Après 48 heures de négociations, les Vingt-Huit ont trouvé ce mardi 2 juillet un accord sur les nominations à la tête des institutions européennes. Portraits.
■ Ursula von der Leyen (Commission européenne)
Pour Ursula von der Leyen, cette désignation à la tête de la Commission européenne est un retour aux sources, observe notre correspondant à Berlin, Pascal Thibaut. C’est en effet à Bruxelles qu’elle est née, en 1958. Son père est fonctionnaire européen et sa fille grandit dans la capitale belge jusqu’à l’âge de 13 ans, ce qui explique son excellent français. Elle vit ensuite en Basse-Saxe, une région que son père, un chrétien-démocrate, dirige durant 14 ans. Après des études d’économie puis de médecine, elle vit durant quatre ans en Californie avec son mari. Le couple a sept enfants, une famille modèle qu’Ursula von der Leyen a souvent mise en avant.
Sa carrière politique commence sur le tard, mais elle est fulgurante. Après un poste de ministre en Basse-Saxe, elle est appelée au gouvernement par Angela Merkel dès la victoire de cette dernière en 2005. Proche de la chancelière, Ursula von der Leyen a la même longévité : après avoir été ministre de la Famille, puis du Travail et des Affaires sociales, elle est à la Défense depuis six ans. Elle devient la première femme à occuper ce poste en Allemagne. Longtemps considérée comme la dauphine d’Angela Merkel, son étoile a pâli avec une série de scandales qui ont éclaboussé la Bundeswehr et sa gestion du ministère. Sa popularité a fortement faibli.
Mais sa biographie, son engagement européen, notamment sur les questions de défense, la confiance qu’elle suscite à Paris et ailleurs ont joué en sa faveur. Son nom a souvent été évoqué comme secrétaire générale de l’Otan. Elle crée la surprise avec sa nomination comme présidente de la Commission européenne.
■ Charles Michel (Conseil européen)
Charles Michel est entré en politique très tôt. Engagé chez les libéraux dès l’âge de 16 ans, il décroche deux ans plus tard son premier mandat comme conseiller de la province du Brabant wallon. Débatteur habile et souriant en toute circonstance, ce fils d’une famille d’entrepreneurs s’avère être un véritable animal politique. À 23 ans, il devient le benjamin de l’Assemblée, avant d’être désigné ministre des Affaires intérieures du gouvernement wallon l’année suivante. En 2014, sa carrière prend son envol lorsqu’il devient, à 38 ans, le plus jeune Premier ministre de l’histoire belge.
Mais celui qui se dit attaché aux valeurs démocratiques européennes, forme une coalition avec les nationalistes flamands, avec qui le chef des libéraux avait pourtant juré de ne pas s’allier. « Une coalition kamikaze », pestera alors l’opposition. Charles Michel sera l’homme des réformes libérales, que ce soit dans la fonction publique ou sur le marché du travail. Mais son gouvernement vole en éclats fin 2018, lorsqu’il signe à Marrakech le Pacte mondial des Nations unies sur les migrations. Les ministres nationalistes flamands claquent alors la porte. Depuis, le Premier ministre était chargé d’expédier les affaires courantes jusqu’aux élections prévues cette année.
Josep Borrell (Haut Représentant pour les Affaires étrangères)
Il est une figure rassurante de la politique espagnole et européenne. Josep Borrel fait partie de ces barons du Parti socialiste ouvrier espagnol, rappelle notre correspondante à Madrid, Diane Cambon. Il y est entré comme militant dans les années 1970 et a été ministre de l’ancien chef de l’exécutif Felipe Gonzalez à deux reprises.
À l’âge de 72 ans, il va hériter du poste de Haut Représentant pour les Affaires étrangères européennes. Cette nomination à Bruxelles est une consécration pour ce Catalan à la chevelure blanche qui a été en charge de la diplomatie étrangère sous le gouvernement de Pedro Sanchez après plusieurs années passées loin de la politique.
Josep Borrell est un fervent défenseur de l’unité espagnole, mais aussi un partisan convaincu de l’Europe. Il connaît bien les hautes instances de l’Union européenne. D’abord député européen, il a ensuite dirigé le Parlement européen entre 2004 et 2007. Sa nomination marque le retour de l’Espagne sur la scène européenne. C’est en tout cas de cette façon que le chef de l’exécutif Pedro Sanchez a salué le départ de son ministre.
Christine Lagarde (Banque centrale européenne)
Après huit années à la tête du FMI, Christine Lagarde s’est taillé une réputation de grande diplomate, habile à forger des consensus, excellente dans l’écoute des opinions diverses des technocrates de l’institution monétaire et efficace dans sa manière calme de communiquer. Sous sa direction, le FMI a pris position sur des sujets qui auraient été tabous, il y a seulement dix ans : les politiques de réductions des inégalités sociales, de promotion des femmes ou encore la lutte contre le réchauffement climatique.
Sélectionnée par les Européens pour diriger le FMI à un moment où l’on redoutait que la zone euro implose, Christine Lagarde n’a finalement pas eu à tordre les règles de l’institution multilatérale même pour sauver la Grèce, remarque notre correspondant à New York, Pierre-Yves Dugua. La BCE et les gouvernements des pays riches de la zone euro sont restés en première ligne. Âgée de 63 ans, on lui reproche encore de ne pas être économiste, de ne pas partager l’instinct des marchés, ce qui peut se révéler plus ennuyeux pour diriger la BCE que cela ne l’a été pour le FMI.
AFP