Lorsqu’il s’agit de trouver des fonds en Suisse, tenir congrès en l’Italie ou rendre visite à l’intraitable Kremlin, le Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla) n’a guère de souci. Mais cela indigne profondément les citoyens maliens qui observent incrédules la percée diplomatique cette organisation (criminelle). A l’opposé, les autorités maliennes semblent manquer d’initiative. Elles assistent en spectateurs.
Le dernier exploit des groupes armés est la mise en place d’une coordination diplomatique en Italie la semaine dernière, au moment où le Mnla se déchire sur le terrain à Kidal. Ibrahim Ag Assaleh qui est parti du mouvement, en déclarant être suivi par 8000 combattants, ce qui reste à confirmer.
Les difficultés des ex-alliés des islamistes qui ont dominé le nord du Mali pendant plus d’une année pourraient expliquer le show diplomatique auquel il se livre Ag Cherif entre l’Europe occidentale et la Russie de Vladimir Poutine. Peu après le déclenchement du bras de fer entre la Russie et les pays occidentaux au sujet de l’Ukraine, l’encombrant Mnla avait été reçu par le Kremlin.
Plus qu’une simple quête de soutien, il y a dans la démarche du Mnla une stratégie de positionnement pouvant mettre, à la longue, les autorités maliennes en difficulté. Sentant sa présence menacée sur le terrain, le mouvement touareg commence à courir les palais, quitte à surfer sur les clivages Est-Ouest, pour se tisser un réseau diplomatique beaucoup plus large.
Aussi, le Mnla semble profiter du manque d’initiative des autorités maliennes qui ont tendance à faire intervenir beaucoup d’acteurs (négociateurs ?) dans le dossier. Ce qui jette un flou sur la médiation.
Le but de ces périples est de s’appuyer sur ces pays pour faire pression sur les autorités maliennes qui n’ont pas jusqu’à présent cédé sur la question de l’autonomie exigée par les groupes armés. Il s’agit surtout de mettre en place un lobby dont l’œuvre est de faire passer la primauté touareg dans les discussions sur le sort du nord du territoire malien.
Ce jeu favori des rebelles Touareg commence à être contreproductif, non pas sur le plan diplomatique, mais sur le terrain. Se considérant victimes, les autres communautés s’organisent depuis peu pour se faire entendre désormais, et surtout elles n’excluent pas la possibilité de faire recours aux armes.
Même si le pays court ainsi vers des violences intercommunautaires qui pourraient être catastrophiques pour toutes les communautés, les responsables du Mnla semblent ignorer qu’ils donnent le mauvais exemple. En attendant, leurs vadrouilles incessantes posent beaucoup de questions et apportent peu de réponses.
Le Maroc a été introduit dans le processus du dialogue entre Bamako et les groupes armés, après la visite de Bilal Ag Chérif dans ce pays. Mais ce royaume n’aura pas eu le temps de faire ses preuves avant que le Mnla ne saute sur la Russie, ce qui a irrité les autorités de Bamako.
A Ouaga, on continue de louer les avantages de l’accord signé chez Blaise Compaoré, alors qu’Alger met les bouchés double pour que ses propositions de sortie de crise au Mali soient pris en compte par l’Etat malien. Mais dans ce ballet diplomatique, les autorités maliennes ont du mal à s’imposer, ce qui provoque la colère de beaucoup de citoyens.
Soumaïla T. Diarra