La paix et la stabilité dans notre pays dépendent en partie de la résolution des problèmes fonciers. Celle-ci suppose une lutte implacable contre les spéculateurs fonciers et l’arrêt des pratiques d’expropriation des paysans de leurs terres. Telle est la conviction de l’organisation « les Associations pour le Mali » (APM). Celle-ci a organisé samedi, à Kati, un meeting d’information sur les expropriations de terres dont sont victimes plusieurs villages du cercle de Kati.
La manifestation était placée sous la présidence du ministre des Domaines de l’Etat et des Affaires Foncières, Mohamed Ali Bathily. Elle a mobilisé le maire de la commune de Kati, Cheick Hamalla Haïdara, les députés élus dans le cercle, les autorités administratives de la circonscription et une foule importante.
Plus de 30 villages ont participé à la rencontre. Les intervenants venus notamment de Sirakoro Niaré, N’Toubana, Diago, Dio, Tièlè, entre autres localités, ont dénoncé les tentatives d’expropriation des terres agricoles par des commerçants et autres spéculateurs fonciers.
Le président des APM à Kati, Karounga Cissé, a expliqué une démarche dont le but est de désamorcer la bombe sociale qu’est devenue le foncier dans le cercle de Kati. « Les paysans des 36 villages de Kati ne savent plus où donner de la tête. Ils n’ont plus de terres agricoles. Ils ont été spoliés par les spéculateurs fonciers à tel point que l’autosuffisance alimentaire dans la zone est menacée », a expliqué Karounga Cissé.
A sa suite, les porte-paroles des différentes localités se sont relayés pour exposer leurs problèmes. Ainsi, le village de Sirakoro Niaré a dénoncé l’achat par un commerçant de 783 ha de ses terres à l’insu du chef de village, des habitants et des autorités de la localité. Toutes les tentatives des habitants pour annuler la transaction ont été vaines, car l’acquéreur est parvenu à faire émettre un titre foncier sur la zone litigieuse.
Dans le village de N’Toubana, 444 ha font l’objet de litige entre les habitants et un particulier qui lui aussi brandit son titre foncier devant la justice. A Diago, les 16 000 âmes jurent de récupérer par tous les moyens, une superficie 800 ha déduite de leurs terres pour servir de « réserve foncière ».
« On nous parle de réserve foncière alors que nous nous battons pour survivre grâce à nos lopins de terre. Personne dans le village n’est au courant de cette initiative nuisible pour les habitants », a expliqué un octogénaire de N’Toubana. Les femmes exploitantes de sable et de gravier de Kayo expliquent avoir été privées de leur activité par un particulier qui a acheté une partie de la berge du fleuve et leur refuse le passage pour accéder au site où elles exploitent le sable et le gravier.
A Tièlè, les habitants exigent la restitution d’un total de 447 ha vendus à des commerçants qui ont obtenus des titres fonciers. Idem pour les habitants de Diago et Dio qui réclament la restitution de plusieurs centaines hectares de leur terre achetés par des opérateurs économiques dans « des conditions douteuses ».
Le maire de Kati, Cheick Hamalla Haïdara, a dénoncé les pratiques sur le foncier en cours dans sa commune. « Les commerçants achètent les terres à l’insu de la mairie et après, ils nous trainent devant les juridictions. Il faut mettre fin à cela et que force revienne à la loi », a réclamé l’édile.
Le député Bourama Tidiane Traoré a salué la tenue de ce meeting qui est l’expression de l’exaspération des populations face à la spéculation foncière qui affecte le climat de confiance entre les citoyens et les pouvoirs publics.
Le ministre Mohamed Ali Bathily a rappelé l’intérêt que le président de la République accorde à la paix sociale, à la justice, et à la lutte contre l’impunité. Pour lui, force doit revenir à la loi dans les transactions foncières. Et de dénoncer une fois de plus, la non prise en compte du droit coutumier dans certaines décisions de justice concernant les litiges fonciers. Il a appelé les populations à se mobiliser pour arrêter les pratiques des prédateurs fonciers.
B. COULIBALY
Source : L’Essor