C’est un domaine qui nécessite une grande spécialisation pour ne pas compromettre la vie des hommes. Au Mali, la situation est craintive puisque nous assistons à une prolifération des pharmacies « par terre », à travers les venderesses de médicaments dans la rue ou au bord des voies publiques. Cette pratique reste assez problématique. Faut-il y mettre fin sachant bien que des milliers de familles se nourrissent à travers elle ? Cette question est difficile à répondre.
La prolifération des pharmacies dites « par terre » s’explique par le coût des médicaments qui restent moins cher que dans les officines. En effet, au lieu d’aller acheter une plaquette de paracétamol à 600 FCFA à la pharmacie spécialisée, les gens préfèrent l’acheter à 100FCFA au bout de la rue. En plus, ce sont des points de vente où il n’y a pas trop d’exigence en ce qui concerne la vérification du besoin réel du patient, comme c’est le cas dans la plupart des pharmacies sérieuses où l’auteur de l’ordonnance est vérifié, avant délivrance des médicaments. À côté de cela, les pharmacies par terre ne se renseignent ni sur le poids ni la taille encore moins l’âge du patient. Elles se contentent de leur seule loi du marché : le donner et le recevoir. Ici, on n’a pas besoin d’étudier pour être pharmacien.
Il convient de comprendre que ces espaces sont impropres à la santé des citoyens, puisqu’elles sont gérées dans la plupart des cas par des femmes illettrées à la quête de leur pain quotidien. Ainsi, beaucoup d’entre elles ignorent les effets que peuvent avoir les produits qu’elles vendent. C’est la raison pour laquelle, ces pharmacies de la rue sont remplies de produits dangereux pour la santé des populations.
Des produits n’ayant d’ailleurs pas de noms appropriés : samprin (la foudre), bana chéguin (huit maladies), tanko (tramadol), nèkesoni (le petit vélo), lokotiela (le fendeur de bois). Ces médicaments sont les plus sollicités par les gros travailleurs et les apprentis de Sotrama. Or, ils ne sont pas sans effets sur l’état de santé des consommateurs.
Certains d’entre eux constituent d’ailleurs des drogues. Ces médicaments peuvent même d’ailleurs rendre certains consommateurs fous. Par conséquent, il revient à l’État de trouver une solution à la vente de ces produits.
La gestion de ces points de vente reste assez problématique. Se prononcer pour une lutte contre ces pharmacies, c’est se prononcer pour la mise en chômage de milliers de citoyens et surtout de citoyennes qui gagnent leur vie à travers cette activité.
Or, rester indifférent face à cette pratique, c’est également accepter de laisser mourir toute une population. Cette pratique faisant partie des phénomènes encourageant la consommation de la drogue.
Par ailleurs, la question de la lutte contre ces pharmacies par terre engendre une divergence de points de vue. Ainsi, certains trouvent impossible de lutter contre les DCI parce qu’elles sont moins chères. Tel est le cas chez Blaise Dakono, philosophe malien : « Il n’est pas facile de lutter contre la pharmacie par terre car les médicaments sont chers dans la pharmacie et puis les médicaments vendus par ces femmes guérissent aussi à prix très bas. »
Nous constatons à travers ce passage, une défense de la cause de ces femmes qui gèrent leur propre entreprise à travers ces pharmacies par terre.
Par contre, il faut reconnaitre que, malgré tout, d’autres soutiennent la lutte contre cette pratique. C’est le cas de Fatouma Harber Touré, blogueuse et activiste malienne. Elle trouve que les venderesses de médicament par terre n’ont aucune compétence : « Elles donnent des médicaments sans qualification. En plus, les médicaments qu’elles vendent sont mal conservés. »
En lieu et place de la vente de ces produits toxiques à la population, la blogueuse malienne soutient l’accompagnement de ces femmes pour qu’elles s’intéressent à d’autres domaines d’activités. Pour ce faire, elle soutient « la sensibilisation sur les méfaits de ces pharmacies par terre. Ensuite, la prise en charge de la reconversion professionnelle de ces femmes. » En fin de compte, il convient de comprendre que rien ne vaut la santé.
À cet effet, aucun motif ne peut justifier le fait de laisser des pratiques qui peuvent gravement nuire à l’état de santé d’une population. Il revient au gouvernement d’interdire cette pratique pour la conservation de la santé de toute la population et aussi dans le cadre d’une lutte sans merci contre les drogues. La lutte contre les pharmacies par terre est une lutte noble et salutaire.
Fousseni TOGOLA
Source: Le Pays