Sans négliger la gestion de crise, les partenaires ont l’ambition d’assurer la viabilité à long terme du Sahel
On pouvait difficilement demander mieux, ils étaient tous là. La présidente de la Commission de l’Union africaine, Nkosazana Dlamini-Zuma, le président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, le président de la Banque africaine de développement, Donald Kaberuka et le Commissaire au Développement de l’Union européenne, Andris Piebalgs, ont effectué le déplacement de Bamako au côté du patron de l’ONU, Ban Ki-moon pour écouter les préoccupations prioritaires de nos populations maliennes, et plus largement celles du Sahel.
L’Organisation des nations unies à travers son Secrétaire général a présenté mardi aux autorités maliennes la stratégie intégrée de l’Onu qui constitue un cadre d’action important pour appuyer les pays de la bande sahélienne. Après la réunion ministérielle pour l’établissement d’une plate-forme de coordination de cette stratégie intégrée, Ban Ki-moon et les partenaires cités plus haut se sont rendus à Tombouctou pour écouter les aspirations des populations de la 6ème Région qui ont vécu dans leur chair et dans leur âme les affres de l’invasion djihadiste dans le Septentrion de notre pays. Revenue à Bamako, la délégation de haut niveau a tenu une conférence de presse au siège de la Minusma, le Lybia Laïco Hôtel.
Parfaitement édifié par sa visite dans la Cité des 333 saints, le Secrétaire général de l’Onu s’est dit déterminé à mobiliser tous les partenaires au développement pour soutenir notre pays, notamment en ce qui concerne la situation politique, la sécurité, le développement, l’aide humanitaire. « La communauté internationale, a déclaré Ban Ki-moon, est solidaire du Mali et des Maliens. Son soutien politique et économique est plus que jamais réaffirmé à votre pays à travers cette visite historique. Ce que je suis venu vous dire, c’est avant tout ceci : nous sommes à vos côtés. J’en veux pour preuve l’impressionnante délégation qui m’accompagne et dont les membres sont comme moi déterminés à apporter une solution définitive à cette crise qui frappe de plein fouet la région. Nous devons dépasser les frontières institutionnelles. C’est maintenant qu’il faut agir ».
La nécessaire coordination des actions. En effet, l’urgence d’action ne se discute pas. Eprouvés par des crises alimentaire et humanitaire répétées ces dernières années, victimes de l’insécurité, soumis à des conditions climatique extrêmes, les pays du Sahel se signalent par une extrême vulnérabilité. Sur une population globale estimée à plus de 80 millions d’habitants, près de 17 millions de personnes dans le Sahel sont aujourd’hui confrontées à l’insécurité alimentaire due à une combinaison de la sécheresse, de l’accessibilité limitée aux denrées alimentaires, des prix élevés des céréales, de dégradation de l’environnement, des déplacements de population et des divers conflits qui secouent la région.
« Nous savons que le Sahel a besoin d’efforts sortant de l’ordinaire. Nous devons trouver le moyen d’intégrer à l’échelle de la région les initiatives portant sur la situation politique, la sécurité et le développement. Nous pouvons vous aider à progresser plus vite, à mettre fin à la succession des crises et à avancer vers la paix, la sécurité et le développement. Le Sahel peut avancer et il avancera, mais seulement s’il est uni », a ajouté Ban Ki-moon.
La présidente de la Commission de l’Union africaine a pour sa part rendu un hommage appuyé au peuple malien en général et aux populations du Nord en particulier qui ont vécu les affres de l’occupation. En un an, la situation a changé pour le meilleur et ce changement est le résultat des efforts concertés des Maliens et de la communauté internationale. Mme Nkosazana Dlamini-Zuma a aussi souligné la richesse de la culture malienne et le rôle essentiel joué par notre pays au sein de l’OUA dans sa quête de l’unité continentale et le parachèvement du processus de décolonisation. « Au moment où le Mali émerge de ses récentes difficultés, il importe de tirer les leçons de cette riche tradition et de cette histoire pour faire émerger la paix et la réconciliation » a-t-elle souhaité en assurant que les efforts de la communauté internationale doivent viser à renforcer la capacité de l’Etat malien et de ses populations pour leur permettre de s’approprier et de conduire la renaissance malienne.
