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Mali : le djihad sournois

Il est là, cet autre djihad. Ou du moins la cinquième colonne de celui qui continue dedévaster notre beau pays, le Mali, de déchirer les familles, d’opposer des communautés. Les mêmes qui, depuis des siècles, avaient partiellement soldé, et avec intelligence, leurs différends. Et cela, dans l’intérêt de la postérité, notre intérêt. Ces grands sages donc, qui nous ont devancés, ne voulaient pas que nous vivions les affres qu’ils ont vécus, eux.

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Ils ne voulaient pas que nous connaissions la guerre, la violence aveugle, le viol, les razzias, l’esclavage. En un mot, ce qu’ils appelaient « dunnya juguya tilé » (les temps du grand méchant monde, en bambara). C’est pourquoi ils ont multiplié les possibilités de dialogue, multiplié les cadres de rencontres et d’échanges : les mille et un cousinages à plaisanterie dans les régions sahélo-sahariennes en sont quelques illustrations. Cette façon de solder les différends sans passer par les armes a existé, en tout cas jusqu’à une date récente, même entre musulmans et non musulmans. Le chantre du Komo, interprété par le vénérable Bazoumana Sissoko ne disait pas mieux quand il chantait de sa belle voix :

« Qu’un musulman n’en veuille pas à un non-musulman

Qu’un non-musulman n’en veuille pas non plus à un musulman

Car le Créateur suprême (da-ba) créé chacun et lui a donné son chemin. »

Le même chantre du Komo dit :

« Le monde même n’est qu’une foire de pleine nuit. Si nous qui l’habitons, nous ne nous facilitons pas la vie, au lever du jour, ce sera le grand regret pour tous et chacun. »

Il faut avoir l’honnêteté intellectuelle d’ajouter (je sais que c’est tabou et politiquement incorrect) que la colonisation française (il y en a eu bien d’autres avant), malgré sa brutalité et son arrogance, a quand même contribué quelque part à asseoir durablement cette paix qui n’était pas toujours acquise, faut-il le dire, dans plusieurs zones qui continuaient d’être ravagées par des guerres intestines entre différents chefs.

Il faut avoir l’honnêteté intellectuelle de reconnaître qu’elle a ainsi pu arrêter des velléités de génocide en cours à cette époque-là, je veuxparler de la moitié du fameux XIXe siècle où presque partout, le Mali était à feu et à sang. Loin de moi l’idée de faire l’éloge de cette colonisation, de passer sous silence ses horreurs. Mais l’histoire d’une nation ne se limite pas à ne dire aux citoyens que ce qui leur plaît. Elle est totale, complète ou elle ne s’appelle pas histoire. Cacher une partie de son histoire au peuple, c’est lui faire courir des dangers futurs, pires que ceux qu’il a déjà vécus.

Mais revenons à notre djihad sournois. Il est donc là, presque invisible, presque inaudible. Parce qu’il se fait sans tambour battant, sans prêches enflammés ni crépitement de mitraillettes. Il ne porte pas de voile non plus. Pourtant, telle une pieuvre, il déploie ses tentacules, partout, surtout dans les écoles. Telle une sangsue, il pompe, à dose homéopathique, le sang de notre société, le sang de la fine fleur de notre société. Et malgré les immenses efforts déployés par les associations féminines progressistes, avec leurs moyens limités, très limités alors.

Ce djihad, il s’appelle mariage des filles mineures : 12, 13, 14 ou 15 ans. Il fait florès à Bamako et ailleurs. Il est même érigé en mode. Il ne se passe pas devant Monsieur le Maire, mais à la maison ou à la mosquée. Ceux qui ne me croient pas le sauront le jour où leur fille du même âge leur demandera la permission d’aller au mariage religieux de sa copine de classe. Et quand une fillette de 13 ans voit sa copine du même âge se marier, je crois qu’elle va désormais difficilement penser à ses études.
Source: lemonde.fr

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