Plus d’un malien sont aujourd’hui sceptiques quant à la tenue prochaine des élections présidentielles. Bien que cette attitude ne soit conforme à l’apparence que nos dirigeants véhiculent pour nous faire croire que ces consultations se tiendront, ne pas émettre l’hypothèse contraire relèvera simplement de la myopie politique si nous analysons les faits disponibles.
Les agitations courantes et récentes de notre Etat prouvent encore une fois à suffisance, que les animateurs de la vie politique malienne, dans leur grande majorité, n’agissent que pour la sauvegarde de leurs perfides intérêts et ne compatissent en rien aux souffrances et peines énormes des populations.
Qu’elles sont les principales motivations d’un Président, d’un Etat et de presque tous les responsables politiques à :
1-Organiser le retour en grande pompe d’un ancien président exilé, seulement à quelques mois de la fin du mandat du président actuel, pendant qu’il menaçait l’exilé de poursuites judiciaires pour haute trahison ?
2-Proceder à un remaniement ministériel à moins de 06 moins d’une élection présidentielle ? (Il parait qu’il en reste encore un avant la clôture de cette mandature)
3-Voire quasiment toute la classe politique réclamer vaille que vaille des consultations souveraines pendant qu’il y a seulement quelques mois, elle montait, en grande partie, au créneau pour réfuter une autre consultation souveraine (referendum constitutionnel) pour des raisons d’insécurité qui ne se sont point améliorées de nos jours, au contraire aggravées ?
4- diligenter des stratégies de sécurisation du centre et du nord du Mali, seulement maintenant, comme si les affres de l’insécurité sur les populations ne sont que nouvelles ?
Je n’ai trouvé à mon modeste niveau qu’une seule et unique réponse : La classe politique malienne, dans son écrasante majorité, n’a toujours été que dans une logique de complot éternel contre le peuple souverain du Mali pour l’unique satisfaction de ses intérêts partisans et claniques.
Nos politiques s’activeront afin que ces élections se tiennent, qu’elles soient transparentes, crédibles, apaisées ou pas. Ils ne songent apparemment point, aux conséquences de résultats tronqués par le pouvoir en place, ou à l’impossibilité de tous les citoyens à y prendre part, sachant simplement que quel que soit Alpha, ils trouveront toujours un consensus pour le partage du pouvoir.
Par quoi nos politiques étancheront enfin la soif véritable du changement des Maliens ?
Qu’elle alternative l’histoire nous donne alors ?
En cas de non tenue de la prochaine présidentielle, pour n’importe quelle raison que ce soit, serions-nous (forces vives de la nation) préparés à ne pas rater cette fois l’opportunité de refonder l’Etat et la société malienne ?
Sommes-nous dans le secret de Dieu, pour savoir si nos dirigeants sont en réalité dans l’hypocrisie pure et simple en procédant à du boucan pendant qu’ils préparent ingénieusement une transition ?
Devrions-nous, nous laisser surprendre ? Voilà notre modeste analyse sur la question.
Contexte :
Devant la situation sécuritaire dramatique et le délitement des institutions de notre pays il y a de quoi frémir. Face au déni des réalités, pourtant évidentes, d’un régime qui nous a démontré ses limites pour n’avoir pas pris la mesure exacte des périls, nous, forces politiques et société civile, avons-nous le droit d’accepter qu’on conduise le pays dans le chaos avec tout ce que cela comporte d’aventures ?
Juillet-Août 2018 c’est demain. Le contrôle citoyen n’est efficace que si les citoyens remplissent d’abord leurs devoirs avant de demander des comptes aux élus. Le contexte de crise politique et sécuritaire global que nous traversons, combiné à l’exercice de la souveraineté de notre Etat sur moins de 40% de notre territoire, constituent sans nul doute des facteurs défavorables à la tenue d’élections acceptables et apaisées. Il urge donc, que les citoyens s’assument à travers l’intelligence collective pour la gestion judicieuse d’une impasse institutionnelle prévisible en 2018 qui ne nous mettra que devant deux scénarios possibles : Une Transition consensuelle ou une Transition imposée.
I-Que faire ?
Tout pouvoir démocratique émane du peuple. Toute légitimité découle de la satisfaction des besoins du peuple et de l’acceptation par les citoyens des actes posés par leurs dirigeants. Le peuple est au départ et à la fin de toute légitimité démocratique. Une des exigences de sortie de crise à laquelle notre pays est confronté demeure encore la réappropriation de nos difficultés par nous-même. Il nous faut alors faire recours au peuple souverain par des assises nationales. De notre point de vue, c’est à ce prix que nous prendrons la mesure de nos responsabilités pour une Transition consensuelle qui nous redonnera l’opportunité de refonder l’Etat malien et à tourner éventuellement la page de la 3ème République vers la 4ème.
L’idéal dans le cas précis du Mali de 2018 serait que celui qui détient la légalité constitutionnelle ait la sagesse et le courage politiques de tirer les leçons de la crise multidimensionnelle qu’il gère depuis 4 ans. A défaut de pouvoir organiser les élections générales en 2018, de prendre l’initiative d’organiser ses assises nationales souveraines afin d’éviter l’impasse institutionnelle (un pays sans président et parlement élus), pour concevoir et mettre en œuvre une transition consensuelle. Les décisions des assises et des actes qui en découleront auront l’avantage du sceau de la souveraineté populaire. Cependant, la condition même de la possibilité de tenir de telles assises et de parvenir à un consensus national est que le président accepte de ne pas diriger le pays au-delà du 04 septembre 2018. Une telle décision clairvoyante pourra permettre la constitution, sous son autorité, d’un gouvernement d’union nationale d’ici la fin de son mandat, qui affrontera les difficultés actuelles du pays dans un élan de mobilisation générale.
