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Relations franco-maliennes: L’ouverture d’une nouvelle ère ?

Un nouveau président français, un nouveau départ dans les relations franco-maliennes ? Est-ce l’homme d’un nouveau cycle ambitieux tourné vers l’avenir ?

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Une nouvelle ère est-elle «en marche» ? D’évidence, à Bamako comme à Paris, elle est fortement souhaitée, mais surtout exigée au regard des multiples défis majeurs auxquels sont confrontées les deux capitales. Investi officiellement nouveau président de la République française, vendredi dernier, Emmanuel Macron est aussi observé et avec beaucoup d’intérêt par Bamako qui, depuis sa campagne présidentielle, lui avait témoigné «soutien et amitié».

Le nouveau chef d’État français bénéficie d’un a priori positif au bord du Djoliba, qui l’attend par ailleurs sur bien des sujets pour «tester» sa volonté d’écrire une page nouvelle dans les relations parfois traversées de phases critiques. Les deux pays disposent de toutes les cartes nécessaires pour y parvenir. Les proximités sont diverses : économiques, politiques, humaines, culturelles et  géographiques. Les intérêts géostratégiques sont quasi communs aux deux capitales. La lutte contre le terrorisme et l’immigration pourrait enfin être cet espace de confluences.

Les élites politiques et économiques des deux bords nord-sud placent en lui l’espoir de jeter les fondations d’un couple franco-malien inspiré du modèle franco-allemand. La conjoncture est favorable. «Le nouveau président français a l’avantage d’arriver à la fin d’un long cycle positif dans nos relations ; plus que jamais les conditions sont favorables pour un saut qualitatif dans les relations bilatérales», estime M. Touré, un ancien ambassadeur.

La particularité des rapports entre les deux pays commande plus d’exigence. Mais surtout d’habileté pour éviter de heurter des sensibilités tant le passionnel empiète souvent sur le pragmatique. Emmanuel Macron n’ignore rien de cet aspect. Il était le seul des candidats à l’élection présidentielle française à avoir effectué une visite en Afrique en Algérie, où il a su trouver «les mots et les gestes justes».

Sachant l’importance du poids de l’histoire, de la mémoire et les traumatismes coloniaux, il n’avait pas hésité à prendre le risque de prononcer la phrase tant attendue par les Maliens, mais qui pouvait lui coûter cher durant la campagne électorale. «La colonisation était un crime contre l’humanité» a sonné comme une rupture dans le discours politique français vis-à-vis d’une page sombre de l’histoire de la France. Elle a  provoqué un dégel.

C’est une barrière psychologique majeure qui tombe. Ce jour-là, Emmanuel Macron a «séduit» au sein de la société comme dans les appareils de l’État. «Sa déclaration d’Alger a été très osée ; avec le risque de lui faire perdre la présidentielle, elle apporte du sang neuf à la culture française. L’homme est en rupture avec les caciques, il se débarrasse des préjugés. Il doit rompre avec l’héritage culturel colonial. Maintenant qu’il est élu Président, nous espérons que ses positions se clarifieront davantage, que le Mali sera un véritable partenaire à part entière. En finir avec les guerres mémorielles, qu’on puisse enfin écrire l’histoire commune avec les deux mains (…)», soutient l’ancien diplomate, M. Touré.

Côté malien, il est attendu aussi des gestes forts et des décisions symboliques pour retrouver une confiance mutuelle.

Le poids du passé et l’exigence du futur

Mais au-delà de l’histoire et du passé colonial qu’il faudra traiter avec sérénité, le temps est venu pour les ambitions du futur. «Le partenariat d’exception» vanté à intervalle régulier doit trouver sa traduction concrète, prendre forme en des projets bénéfiques aux deux peuples. Aux mots, il faut adjoindre des actes. Mettre en action les nombreuses potentialités dont disposent les deux pays au destin commun.  «Je veux apporter un regard neuf sur le Mali et un rapport nouveau avec le Mali. Ce partenariat renouvelé que nous attendons depuis des années, je veux lui donner du corps, de la matière, et pour cela je veux mettre en avant les projets de coopération, les solutions concrètes entre nos deux pays dans les domaines de l’économie, de l’éducation, de l’innovation technologique, en nous appuyant notamment sur la jeunesse», a-t-il déclaré lors de son périple malien.

Le Mali en proie à une insécurité doit impérativement s’atteler à rendre son économie attractive pour les investisseurs nationaux et étrangers. Il est évident que le désormais locataire de l’Élysée fixe les contours d’un cap pouvant permettre d’entrer dans une nouvelle phase de l’histoire. Ils sont d’abord économiques. C’est l’un des points forts du nouveau Président qui connaît les atouts et les faiblesses de l’économie malienne dominée par l’informel, écrasée par le poids de la bureaucratie et gangrenée par la corruption. Mais surtout otage des luttes d’influence entre groupes rivaux au sein du pouvoir. Il y a urgence à revoir le logiciel et l’adapter aux besoins de la modernité.

Néanmoins, la coopération sécuritaire, économique, scientifique et culturelle doit s’inscrire dans une stratégie globale qui impliquerait les enjeux régionaux au Sahel et en Afrique avec laquelle Emmanuel Macron aspire construire l’avenir. Dans ces domaines, Bamako ne voudrait pas se retrouver «non associée aux discussions sur des dossiers comme celui de Kidal, le Sahel, la lutte contre le terrorisme…». Elle veut être aussi la porte d’entrée vers l’Afrique. Cela impliquerait une volonté politique véritable des deux côtés.

«Autour de la France et du Mali, nous pouvons créer un axe fort, porteur d’une ambition collective pour le Sahel et l’Afrique», ambitionne Emmanuel Macron. Cependant, pour ce faire, il faut un interlocuteur. L’anormale situation politique nationale ne va-t-elle pas handicaper la mise en œuvre de ces projets ? Le mutisme prolongé du chef de l’État, Ibrahim Boubacar Keita, risque de poser problème quand il s’agira de l’implication forte des deux États.

La situation est pour le moins gênante, d’autant que les deux États fonctionnent avec deux rythmes différents. Les grandes ambitions affichées peuvent alors se heurter aux pesanteurs des réalités politiques.

Jean Pierre James

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