«L’homme véritable ne se demande pas de quel côté on vit mieux, mais de quel côté est le devoir; et le seul homme pratique est celui dont le rêve d’aujourd’hui sera la loi de demain, car celui qui aura contemplé les entrailles universelles et vu brûler les peuples enflammés et ensanglantés, dans le creuset des siècles, sait que l’avenir est, sans une seule exception du côté du devoir.» (José Marti).
Il n’est pas besoin de rappeler dans les détails les raisons véritables qui ont conduit les élèves et étudiants du Mali, les travailleurs maliens, le secteur informel à se soulever contre l’apache régime de Moussa Traoré. Il faut tout simplement rappeler que les conditions de vie, d’étude et de travail de l’écrasante majorité des Maliens étaient tout simplement exécrables à tel point que le peuple malien était désormais dans l’impossibilité de continuer à supporter les affres de la gestion calamiteuse des affaires de la République par un homme et son clan politico-militaire.
Du coup, le régime militaro-upmiste était à bout d’énergie et ne pouvait plus continuer à gérer lesdites affaires. Débout comme un seul homme, le peuple malien a dit à Moussa Traoré que trop c’est trop. Le bilan de cette détermination fut macabre : plus de 200 morts. Le cri de cœur de tout un peuple était: ‘‘an tè kôrolé fè fo coura’’. Autrement dit, le peuple malien avait soif du changement véritable du tout au tout. Hélas ! Trente (30) longues années après la chute de Moussa Traoré, le changement se fait cruellement attendre.
Aujourd’hui, c’est peu dire que les ‘’démocrates’’ maliens, avec à leur tête Alpha Oumar Konaré ont foulé au pied ce cri de cœur du peuple en détresse réelle et profonde. Les politiciens affairistes ont passé trente ans à sucer le sang de nos masses laborieuses au nom d’une fallacieuse démocratie qui leur a permis de formater tout un peuple. C’est au nom de la légalité constitutionnelle que les sangsues ‘‘démocrates’’ ont osé tout et fait tout, pour nourrir leurs familles aux dépens des hommes et des femmes dont le seul crime était de naître et de rester pauvres. Comme pour dire que les coups de force militaires étaient les répondants aux sales besognes de ces ‘’démocrates’’ caméléons. Ainsi, le coup d’État du capitaine Amadou Haya Sanogo a été fortement salué et acclamé par l’écrasante majorité des populations maliennes qui ont compris que les politiciens maliens, en mal de crédibilité et de dignité, se sont servi du concept de démocratie pour assouvir leurs sales besognes et leurs ambitions machiavéliques.
Le constat indéniable est qu’ils se sont enrichis de la sueur et du sang des Maliens. Sachant le soutien indéfectible des Maliens au coup de force de Sanogo et compagnons, ces politiciens remuant ciel et terre, se sont servi d’une race de religieux pour faire capoter le dessein patriotique de ces jeunes militaires. Ils ont reçu l’amère leçon qu’on ne remet pas le pouvoir à ceux qu’on a renversés. C’était là, une faute irréparable ! Le coup d’État consommé, les militaires n’avaient à reculer devant rien, pas même face aux menaces creuses d’une Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) au service des chefs d’État et non de leurs peuples. Hélas ! Leur recul a coûté de la quinine à nos masses laborieuses.
Un autre coup d’État s’est déroulé, le 18 août 2020 cette fois contre le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) qui s’est illustré par son incapacité à opérer le moindre changement à l’avantage de notre peuple travailleur. Cette fois-ci, les choses semblent prendre un tout autre chemin quand bien même, il n’est pas judicieux de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir abattu ! Les jeunes militaires à l’œuvre ont-ils vraiment tiré les leçons de notre passé douloureux ? Le temps nous en dira plus ! Tout compte fait, ils ne doivent oublier un seul instant ces précieuses lignes du camarade José Marti de Cuba.
Il a dit: «L’homme véritable ne se demande pas de quel côté on vit mieux, mais de quel côté est le devoir ; et le seul homme pratique est celui dont le rêve d’aujourd’hui sera la loi de demain, car celui qui aura contemplé les entrailles universelles et vu brûler les peuples enflammés et ensanglantés, dans le creuset des siècles, sait que l’avenir est, sans une seule exception, du côté du devoir.»