Après IBK, il reviendra alors à l’opposition politique de sortir de la logique de conquête du pouvoir en contribuant au rassemblement de toutes les forces pour sauver d’abord la patrie. Pour le moment, c’est la majorité au pouvoir qui n’a pas été à hauteur de souhait en la matière. Si les acteurs politiques s’entendent sur des bases claires pour le sauvetage du pays et la bonne gouvernance pour satisfaire les aspirations fondamentales du peuple, la société civile (dans toutes ses composantes) ne fera qu’apporter sa contribution grâce aux immenses compétences dont elle regorge. Nous aurions alors fait œuvre utile pour avoir réussi une transition démocratique qui ne sera contre personne mais plutôt pour tout le monde du moment où les craintes et angoisses des uns et des autres seront dissipées. La paix sociale viendra de là.
La Transition s’imposera si les Maliens n’arrivent pas à maitriser le cours de leur histoire. Dieu seul sait quelles seront les conséquences d’une telle aventure. Mais on n’a pas besoin d’être devin pour savoir qu’en cas de soulèvement populaire ou putsch militaire que :
- a) La vie de la majorité des animateurs de la classe politique actuelle sera mise en danger ;
- b) Comme l’occupation du Nord en 2012, un tel chaos accéléra la partition du pays ;
- c) Cela entrainera une grande régression de notre développement.
II-Comment faire ?
Le pouvoir d’Etat tient sa légalité du mandat du peuple souverain. Il justifie sa légitimité par l’exécution des missions à lui confiées par ledit peuple.
Gouverner c’est prévoir, mais prévoir ne suffit pas. Il faut anticiper en posant des actes qui engagent l’avenir. Les actes d’anticipation sont d’autant plus nécessaires que « l’existence ne déroule pas un disque donné d’abord. C’est avec la substance de ce qui a été vécu que nous devons pétrir par l’effort et l’Espérance, la substance de ce qui n’a pas encore été vécu ».
Face à l’impasse politique actuelle et à celle institutionnelle prévisible en 2018 avec la perspective d’impossibilité de tenir des élections présidentielles crédibles, deux hautes personnalités ont pris position ces derniers mois :
– Mr Ousmane SY a posé la question du que faire en cas d’impossibilité de tenir les élections en 2018, en faisant intelligemment appel à la vigilance et à la créativité du peuple.
– Le doyen Seydou Badian Kouyaté, quant à lui, propose une transition sans aborder les moyens et les conditions.
Il est, à présent, impérieusement nécessaire et urgent d’identifier les moyens et les conditions d’une transition consensuelle et démocratique, la seule voie qui permettra aux Maliens de maîtriser le cours de leur histoire. Pour ce faire il faut :
- Définir le CADRE Conceptuel de la nouvelle transition consensuelle et démocratique.
Le cadre conceptuel de la recherche d’un tel compromis historique relève de la compétence des forces vives du pays. Mais nous pensons que certains domaines-clés doivent servir de garde-fous afin d’éviter des discussions stériles. Il s’agit, entre autres :
- de l’élaboration d’une VISION de sortie de crise d’un pays qui assume sa souveraineté, donc comportant :
- Un volet politique ne sous-traitant pas sa défense et sa sécurité,
- Une dimension culturelle et politique libérant de la culture de mendicité, de corruption et d’impunité à travers un auto-ajustement de mobilisation et d’utilisation des ressources nationales dans le cadre de Plans et Projets de développement autocentré ;
- d’une option stratégique consistant à toujours soumettre nos rapports avec l’extérieur aux exigences de notre développement.
- Identifier ses OBJECTIFS :
- Eviter une rupture du processus démocratique par la rue et/ou l’armée,
- Rétablir la Paix et la Sécurité sur l’ensemble du territoire national,
- Rétablir la confiance entre les acteurs d’une part, l’autorité de l’Etat par la justice et plus d’équité d’autre part,
- Booster la croissance économique et le développement humain.
- Cerner, clarifier et préciser ses conditions de réussite :
- qu’IBK renonce à diriger la transition,
- que Majorité et Opposition sortent de la logique de conservation et /ou de conquête du pouvoir pour s’atteler d’abord au sauvetage de la patrie,
- Que la classe politique et la société civile s’entendent sur les bases d’une gouvernance à hauteur des enjeux et défis de la crise multidimensionnelle que traverse notre pays
De tout ce qui précède, nous pensons nécessaire la mise en place urgente d’un Cadre de Réflexion et d’Actions pour une Transition Démocratique au Mali en 2018 (CRAM-T18) si nous ne voulons nous laisser surprendre par ceux qui ont toujours sous-estimés nos intelligences
Fabou KANTE
Président du Mouvement Tabalé
66 78 67 10/ 76 0741 07
fabou_kante@yahoo.fr
mouvement.tabalé@gmail.com