Les mauvaises manières ont la vie dure. A peine éteints les lampions de la campagne électorale, le régime militare, fidèle à lui-même, redevient ce qu’il n’a jamais cessé d’être : raciste, tribaliste, corrompu, génocidaire, négrophobe obsessionnel et sans frontières. La machine infernale est, une fois de plus, lancée.
La chasse aux noirs est à nouveau ouverte. Les forces de répression ont carte blanche pour s’y livrer en toute impunité. On se croirait revenu aux pires heures annonçant les pogroms et déportations de 1989. Normal. Des génocidaires sont encore au sommet de l’Etat. Le Général Mohamed Ould Ghazouani, ne l’oublions pas, est un homme du sérail. Il est l’obligé du général président putschiste sortant Mohamed Ould Abdel Aziz. Comme en 1989, tout est prêt. Il suffit du signal. Le discours est rodé avec les composants habituels : le complot de l’extérieur (entendez de l’Afrique subsaharienne méprisée et considérée comme un prolongement de la question nationale), les étrangers infiltrés et prêts à déstabiliser le pays, les faux Mauritaniens (entendez les noirs mauritaniens), des dirigeants politiques à la solde de l’étranger (entendez les responsables politiques noirs).
Des signes avant-coureurs étaient perceptibles. Un dignitaire du régime a expliqué que les foules des meetings des candidats noirs étaient gonflées par des étrangers. Sur les réseaux sociaux, leurs relais amis distillent des messages de haine.
Le complotisme sert d’exutoire et de prétexte à leurs crimes à venir. Non contents d’avoir honteusement truqué les élections et d’avoir volé la victoire, (des images éloquentes en témoignent et toutes les informations crédibles indiquent la lourde défaite du candidat militaire du pouvoir militaire qui n’est même pas qualifié pour le second tour), ils cherchent à parachever le génocide des noirs mauritaniens entamé en 1989. Tout est mobilisé à cette fin. Rien ne sera épargné pour accomplir les crimes odieux qui se préparent et pour les justifier : créer de faux mouvements de rébellion, fomenter des troubles violents, orchestrer des provocations en tous genres. La police politique est à la manœuvre.
Des jeunes Noirs continuent d’être arrêtés massivement, réprimés et mutilés du fait d’avoir accompli leur devoir citoyen en votant pour l’opposition en général. Kane Hamidou Baba candidat de la Coalition Vivre Ensemble (CVE) et Biram Dah Abeid, qui sont les vainqueurs, devraient s’affronter au deuxième tour de cette présidentielle. Rien n’est épargné : le siège de la Coalition Vivre Ensemble (CVE) est sauvagement vandalisé puis fermé, la marche de l’opposition prévue n’est pas autorisée. Survivant de la prison mouroir de Oualata où il subit les pires exactions, Samba Thiam, cadre dirigeant de la CVE et leader des Forces Progressistes pour le Changement (FPC) a été de nouveau arrêté par la police de la junte. Quel crime a-t-il donc commis? Celui d’avoir fait campagne pour le changement, d’être fidèle à sa conviction forte de justice et d’avoir marché contre la grossière fraude électorale que le pays vient de connaître. D’autres arrestations sont à venir.
Comme aux pires moments de l’Apartheid, des quartiers pauvres de Nouakchott, peuplés majoritairement de noirs, sont quadrillés comme le furent Soweto et Sharpeville. Mort en Afrique du Sud, l’Aparheid survit en Mauritanie sous une autre forme. En face, la résistance pacifique tient bon et courageusement. Les mains nues. Prenons garde. Ce qui se prépare ressemble à ce qui s’est passé en 1989. Des populations entières sont en danger de mort. Ne les abandonnons pas.
Face à cette situation grave, nous devons faire respecter les choix électoraux de notre peuple, faire libérer le président Samba Thiam sans condition, créer les conditions de retour de l’armée dans les casernes pour que le chantage du chaos reste au stade de l’intention.
Ciré Ba – Paris