L’image de la République française a été plus que jamais ternie dans la capitale malienne suite à l’attentat qui a récemment visé le journal satirique Charlie-Hebdo. C’est du moins les résultats auxquels est parvenu l’institut de sondage Gisse (Groupement d’intérêt scientifique des statisticiens économistes).
Cette étude, réalisée sous la direction de Sidiki Guindo, Statisticien économiste et Directeur de l’Institut, s’est déroulée du 30 janvier au 01 février 2015 dans le district de Bamako et a concerné 1100 personnes âgées de 18 ans et plus. Elle traite de l‘opinion des Bamakois sur l’affaire Charlie-Hebdo et l’image de la France auprès de la population. Ainsi, ce sondage révèle que les personnes sondées, dans leur écrasante majorité, soit 93%, condamnent les caricatures du Prophète Mahomet (PSL). Environ 3.1% trouvent que la liberté d’expression devrait permettre de caricaturer même le Prophète (PSL), alors que 3.6% n’ont pu donner de réponse à la question. Au sujet de l’attentat qui a visé Charlie hebdo, 42,6% des sondés condamnent cet acte.
Par ailleurs, il ressort de ces résultats qu’auprès de la population bamakoise, la Chine et les États-Unis ont aujourd’hui une meilleure image que la France. En effet, invités à donner leur avis sur les grandes puissances, notamment les Etats-Unis, la France et la Chine, les sondés, à 86%, se prononcent en faveur de la République populaire de Chine, contre seulement 11.3% d’opinion défavorable. Concernant les Etats-Unis d’Amérique, ils sont 68.4% à avoir une opinion favorable, alors que 27.1% garde une mauvaise image du pays de l’oncle Sam. La France de François Hollande se retrouve au bas de l’échelle avec seulement 38% d’avis favorable. Elle est rejetée par 60.5% des sondés.
Selon les résultats, l‘analyse par sexe et par niveau de formation montre que la proportion d’hommes ayant une opinion défavorable de la France est de 65.9% contre 54.1% pour les femmes. Concernant le niveau de formation, 60.3% des intellectuels (de niveau supérieur au bac) ont un avis défavorable de la France ; cette statistique est de 60.6% au niveau de ceux qui ont au plus le bac.
De ces résultats, l’Institut Gisse tire un certain nombre de leçons.
En effet, comment comprendre que la France libératrice du Mali soit aujourd’hui moins populaire que la Chine et les États-Unis, sa côté de popularité ayant chuté de plus de 80% à 38% de 2012 à nos jours? Selon le sondeur, le journal Charlie-hebdo devrait avoir la sagesse de rendre la vie moins difficile à la France, aux Français, aux présidents des pays comme le Sénégal, le Mali, le Niger, le Maroc, aux chrétiens et aux musulmans du monde, à leurs gardes du corps et à leurs collègues.
«Si la liberté de caricaturer un personnage peut avoir des effets négatifs sur les grandes entreprises françaises; si elle peut aboutir au meurtre d’un innocent français ou non, si elle salit l’image de la France auprès d’un milliard de musulmans; si elle aboutit au fait que d’autres pays deviennent nettement plus populaires que la France libératrice du Mali; alors cette liberté doit être considérée autrement», note-t-il.
Aussi, le fait de reprendre les caricatures facilite-t-il, estime l’Institut, le travail aux terroristes en ce qu’il met les musulmans, ceux de la France y compris, dans une situation ambigüe, alors qu’on ne peut aujourd’hui lutter efficacement contre le terrorisme sans associer pleinement la population musulmane.
C’est pourquoi, en fonction des intérêts géostratégiques du moment, le Gisse conseille à la France d’appeler au sens de la responsabilité de tous dans cette affaire.
Bakary SOGODOGO
source : Le Prétoire