Sans surprise, pour les observateurs avertis, le jeune directeur général de la Société Énergie du Mali (EDM-Sa), Dramane COULIBALY, a été relevé, hier mercredi, et aussitôt remplacé par l’ancien ministre délégué auprès du ministre de l’Économie et des Finances, chargé du Budget, dans le dernier gouvernement de CISSE Mariam Kaïdama SIDIBE, sous le Président ATT.
Si les raisons officielles du limogeage de celui qui s’est fait remarquer par les enlèvements des compteurs des Institutions et grands services publics, pour non-paiement d’arriérés de factures, ne sont évoquées, selon certaines indiscrétions, il serait lié à la situation difficile, caractérisée par une crise financière ; l’accumulation des dettes aux fournisseurs ; les contrats de location d’énergie hors prix ; le défaut de paiement des factures d’enlèvement d’énergie avec les pays voisins ; etc. Sans oublier que 2018 sera marquée par d’importants évènements, dont l’organisation de l’élection présidentielle, l’observation du mois de ramadan et la 21e édition de la Coupe du monde de football, en Russie.
Selon les mêmes sources, pour une gestion à hauteur de souhait de la distribution d’électricité durant cette année, le Gouvernement, à travers le ministère de l’Énergie et de l’eau, a instruit au DG d’EDM SA d’élaborer une feuille de route pour une stratégie de stabilisation énergétique, comportant la reconstitution du parc propre de la société EDM SA ; l’achat à bas coût d’énergie avec les pays voisins ; et l’abandon de la location de puissance. Ce qui n’a pas semblé du goût du jeune DG.
En effet, apprend-on, malgré les mises en garde du Département, et la dénonciation de cette situation par les institutions internationales, notamment la Banque mondiale qui appuie le secteur de l’énergie, le nouveau Directeur a reconduit, contre toute attente, les contrats de location, avec les sociétés AGGREKO, AKSA et SES.
Le jeune DG qui était à son arrivée foncièrement opposé à la pratique de la location des groupes aurait révisé sa position après qu’il a bénéficié d’avantages matériels de la part d’une de ces trois sociétés.
Pour EDM SA par contre, c’est la descente aux enfers puisqu’elle doit aux sociétés locatrices la rondelette somme de 14 milliards de FCFA.
En ce qui concerne l’achat d’énergie avec les pays voisins, notamment la Côte d’Ivoire, le Sénégal et la Mauritanie, apprend-on, le ministère de l’Énergie et de l’eau a entrepris des négociations avec ces pays limitrophes pour le transfert d’énergie par des câbles haute tension. C’est ainsi que la SENELEC (Sénégal) s’est dite disposée à fournir 20 MW, la SOMELEC (Mauritanie) 20 MW et la CI-Énergie (Côte d’Ivoire), de 45MW à 80 MW. Normalement, la gestion correcte des contrats liés à ces achats doit permettre au Mali de passer l’année 2018 sans aucun problème de délestage et même constituera une bouffée d’oxygène pour les finances d’EDM SA. La raison est que l’énergie achetée ainsi coûte 2 fois moins cher que celle de la location et qu’elle est suffisante (85 à 115 MW) pour suppléer l’énergie louée.
Par ailleurs, indique-t-on, la feuille de route du Gouvernement recommandait au DG d’EDM SA de gérer ces contrats dans le souci du respect des relations avec ces pays, et en préservant l’honneur du Mali qui ne peut pas, ne doit pas se trouver en position de cessation de paiement vis-à-vis de pays frères.
Aussi, le désormais ex-DG a autorisé à utiliser prioritairement la subvention de l’État, soit 51 milliards au titre de l’année 2018 au règlement des factures afférant à ces transferts. Ainsi, à la date du 28 février, le Mali doit au titre de ce transfert d’énergie près de 9 milliards à la Côte d’Ivoire, au Sénégal et à la Mauritanie. D’ailleurs, depuis début janvier, la Mauritanie a arrêté la fourniture d’électricité, à l’insu du Département auquel il aurait soigneusement dissimulé l’information. L’on apprend que c’est au cours d’une escale à Paris que le ministre de l’Énergie en a été informé, pour ensuite appeler son homologue mauritanien de l’énergie et aboutir au rétablissement de la fourniture jusqu’en fin mars, conciliabule assorti du paiement intégral des arriérés.
Certainement c’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Et voilà, depuis hier mercredi, il a été remplacé par Sambou WAGUE qui n’est pas un inconnu au Mali.
Sambou WAGUE a été ministre délégué auprès du ministre de l’Économie et des Finances, chargé du Budget, dans le gouvernement de CISSE Mariam Kaïdama SIDIBE. Il est diplômé de l’École nationale d’Administration de Bamako, option Economie-Finance. Il se spécialisera à l’Université de Paris IX Dauphine et à l’Institut international d’administration publique de Paris.
De retour au Mali, M. WAGUE a occupé successivement les postes de Chef de division études et contrôle du trésor, Receveur général du District de Bamako, Directeur national du Trésor, Directeur de la Coopération internationale.
M. WAGUE a été par ailleurs membre de la Commission bancaire de l’UEMOA et du groupe d’experts sur la réforme institutionnelle de l’UEMOA et de la BCEAO.
Par Sékou CAMARA
Info-matin