Le grand laboratoire a décidé de modifier ses règles de fourniture de médicaments, menaçant l’approvisionnement de notre pays en diverses spécialités parmi lesquelles le vaccin contre la méningite
Un vent d’incompréhension souffle sur les officines pharmaceutiques de la capitale depuis deux ou trois mois. En cause, le laboratoire GlaxoSmithKline (GSK) qui approvisionne notre pays en médicaments a décidé de changer son mode de fonctionnement. Dans une correspondance en date du 30 septembre dernier adressée à la Direction de la pharmacie et du médicament (DPM), le laboratoire GSK a expliqué que ses médicaments ne seront plus fournis par le biais de son bureau régional d’Afrique de l’ouest et du centre. La lettre ne précise toutefois pas les motivations qui sous-tendent cette initiative. Elle informe simplement que les responsables de GSK sont disponibles pour discuter de la décision et de ses implications avec les autorités sanitaires. En d’autres termes, le laboratoire GSK est dans la posture de traiter directement avec le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique ou des organisations supranationales. Il est bon de rappeler que GSK fournit plus d’une vingtaine de médicaments, y compris le vaccin contre la méningite, à notre pays.
UN MUTISME PREOCCUPANT. Face à cette exigence inattendue, les observateurs attendaient naturellement une réaction du ministère de la Santé et de l’Hygiène publique pour rassurer et prendre les choses en main. Curieusement, les autorités sanitaires observent toujours un mutisme préoccupant sur cette « affaire GSK » alors que les acteurs concernés attendent de savoir les mesures envisagées pour circonscrire d’éventuelles ruptures. Il est difficile de leur donner tort puisque certaines sources pharmaceutiques confirment même une rupture de vaccins fournis par GSK contre la méningite.
Le directeur général de la DPM, le Dr Yaya Coulibaly, tente d’apaiser. Pour lui, la rupture de vaccin contre la méningite n’est pas liée à la décision de GSK. Il ne donne cependant pas les vraies raisons de cette pénurie. Au niveau des pharmaciens, on persiste et signe. La rupture de vaccin contre la méningite est une triste réalité. Il ressort même des investigations du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens que seule une pharmacie de la place disposerait d’un petit stock de ce vaccin contre la méningite. Une autre source pharmaceutique assure contraire, évoquant même un stock important de vaccins contre cette maladie.
Le sujet est si grave qu’il faut absolument tirer les choses au clair. Notre pays vient de vivre une épidémie de méningite à Ouélessébougou. Il est vrai que celle-ci est maintenant sous contrôle mais on peut imaginer les conséquences d’une rupture de vaccins contre la méningite, spécialement en cette période, sur la santé de nos compatriotes.
Au delà de cette crainte, les professionnels du médicament veulent pouvoir s’approvisionner en médicaments. Le président de l’Ordre des pharmaciens relève qu’il est du devoir de l’ordre d’alerter sur des questions aussi cruciales et d’inciter la tutelle à prendre les mesures nécessaires. Il explique aussi avoir été informé de la décision de GSK au cours d’une rencontre pharmaceutique dans un pays de la sous-région. A son retour au Mali, il a saisi la DPM pour discuter de la question. « Les premiers responsables de la Direction de la pharmacie et du médicament m’ont simplement dit ne pas être courant de la nouvelle exigence de GSK alors que la lettre du fabricant de médicaments était destinée à leur structure », constate le Dr Abdou Touré. Cette réponse ne l’a pas découragé et il a entamé d’autres démarches, notamment en convoquant une réunion des différents acteurs du médicament à laquelle la DPM a brillé par son absence.
UNE DECISION CONFORME AUX REGLES DU COMMERCE INTERNATIONAL. Du côté de la DPM, on préconise de prendre le temps d’analyser froidement la lettre, d’interroger des collègues de la sous-région sur les implications réelles du dossier enfin de donner un avis conséquent à la tutelle. Le Dr Yaya Coulibaly estime que la mesure s’inscrit simplement dans le cadre des bonnes pratiques de distribution. Il note que le Mali est concerné au même titre que d’autres pays africains comme le Niger, le Burkina et le Tchad.