A cet égard, la présence du président du Groupe Banque Mondiale au côté de Ban Ki-moon est un signale d’espoir adressé aux pays du Sahel quête de financements pour leur développement. Jim Yong Kim annoncera l’importante aide financière que son groupe entend mettre à la disposition de la région. Le Groupe de la Banque mondiale consacrera en effet 1,5 milliard de dollars à de nouveaux investissements régionaux au cours des deux prochaines années, en plus de son implication dans d’importants programmes nationaux. Cet important fonds servira à répondre à des besoins prioritaires de développement tels que le renforcement des filets de protection qui aident les familles à faire face aux pires effets des privations économiques et des catastrophes naturelles, l’amélioration des infrastructures et la création de nouvelles possibilités de développement dans les zones rurales ». Ce financement se fera en sus des fonds déjà consacrés, a t-il explicité en ajoutant que ce financement vient s’ajouter aux milliards déjà consacrés aux programmes nationaux et multinationaux de développement en cours dans la région. Il permettra entre autres à accroître la production d’hydroélectricité, la promotion d’autres sources d’énergie propre, l’extension des superficies de terres irriguées, l’appui au pastoralisme, l’extension des services de santé pour les femmes et les filles, et l’amélioration des communications et des connexions entre les pays de la région.
Jim Yong Kim expliquera que ces investissements intègrent une somme de 300 millions de dollars provenant de l’IFC (Société financière internationale), l’organe du Groupe de la Banque spécialisé dans le secteur privé, somme qui servira à renforcer le développement économique de plusieurs pays du Sahel. Par ailleurs, l’Agence multilatérale de garantie des investissements (MIGA), qui fournit des services d’assurance contre les risques politiques, consacrera au cours de la prochaine année une somme de 585 millions en garanties pour un projet d’exportation de gaz naturel de la Mauritanie au Sénégal et au Mali.
Dans la même foulée, le commissaire européen au Développement Andris Piebalgs, indiquera que l’Union européenne a déjà débloqué le quart des engagements pris à la conférence de Bruxelles à notre pays. Les travaux d’infrastructures financés par l’UE, particulièrement la route Niono-Tombouctou, reprendront bientôt. « Pour soutenir le développement de la région, l’UE à travers le 11ème Fonds de développement (FED) fournira 5 milliards d’euros à six pays de la région dont le nôtre n.
Le président de la Banque africaine de développement, Donald Kaberuka a quant à lui rappelé les initiatives de son institution en faveur de l’alimentation en eau potable et de l’assainissement en milieu rural ainsi que de la Facilité africaine de l’eau. Depuis 2003, la BAD a fourni l’accès à l’eau potable à près de 6 millions de personnes au Burkina Faso, au Tchad, au Mali et au Niger, sans compter les autres pays du Sahel. Dans le domaine agricole, la BAD a mobilisé durant la dernière décennie un financement global d’environ 675 millions d’Unités de Compte (plus de 1 milliard de dollars) dans plusieurs projets et programmes au Sahel. En outre, pour faire face à la crise alimentaire qu’avait connue la région, la BAD a mobilisé des aides d’urgence pour faire face à certaines situations critiques au Tchad, au Sénégal, en Gambie, en Mauritanie et au Mali, pour un montant cumulé de 4,7 millions de dollars.
Au Mali, la BAD possède un portefeuille actif de plus de 100 milliards de francs CFA. Lors de la conférence de Bruxelles, elle s’est engagée pour un montant de 240 millions d’euros pour la période 2013-2014. Donald Kaberuka a assuré l’engagement de son institution à soutenir tous les projets de développement de notre pays.
En concluant cette rencontre avec les hommes de médias, Ban Ki-moon indiquera que les défis posés dans le Sahel dépassent les frontières nationales, et il doit en être de même des solutions proposées. « Le cycle des crises peut et doit être brisé. En collaborant et en investissant dans la gouvernance, la sécurité, la résilience et la multiplication des occasions de développement pour les femmes et les jeunes, nous pouvons aider le Sahel à assurer sa viabilité à long terme. La gestion de crise demeure cruciale dans la région, mais nous devons également nous attaquer aux problèmes qui sont à la source des conflits et de l’instabilité », a déclaré le secrétaire général des Nations Unies en rendant un hommage mérité à nos confrères de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon lâchement tués à Kidal.
Source: Essor