Jugée « solide » par les autorités maliennes, la croissance économique du pays est l’une « des plus performantes de la sous-région ». Le taux de croissance du PIB enregistré en 2017, 5,3%, reste cependant insuffisant pour réduire de façon significative la pauvreté, dont l’incidence a été estimée à 44,9% par le CREDD sur la même période. D’où la nécessité d’une inclusion pour faire profiter le maximum de Maliens des fruits de la croissance. Mais la réalisation de cet objectif est liée à de nombreux facteurs, dont la volonté politique, décisive pour réduire les inégalités sociales.
« Nous avons la mission de suivre l’évolution du niveau de pauvreté et d’alerter les autorités », explique M. Mahamadou Zibo Maïga, Coordonnateur de la Cellule technique du cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (CT/CSLP). Au Mali, cette structure a connu plusieurs évolutions avant de devenir le Cadre stratégique pour la relance économique et le développement durable (CREDD), en 2016. C’est le cadre de référence pour la conception, la mise en œuvre et le suivi des différentes politiques et stratégies de développement. Ces cellules, présentes dans de nombreux pays, doivent désormais intégrer les aspects économiques, sociaux et environnementaux du développement, afin d’éradiquer la pauvreté et d’atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030.
Selon le rapport 2017 du CREDD, les parts des secteurs primaire et tertiaire dans le PIB ont été « prédominantes », avec respectivement 38,3% et 36,7%. Celle du secteur secondaire stagnant à 16,6%.
Nécessaire équilibre
Malgré cette contribution importante à la production de la richesse nationale, le secteur primaire, qui occupe près de 80% de la population, reste le plus touché par la pauvreté. En effet, selon l’Institut national de la statistique (INSTAT), « les trois formes de pauvreté sévissent au Mali et sont plus répandues en milieu rural, quelle qu’en soit la forme », selon les résultats de l’Enquête modulaire et permanente auprès des ménages (EMOP 2016).
Afin d’assurer une « croissance économique inclusive et durable », il « faut des politiques publiques plus ciblées » également, relève le Docteur Dramane Lassana Traoré, économiste à la Faculté des sciences économiques et de gestion (FSEG).
Compte tenu du fait que c’est au niveau du secteur primaire que se retrouve une grande masse de la population, « il serait mieux que la production de richesse vienne de ce secteur. Il n’y aurait ainsi plus besoin de redistribution », explique M. Traoré. Car, la redistribution connaissant des contraintes, le monde rural, où se concentre globalement la pauvreté, pourrait directement accéder aux biens et services nécessaires à son épanouissement. Ce qui nécessitera, selon le spécialiste, d’importants investissements.
Des enjeux majeurs
Afin de réaliser cet objectif, assurer l’inclusion économique passe par la mise en œuvre d’une volonté politique soutenue par « la rigueur et le suivi », ajoute M. Sadio Koly Kéïta, analyste à la CT/CSLP.
Dans l’atteinte de cette « croissance économique inclusive et durable », le Mali a donc défini des domaines prioritaires, tels que le développement rural et la sécurité alimentaire. Les autorités ont développé à cet effet plusieurs approches et stratégies, dont le Plan de passage à l’approche sectorielle du développement rural, et fourni des « efforts dans la gouvernance du secteur agricole », comme la mise en œuvre de la Loi d’orientation agricole, selon le rapport 2017 du CREDD.
Mais, malgré les investissements consentis dans le cadre de la modernisation de l’agriculture et de l’augmentation de la production, « des efforts doivent être déployés pour mieux cerner les problèmes de gestion, de commercialisation et de transformation des produits agricoles », préconise le rapport du CREDD.
Concernant le secteur de l’éducation, le rapport relève que les indicateurs connaissent des évolutions mitigées et sont aggravés par la fermeture de nombreuses écoles dans le Centre et le Nord du pays, en raison de l’insécurité grandissante dans ces zones. Il suggère donc de prendre en compte les indicateurs de qualité et les recommandations du cadre de partenariat impliquant tous les acteurs.
Quant au secteur de la santé, il reste confronté à de nombreuses contraintes, parmi lesquelles l’insécurité, limitant l’accès à certaines localités, les retards dans les annonces de financement des PTF (Partenaires techniques et financiers) au moment de la planification, la non disponibilité de locaux adaptés et l’insuffisance en matériel biomédical et en spécialistes de sa maintenance.
Ainsi, les enjeux en termes de développement institutionnel, économique et social sont considérables, selon le CREDD. Il convient alors d’obtenir une « meilleure performance des politiques publiques dans tous les secteurs », conclut son rapport.
Journal du mali