Le gouvernement de transition doit tirer toutes les leçons des coups d’État antérieurs pour servir autrement le Mali. Tous les Maliens qui ne se sont pas trempés dans les sales draps des ‘‘démocrates’’ mafieux sont unanimes à reconnaître que ce sont ces politiciens, dans leur course aux avantages sordides, qui ont plongé notre pays dans le gouffre ineffable. À travers tout le Mali, les masses populaires ont dit que les militaires doivent assainir la situation nationale suffisamment pourrie.
Pour ce faire, l’audit de la nation est incontournable. Ce qui permettra de débusquer et de punir sans état d’âme les déprédateurs de notre tissue économique national. Nul doute que les politiciens qui ont dévoré les masses laborieuses du Mali sont engagés dans la course contre la montre.
L’on comprend donc pourquoi ils s’agitent dans tous les coins et recoins du Mali pour exiger la tenue rapide des élections pour éviter qu’ils rendent compte de leurs forfaitures ignobles contre les Maliens ! Celles et ceux qui ont souillé l’économie nationale, l’honneur et la dignité de notre peuple doivent rendre compte. Ainsi, celles et ceux qui se sont rendus coupables de la déprédation de notre tissu socioéconomique national doivent s’expliquer. C’est cela qui permettra la refondation du Mali.
Les pouvoirs réactionnaires français et américain qui mettent la pression, par le truchement des valets maliens, sur la transition dans notre pays, ont honneur de voir le Mali se remettre débout. Les autorités de la transition doivent se rendre à l’évidence que sans mener à bien la traque de la corruption et de la délinquance financière avant de s’occuper d’élections, elles auront mal servi ces millions de Maliens qui souffrent dans leur chair et dans leur conscience les affres des politiciens sangsues des masses travailleuses du Mali.
Aussi, faut-il dire que sur cinquante quatre pays africains, une trentaine est en guerre. Dans l’ensemble, ces pays sont francophones. Les pouvoirs coloniaux français ne peuvent se maintenir que par et dans la mafia politique sur le continent africain. Allez savoir ce qui s’est passé au Rwanda, au Congo, en Centrafrique, en Sierra Leone, au Liberia, en Libye et actuellement dans les pays du G5-Sahel. Autant le chat se nourrit des souris, autant la France se nourrit des pays africains.
En effet, il est plus dangereux et catastrophique pour notre peuple d’organiser des élections pour remettre en selle les mêmes politiciens qui ont tout simplement trahi ce peuple. Si les autorités de la transition veulent refonder le Mali, si elles ne veulent pas soigner la plaie sur du pus, elles doivent travailler à tourner définitivement la page de ces hommes et de ces femmes qui se sont nourris pendant trente ans du sang des Maliens.
C’est donc leur dire que pour servir le peuple malien dans son combat pour la refondation de notre pays, les élections avant l’assainissement de toutes les structures socioéconomiques seront l’expression d’une autre farce politique dont on a longtemps abreuvé les Maliens. La priorité pour le Mali n’est donc ni de près ni de loin l’organisation d’élections dans un pays où tout est à faire et à refaire tant sur le plan de l’éducation, de la santé que de la sécurité. Parce qu’on aura jeté les bases d’un autre coup d’État. Loin de nous, l’idée de souhaiter les coups de force en régime démocratique! Mais lorsque les ‘’démocrates’’ foulent au pied les intérêts fondamentaux de notre peuple et se permettent de tout oser et de tout faire au nom de la légalité constitutionnelle, les coups d’Etat sont inévitables au Mali.
Au lieu donc de s’occuper d’élections, il est salutaire pour notre peuple d’éradiquer au préalable les causes de la désagrégation de notre tissu socioéconomique et politique que sont entre autres: la corruption, la délinquance financière, l’absentéisme ou les retards chroniques au travail. Cela est un impératif catégorique quand on sait qu’au Mali il est de coutume que ceux qui travaillent sont misérables et que ceux qui ne font rien de bon nagent dans l’opulence à tel point que les Maliens ont fini par comprendre que c’est bien ce clivage qui constitue la règle du jeu démocratique.
– Vivement l’audit de la nation !
– Vivement la traque de la corruption et de la délinquance financière !
– Vivement la récompense du mérite et la sanction de la faute. Ainsi ceux qui ne travaillent pas dans les services doivent céder la place à ces millions de jeunes diplômés en quête d’emplois.
Fodé KEITA
Source : L’Inter De Bamako