Dans un contexte national de transition politique et de profondes mutations institutionnelles, le Bureau du Vérificateur Général (BVG) a publié un rapport accablant sur la gestion administrative et financière de la Primature du Mali entre 2021 et 2024. Ce contrôle, mené dans un cadre de transparence réclamée par les citoyens, met en lumière de nombreuses irrégularités, révélatrices d’un besoin urgent de réformes structurelles dans la gouvernance des plus hautes instances de l’État.
Un audit déclenché dans un contexte critique
Bamada.net-À l’origine de cette vérification : une saisine formelle et une volonté de renforcer la redevabilité dans l’exécution des finances publiques. Le Vérificateur Général s’est appuyé sur la Loi n°2021-069 du 23 décembre 2021 pour entamer un audit de la Direction Administrative et Financière (DAF) de la Primature. Celle-ci, avec un budget cumulé de plus de 50,8 milliards de FCFA pour la période auditée, se retrouve aujourd’hui au centre d’une tourmente administrative et judiciaire.
Dysfonctionnements administratifs : une série d’omissions graves
Le rapport révèle que le comptable-matières de la Primature n’a pas procédé à la codification obligatoire des biens mobiliers et immobiliers, en violation flagrante du décret n°2019-0119/P-RM. Une telle omission complique le suivi patrimonial de l’État et ouvre la voie à de possibles détournements.
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Autre fait marquant : la passation par entente directe d’une convention de maîtrise d’ouvrage déléguée à l’AGETIER-MALI sans respecter les conditions d’urgence prévues par la réglementation. Les justifications avancées, notamment la précarité des populations, ne sont pas juridiquement recevables pour court-circuiter les appels d’offres.
Pire encore, des ambulances acquises pour des centres de santé n’ont jamais été immatriculées au nom des services bénéficiaires, mais restent enregistrées sous le nom de l’AGETIER-MALI, faisant craindre des malversations futures.
Irrégularités financières : plus de 2 milliards de FCFA concernés
L’aspect le plus préoccupant du rapport réside dans les irrégularités financières massives, estimées à 2,06 milliards de FCFA, dont plus de 1,73 milliard demeurent non justifiés. Parmi ces irrégularités, des dépenses qualifiées de « non éligibles » sur le filet social — censé soutenir les couches vulnérables — ont été utilisées pour acheter du carburant, désinfecter les bureaux ou financer des formations universitaires.
Le Premier ministre lui-même a été destinataire de dépenses de souveraineté jugées irrégulières pour un montant de 803 millions de FCFA, payées sans la base réglementaire adéquate.
Le rapport note également la reconduction illégale de marchés publics de gardiennage sans mise en concurrence, pour un total de 126 millions de FCFA, ainsi que le non-recouvrement de pénalités de retard sur des marchés publics, entraînant une perte sèche pour l’État.
Une chaîne de responsabilités étendue
La responsabilité des irrégularités financières et administratives incombe à plusieurs échelons de la hiérarchie, du Directeur Administratif et Financier de la Primature jusqu’à certains prestataires privés, notamment deux entreprises ayant obtenu des marchés sur la base de fausses références.
Parmi ces cas, l’entreprise Medical General Systems a présenté une expérience falsifiée pour obtenir un marché de 347 millions de FCFA, tandis que DACO Immobilière SARL a produit un contrat incohérent pour empocher 97 millions de FCFA. Le tout, avec la complicité ou la négligence de la Commission d’analyse des offres.
Denonciations judiciaires en cascade
Face à la gravité des constats, le Vérificateur Général a transmis les faits au Président de la Section des Comptes de la Cour Suprême et au Procureur du Pôle national économique et financier. Les montants dénoncés à ces autorités dépassent 1,7 milliard de FCFA, couvrant huit (8) catégories de manquements, allant de la non-justification de missions à la réception de travaux inachevés.
Un appel à la réforme urgente
La conclusion du BVG est sans équivoque : le manque de cadre clair sur les dépenses de souveraineté, l’inefficacité du contrôle interne, et l’opacité dans l’utilisation du filet social constituent des failles systémiques majeures. Dans un Mali confronté à des défis sécuritaires, économiques et sociaux immenses, l’exemplarité au sommet de l’État doit être une priorité.
Le rapport invite le Gouvernement à revoir les textes encadrant les dépenses spéciales, à renforcer les dispositifs de contrôle, et à instaurer un encadrement rigoureux du filet social, afin qu’il bénéficie réellement aux citoyens les plus fragiles.
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MLS
Source: Bamada.net