En plus de la pression exercée par la Plateforme « Touche pas à ma Constitution », le renvoi de l’organisation du referendum sur la révision constitutionnelle par le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita est aussi dû à la position des religieux et de celle de la Coordination des mouvements de l’Azawad à travers son président, Bilal Ag Cherif.
Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita s’est adressé à la nation dans la nuit de vendredi à samedi sur l’organisation du referendum constitutionnel. IBK a tranché. Le chef de l’Etat a finalement décidé de surseoir à l’organisation d’un referendum sur la révision constitutionnelle. Pour lui, « Pour le Mali, aucun sacrifice n’est de trop ».
Sans crier victoire, la Plateforme « Touches pas à ma Constitution » peut néanmoins se taper la poitrine pour avoir contribué à faire changer d’avis le chef de l’Etat. Finalement, IBK s’est pas soumis aux exigences de la Plateforme qui sollicitait le « retrait » du texte à travers les manifestations de rue, voire brandit de désobéissance civile, s’il ne se soumettait pas à leur vouloir.
Petite victoire certes, pour les partisans du « Non », mais ceux du « Oui » ne semblent pas totalement vaincus, puisque la consultation aura lieu, mais après « un dialogue inclusif et dépassionné ».
Au-delà des marches et autres sit-in de la Plateforme, ce qui a surtout fait changer la position d’IBK ont été les sorties des religieux et des responsables de la CMA. Les premiers reçus par IBK dans le cadre de la série de concertations l’on invité à surseoir à son projet de révision constitutionnelle. Le guide spirituel d’Ançardine internationale, Ousmane Cherif Madani Haidara, avait dit qu’il se prononcera sur la révision constitutionnelle pour le seul intérêt du Mali.
De leur position de neutralité, certains religieux après leur rencontre avec la Plateforme avaient menacé de « rejoindre » le camp du « Non », si le président ne respectait pas leur revendication. Cette sortie de Madani Cherif Haidara a été prise au sérieux par Koulouba qui ne doute pas une seule seconde du rôle joué par les religieux pour la cohésion sociale.
IBK l’a d’ailleurs rappelé dans son adresse à la nation « L’une des grandes chances de notre pays réside dans le fait que dans les périodes les plus complexes, il se trouve toujours des hommes et des femmes qui se dévouent pour réduire les divergences et pour entretenir les chemins du dialogue ».
La seconde raison qui a poussé IBK à surseoir à son projet vient du côté de la CMA. La semaine dernière, au cours d’une conférence de presse, Bilal Ag Cherif, président de la CMA a mis le pied dans le plat en disant que la CMA ne se reconnaissait pas dans la nouvelle Constitution. Or, IBK ne cessait d’affirmer que la révision constitutionnelle est faite pour prendre en compte certaines dispositions de l’accord d’Alger. Bilal aura coupé l’herbe sous les pieds du chef de l’Etat qui n’avait plus d’arguments pour défendre sa révision constitutionnelle.
Du coup, le président de la République a compris que le seul camp du « Oui » ne pouvait pas l’amener à organiser une révision constitutionnelle très controversée. IBK a ainsi prêté une oreille attentive aux sollicitations de la Plateforme, des religieux. « …aujourd’hui, nous Maliens, avons impérativement besoin de nous écouter, de nous comprendre et d’aller ensemble de l’avant ». Ainsi, de partisan, le président de la République est devenu un arbitre « Ma fonction fait en effet de moi le principal garant de la cohésion sociale et le premier défenseur de l’intérêt national ».
Amadou Sidibé
Report du referendum constitutionnel :
Des citoyens se prononcent
Pour de nombreux Maliens, le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita a pris une sage décision en décidant de surseoir à l’organisation du referendum constitutionnel.
Sibiry Konaté, agent de santé : Le président a été sage
« Je suis d’accord avec le chef de l’Etat qui a pris la bonne décision. L’organisation du referendum ne doit pas amener les Maliens à se regarder en chien de faïence. Dans toute chose, si les hommes se parlent et s’il y a la volonté de se comprendre, tout finira par bien se passer. Je conseille au chef de l’Etat de mettre la prochaine mouture du projet de révision constitutionnelle à la portée de la majorité des Maliens et de l’expliquer de fond en comble ».
Mariétou Diarrassouba, étudiante : IBK a pris trop de temps
« L’acte posé par le président de la République de reporter, le referendum et de concerter davantage les Maliens est salutaire. Sachant qu’il est le garant de la cohésion sociale, il ne devrait pas prendre tout ce temps pour agir. Dans une contestation comme c’est le cas, il est toujours bon d’anticiper et de prendre des décisions qui s’imposent. Comme on le dit, mieux vaut tard que jamais ».
Israël Diarra, fonctionnaire : Le chef de l’Etat a agi à temps
« Depuis l’avènement de la démocratie au Mali, jamais il n’y a eu de contestation aussi sérieuse sous un régime sur un sujet d’intérêt national. Je pense que le président est un homme averti qui sait beaucoup de choses sur le Mali. Donc, s’il y a une protestation de nature à diviser les Maliens, il devrait rapidement se comporter en président de tous les Maliens. S’il n’avait pas prononcé ce discours très attendu, l’opinion allait l’en vouloir et le traité de tous les maux. Qu’il sache toujours prendre des décisions qui vont dans le seul intérêt du Mali et cesser de faire plaisir à qui que ce soit. Nous savons que les choses sont très compliquées à gérer, surtout avec des ingérences exogènes, mais nous lui demandons de continuer à être au juste milieu ».
Kalifa Maïga : le président a joué aux sapeurs-pompiers
Gouverner, c’est anticiper, c’est aussi connaître ce qui est bien pour le peuple ou ce qui ne l’est pas. Le seul défaut du président IBK, c’est qu’il a des difficultés à écouter ceux qui viennent avec les bonnes idées. Le chef de l’Etat doit se mettre au-dessus de la mêlée. Et éviter de s’en prendre à une couche de la population. S’il y a problème entre les Maliens, il aurait dû intervenir plutôt. Je salue tout de même sa perspicacité ».
Propos recueillis par
A.S.
La rédaction