieusement, offerts à des personnalités influentes, des centaines de millions CFA, voire des milliards, seraient déboursés pour mobiliser le « bétail électoral ».
S’y ajoutent le ballet aérien des quelques avions militaires, diffusé en boucle par la télévision nationale ; mais aussi, les meetings organisés à coups de millions par les bonzes du régime en faveur d’IBK, candidat du parti au pouvoir.
Considéré en 2013, comme le seul candidat à même de restaurer l’autorité de l’Etat sur toute l’étendue du territoire national et à restituer, aux Maliens, leur fierté d’antan, IBK a été élu avec un score inédit : 77 % des voix au second tour, face à Soumaïla Cissé, son challenger d’alors.
Ses slogans étaient « Le Mali d’abord ! », « Pour le bonheur des Maliens ! ». Tout programme. Du moins, pour ceux qui voulaient en finir avec la corruption, devenue un sport national dans notre pays. Et le détournement impuni du dénier public, d’un naturel insoupçonné.
A dix petits mois de la fin de son quinquennat, patatras ! L’espoir, suscité par son élection, a fait place au désespoir. A la désespérance. Près des 2/3 du pays échappent au contrôle de l’Etat. Le nord et le centre du pays sont devenus des terrains de jeu des « Barbus » de tout poil. Près de 500 écoles y sont fermées, faute de sécurité. L’autorité de l’Etat est, partout, bafouée. Armés jusqu’aux molaires, les bandits règnent en maîtres. Dans les villes comme à la campagne.
Proches du pouvoir, une poignée de « privilégiés » s’en mettent plein la besace, au détriment des finances publiques. Et mènent une vie de nabab, au nez et à la barbe de l’écrasante majorité des Maliens. Qui peinent à s’offrir trois repas par jour. Ou des soins de santé primaires.
Face à ce tableau, pour le moins noir, nombreux sont les « amis » d’IBK qui lui auraient déconseillé de postuler pour un second mandat. « On ne peut, légitimement, postuler pour un second mandat lorsqu’on n’a pas été capable de tenir les promesses de son premier mandat », disent-ils.
IBK, vers un second mandat périlleux
Organisées, récemment, sur toute l’étendue du territoire national, les marches contre le projet de révision constitutionnelle traduisent beaucoup plus le raz-le bol de nos concitoyens face à ce régime, plutôt que du rejet d’un projet, dont l’écrasante majorité des manifestants ignorent les « tenants et les abroutissants ». Convaincue de l’impopularité du régime, même l’Elysée aurait déconseillé à IBK de postuler pour un second mandat. Du moins, si l’on en croit des sources concordantes.
C’est pour pallier à la dégringolade de la côte de popularité d’IBK, au sein de l’opinion publique, qu’une « opération séduction de l’électorat » vient d’être pensée et initiée par les « officines obscurs » du pouvoir.
Il s’agissait, selon nos informations, d’user de tous les moyens pour assurer la réélection d’IBK à la prochaine présidentielle, prévue dans 10 mois. Ils vont de la corruption des personnalités influentes, à l’achat de conscience, en passant par le chantage envers les futurs candidats indépendants. Tous ceux qui sont soupçonnés de détournements de fonds publics – ou perçus comme des candidats à même de battre IBK – seront menacés de se retrouver derrière les barreaux. A condition, bien entendu, qu’ils renoncent à leurs ambitions présidentielles. La campagne de dénigrement médiatique, dont Modibo Koné, ex-PDG de la CMDT et supposé candidat à la présidentielle de 2018, a fait l’objet ces dernières semaines, en est la parfaite illustration. Reste maintenant à savoir si les Maliens, considérés à tort ou à raison comme du « bétail électoral » par la classe politique, se laisseront « acheter », une fois de plus, par cette ébauche de milliards et de cadeaux.Pratiqué, depuis 25 ans par la classe politique plus préoccupée par son bien-être personnel que celui du peuple, l’achat de conscience, remis au goût du jour par le régime IBK prouve, à suffisance, qu’il est en déphasage avec le contexte socio-politique actuel. Contexte, marqué d’une part, par l’éveil politique du citoyen décidé à choisir, en toute conscience, les hommes et les femmes chargés de décider en leur nom. Et, d’autre part, par le désaveu cinglant, dont la classe politique fait l’objet pour avoir, 25 ans durant, saigné le pays à blanc. D’où la décision de l’écrasante majorité des Maliens de mettre la « vieille garde politique », dont IBK est l’une des têtes de proue, à la retraite en 2018. Comme c’est le cas en France, au Bénin ou au Sénégal.
Chose que le pouvoir en place feint de ne pas comprendre. A ses risques et périls.
Oumar Babi / Canarddechaine.com
Le Canard Déchaîné