Avec une situation économique toujours précaire, la Cité des Askia attend avec espoir le Programme du développement accéléré
Les assises nationales sur le Nord qui s’ouvrent ce matin dans la capitale pourraient faire vite renaître l’espoir chez les populations du Nord qui se remettent progressivement de la domination des terroristes et d’autres groupes armés ayant semé la terreur et le désarroi pendant plus de 9 mois. Il faut rappeler qu’à Gao comme à Tombouctou et dans d’autres villes du Septentrion, les envahisseurs ont tué et commis de nombreuses exactions sur les populations civiles. Ils ont aussi porté un coup sévère aux activités économiques et commerciales de la région en s’attaquant aux banques, aux hôtels et aux magasins des commerçants.
Deux mois après la reprise de la ville de Gao des mains des terroristes et leurs complices, L’Essor avait fait une enquête sur la situation économique de la ville, situation qui était à l’époque très précaire, voire franchement déplorable. En effet, l’importation des marchandises était devenue sous l’occupation un véritable casse-tête pour les commerçants à cause de l’insécurité qui régnait dans les différents corridors. Par ailleurs, le déplacement massif des populations vers les villes du sud et en dehors du pays avait également contribué à affaiblir considérablement le tissu économique dans la cité des Askia.
Malgré le départ des Jihadistes, le commerce à Gao avait toujours du plomb dans l’aile à cause des difficultés liées à l’importation des marchandises et à l’absence d’établissements bancaires et financiers. Au grand marché de Gao, l’affluence était morose. Cette situation avait été aggravée par l’incendie d’une partie de cette structure lors d’un affrontement à l’arme lourde entre nos militaires et des terroristes infiltrés dans la ville. Dans les boutiques où nous nous étions rendus, les produits alimentaires (sucre, riz, lait, huile, farine et boites de conserve) étaient revendus très cher. Par exemple, le sac du riz était cédé à 19 000 Fcfa pour un prix initial de 18 000 Fcfa. Le sac de sucre coûtait 25 000 Fcfa, le bidon d’huile 16 500 Fcfa et le carton de lait 24 000 Fcfa. Avec la fermeture de la route de l’Algérie, ces denrées alimentaires amenées de Bamako et du Niger, dans des conditions extrêmement difficiles, avaient fait flamber les prix à la consommation.
Comme les banques avaient été toutes pillées et saccagées par les islamistes armés et les rebelles du MNLA, des commerçants et des compagnies de transport à Gao essayaient de combler le vide en matière de transfert d’argent. Le secteur hôtelier était également à plat. En dehors du motel Askia, tous les autres établissements étaient toujours fermés après avoir été saccagés par les envahisseurs. C’est le cas de l’hôtel Tizimizi et ses annexes dont le propriétaire est le maire de la ville, Sadou Harouna Diallo.
Aujourd’hui, les choses ont beaucoup évolué à Gao. Les banques qui opèrent dans la ville sont de retour ou alors ont amorcé ce processus. Les agences BNDA et BMS sont tout à fait opérationnelles à nouveau. Tandis que les agences BIM S.A., BDM S.A., Bank of Africa et Bank Atlantic sont entrain d’être rénovées avant de s’ouvrir au public. C’est du côté du secteur hôtelier qu’il y a eu un vrai bond qualitatif. En plus du Motel Askia, l’hôtel Bon Séjour et l’hôtel Tizimizi et ses annexes ont fait peau neuve pour accueillir les éléments de la MINUSMA.
Mais Gao reste toujours confrontée au problème de l’électricité. Depuis le départ des groupes armés, la ville ne reçoit le courant qu’entre 18 heures et 5 heures du matin. Ainsi, les activités économiques liées à l’électricité ont pris un coup sévère. Personne cependant ne peut encore dire quand interviendra un retour définitif et total à la normale.
LE SPECTRE DE L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE – Du côté des produits alimentaires, les prix n’ont pas connu assez d’amélioration. Si le sac de riz de 50 kg qui est revenu au prix initial de 18 000 Fcfa, une légère hausse est maintenue sur les prix de la viande, du lait, de l’huile et du sucre. En outre, avec la mauvaise saison de pluies à Gao, il ne faut pas s’attendre à une bonne récolte de riz paddy, de sorgho et de haricot. Toutes choses qui font planer le spectre de l’insécurité alimentaire dans la région.
Au-delà de l’aspect réconciliation et décentralisation, les assises nationales sur le Nord devront tracer un Programme de développement accéléré des régions du Septentrion. Ce programme est très attendu pour prendre en compte certains urgences en matière de sécurité et d’ infrastructures de base. Tel est aussi le point de vue d’un habitant de Gao que nous avons contacté par téléphone. Selon lui, ces assises doivent trouver une solution définitive à l’insécurité dans le Nord par le renforcement des infrastructures militaires et des structures administratives comme la justice. Elles doivent aussi résoudre le problème de la sécurité alimentaire, des services de base (santé, éducation, eau et électricité) et surtout de l’emploi des jeunes. Notre habitant de Gao a beaucoup insisté sur ce dernier aspect en allusion aux récents événements qui avaient vu de jeunes désœuvrés décider de rejoindre les groupes armés contre espèces sonnantes et trébuchantes.
M. KEITA
ESSOR