Interdiction des manifestations publiques, suspension des cours, et même annulation de quasiment toutes les festivités de l’Indépendance… Le président sénégalais Macky Sall a annoncé samedi une série de mesures fortes face à la progression du nouveau coronavirus.
Selon le dernier bilan communiqué, 19 personnes ont été déclarées infectées au Sénégal depuis le 2 mars, dont deux sont guéries. Aucun décès n’a été rapporté. Mais la récente propagation du mal, en particulier dans la ville religieuse de Touba, et l’approche de grands festivals musulmans ont créé une urgence.
M. Sall, soumis à la pression d’intérêts religieux et sanitaires contraires, a convoqué une réunion d’urgence samedi au palais présidentiel. Dans une intervention retransmise ensuite en direct par la télévision nationale, il a spécifiquement invoqué l’apparition d’un « foyer de transmission communautaire », dans une apparente référence à Touba, avant de détailler les mesures.
« Toutes les manifestations publiques sur l’ensemble du territoire national » sont interdites pendant 30 jours; les cours sont suspendus dans les écoles et les universités pour trois semaines à partir de lundi; les formalités liées aux pèlerinages vers les lieux saints de l’islam et du christianisme sont suspendues; les escales des bateaux de croisière sont temporairement supprimées, et les contrôles sanitaires à toutes les frontières seront systématiquement renforcés.
A ces mesures, M. Sall en ajouté une représentative de la gravité de l’heure: l’annulation de toutes les célébrations de l’Indépendance dans tout le pays le 4 avril, en dehors d’une prise d’armes qu’il dirigera au palais présidentiel.
Il a donné pour consigne à son gouvernement, au-delà d’un plan d’urgence déjà adopté, de finaliser un « plan de contingence » qui prévoira le déploiement d’hôpitaux mobiles par l’armée et l’acquisition de moyens de réanimation et de protection individuelle.
Inquiétudes sur les systèmes sanitaires
L’Afrique subsaharienne a jusqu’à présent été nettement moins touchée que le reste de la planète par la pandémie, qui a fait plus de 5.700 morts dans le monde et atteint plus de 151.000 personnes depuis son apparition en décembre selon un décompte de l’AFP.
La propagation éventuelle du virus y suscite de vives préoccupations quant à la faculté des systèmes sanitaires locaux à faire face.
Le Sénégal, pays pauvre de 16 millions d’habitants et un des premiers où le nouveau coronavirus ait fait son apparition en Afrique subsaharienne, a rapidement pris des dispositions pour la détection, la prévention et l’information du public, en collaboration avec les organisations internationales.
Tout en restant loin des chiffres asiatiques ou européens, l’augmentation du nombre des contaminations cette semaine a causé l’inquiétude, surtout quand il s’est avéré que, sur les 19 personnes infectées depuis le 2 mars, 17 étaient liées à Touba.
Or cette ville religieuse musulmane et deuxième agglomération du pays est censée accueillir le 22 mars son deuxième plus grand événement de l’année, parmi d’autres festivals programmés ce mois-ci.
Appel aux khalifes
Devant le risque sanitaire, les appels se sont multipliés à une interdiction de ces rassemblements qui peuvent drainer des centaines de milliers de fidèles.
Près de 95% de la population sénégalaise est musulmane.
Aucune annulation n’a été annoncée jusqu’alors par les khalifes qui dirigent les confréries musulmanes, au rôle social primordial. L’un des plus éminents d’entre eux a cependant signifié qu’il fallait s’en remettre à la décision du président.
Ce dernier a lancé samedi un « appel solennel à tous nos guides religieux à accompagner le gouvernement » dans la mise en oeuvre des mesures prises.
Avant même les mesures annoncées par le président, l’Eglise catholique au Sénégal a annoncé dans un communiqué supprimer ou reporter tous les grands rassemblements de fidèles, « jusqu’à une date plus favorable ».
La part des chrétiens, majoritairement catholiques, est chiffrée à environ 5% de la population.
Source : lalibre.be