Dans une lettre ouverte inspirée des résultats d’un sondage d’opinion, l’ingénieur statisticien, Sidiki GUINDO, demande au Président de la République de surseoir au projet de révision constitutionnelle.
En cela, il se fonde sur la tension qui est palpable entre le camp du OUI et celui du NON, dans un contexte national où c’est le consensus qui devrait prévaloir. Pour lui, quel que soit le résultat du référendum, c’est le Mali qui s’en sortira perdant, parce que davantage divisé. D’où son conseil de concerter à nouveau la société civile avant toute nouvelle initiative et de s’abstenir des modifications qui ne sont pas indispensables à l’application de l’Accord. Lisez la lettre ouverte.
Lettre ouverte à son Excellence Ibrahim Boubacar Keita, Président de la République.
Selon, les résultats de mon sondage d’opinion, le seul aboutissement de ce referendum est la division des maliens, je vous conseille donc de surseoir au projet de révision constitutionnelle.
Monsieur le Président, depuis plusieurs jours, l’actualité au pays et au sein des Maliens de la diaspora est dominée par le projet de révision constitutionnelle. La tension est palpable entre le camp du OUI celui du NON. Le blocage des réseaux sociaux, les menaces de mort entre fils d’un même pays, le refus par l’Etat de protéger un citoyen dont la vie est menacée sont sûrement des reculs de notre chère démocratie.
C’est dans ces circonstances que j’ai rapidement évalué, par les méthodes de sondage, l’opinion des Maliens sur la situation que traverse notre chère patrie (la taille de l’échantillon était de 2 200 individus répartie entre les régions et le district de Bamako). En tant qu’Ingénieur Statisticien Economiste, je pouvais, sans aucun doute, me donner comme objectif de prédire les issues du scrutin. Cependant, vue la situation que traverse le pays et selon mes principes, je refuse de me lancer dans cet exercice. Je résume les résultats du sondage en ces deux phrases :
– Ni le camp du OUI, ni le camp du NON ne perdra lors du referendum : c’est le Mali qui va perdre.
– Ni le camp du OUI, ni le camp du NON ne gagnera cette élection : seuls ceux qui veulent voir un Mali affaibli gagneront leur pari.
En effet, il est capital, pour un pays, comme le Mali d’aujourd’hui, d’avoir un large consensus autour de toute nouvelle constitution. Or, selon les résultats du sondage, les Maliens sont plus que jamais divisés sur ce projet de révision constitutionnelle. Au niveau national, au minimum 30% des Maliens se trouvent de chaque côté. C’est-à-dire, selon nos résultats, vous avez déjà le soutien total d’au moins 30% des Maliens ; mais, parallèlement, au moins 30% des Maliens s’opposent farouchement à ce projet. La situation de Bamako est plus inquiétante : plus de 50% de la population s’oppose farouchement à ce projet.
Monsieur le Président, il faut donc noter que :
• Même si le camp du OUI l’emporte, vous laissez place à une tension entre les Maliens.
• i le camp du OUI l’emporte, le premier objectif du Président qui viendra après vous sera de remodifier la constitution. Nous rentrons donc dans le tripatouillage de la constitution.
• Même si le camp du OUI l’emporte, c’est aussi ouvrir la porte à tous les mots contre votre personne.
Monsieur le Président, de la même manière, qu’en 2002 (après les élections présidentielles) vous avez pu éviter un bain de sang à notre pays, vous pouvez le faire aujourd’hui. Aussi, par la grâce de Dieu, vous êtes aujourd’hui la seule personne qui peut désamorcer cette vive tension.
Je vous conseille donc de surseoir au projet, d’abandonner toutes les modifications qui ne sont pas nécessaires pour l’application de l’accord pour la paix, de ré concerter davantage la société civile.
Je termine mes propos, en me posant cette question : est-ce que le consultant qui a modifié la formule de prestation de serment, en y enlevant la garantie de l’intégrité territoriale (au jour d’aujourd’hui !), est Malien ? Est-ce une erreur ou a-t-il fait sciemment ? Je propose qu’il lui soit demandé des explications.
Guindo Sidiki,
Ingénieur Statisticien Economiste.
guindosidiki@yahoo.fr
Source: info-matin