Que faire maintenant ? Le directeur de la pharmacie et du médicament explique que la recommandation a été faite de contacter des avocats pour voir les possibilités d’attaquer la décision de GSK auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le département de tutelle a, dans cet ordre d’idée, saisi, pour avis, le ministre du Commerce et de l’Industrie dans une correspondance en date du 4 février 2016. La réponse du département du Commerce et de l’Industrie est sans équivoque. Pour le ministre Abdel Karim Konaté, la décision du laboratoire GlaxoSmithKline reste conforme aux règles du commerce national et international. Il a suggéré de maintenir les bonnes relations commerciales avec le laboratoire, notamment par l’entremise de la Pharmacie populaire du Mali qui pourrait jouer le rôle de centrale d’achat pour le secteur privé malien.
Pour l’Ordre des pharmaciens, la situation est préoccupante et requiert une mise en synergie des actions. Les pharmaciens estiment que le département met trop de temps à trouver une alternative. « Nous avons convoqué une première réunion où la direction de la pharmacie et du médicament a brillé par son absence. Une commission a été mise en place pour établir la liste des médicaments GSK pouvant être substitués par des génériques et ceux qui ne peuvent l’être. Cet important travail a été accompli et transmis au département de la Santé et de l’Hygiène publique », assure le président du CNOP qui a conscience de la gravité de la situation. A en croire le patron de l’Ordre des pharmaciens, des commandes ont été passées auprès de grossistes de médicaments GSK en Côte d’Ivoire et au Sénégal pour contourner la décision en attendant. Mais ces centrales d’achat ont reçu la consigne de ne pas outrepasser la décision du fabricant de médicament, au risque de s’exposer à des sanctions.
Le Dr Abdou Touré indique que son organisation professionnelle a aussi entrepris des démarches auprès de l’Inter ordre des pharmaciens d’Afrique et l’Ordre des pharmaciens francophones d’Afrique pour plaider la cause de notre pays. Pour l’instant, ces efforts n’ont pas abouti. Au niveau du département de la Santé et de l’Hygiène publique, des alternatives seraient à l’étude. Mais le temps presse, il faut rapidement trouver les solutions appropriées pour ne pas pénaliser les malades dans notre pays.
B. DOUMBIA
LES PRODUITS CONCERNES
Les produits pharmaceutiques concernés par la mesure sont : l’Alben cp 400mg B/1 (S/D) ; Atarax 2MG/ML Sirop 200ML-24M ; Augmentin 500mg’62,5 CP B/16 ; Augmentin pdr sp enf 100mg/12.5mg 60ml ; Augmentin pdr sp Nour 100mg/12.5mg 30ml ; Avamys 27,5 mcg fl /120 doses ; Azantac inj. amp. 2ml B/5 ; Babyhaler chambre inhalation, Betneval crème 30g ; Betneval lotion 15g, Betneval pde 30g ; Clamoxyl 125mg pdre pr sp Fl/12 doses NF ; Clamoxyl 1G dispersible CP B/12 ; Clamoxyl 250mg pdre pr sp Fl/12 doses NF ; Clamoxyl L500mg gél. B/12 ; Clamoxyl 500mg pdre pr sp Fl/12 doses ; Colart comprimé 20/120MG B/24 (S/D) ; Deroxat CP 20mg B/14 ; Fefol caps. B/30 (S/D) et Flixonase susp. nas. Spray 120 doses. Les médicaments : Flixotide 50 mcg aerosol 120 doses B/1 ; Floxapen 125mg/100ml – Nour. (S/D) ; Floxapen 250mg/100ml – enfant (S/D) ; Floxapen 500mg gél. B/20 (S/D) ; Malanil cp adulte 250mg/100mg B/12 ; Malanil cp enf 62.5mg/25mg B/12 (S/D), Nootropyl 1G/5ML AMP B/12, Nootropyl 3G/15ML AMP B/4, Nootropyl 800MG CP B/45 ; Salbumol sol. inj. 0,5mg/ml B/6 ; Seretide diskus 50/100MCG 1X60D (S/D) et Seretide diskus 50/250MCG 1X60D (S/D) figurent aussi sur la liste.
Souce : L’ Essor