LOGEMENTS SOCIAUX ET AINSI DE SUITE
Les prestidigitateurs et nous
Si, comme moi, vous pensiez n’avoir jamais été témoins d’un spectacle de prestidigitation… eh bien ! détrompez-vous ! détrompons-nous ! Depuis un temps trop court pour être compté et trop flou pour être précisé, nous sommes tous victimes… pardon ! spectateurs d’une série de tours de magie médiatiques menés avec une dextérité soignée par des prestidigitateurs en boubous du style année 60. Et avec classe et méthode en plus ! La prestidigitation, n’en déplaisent à ses détracteurs, est un art. Oh, que oui ! C’est une véritable science, un savoir-faire affirmé et confirmé en politique depuis des temps immémoriaux, une maestria dans la manipulation qui n’est point donnée à tout le monde. Et ben… oui ! N’a pas les doigts prestidigitateurs qui le veut !
La prestidigitation, c’est détenir la capacité exquise du trompe-l’œil, un peu comme les Ninja de l’Asie antique quoi ! C’est posséder le secret rare de l’écran de fumée, genre Merlin l’enchanteur au Moyen âge. Prestidigiter, voyons voir… c’est exposer ce qui flatte les sens et dissimuler ce qui… bof ! on va dire… euh… ce qui « craint ».
Voulons-nous un exemple de spectacle de prestidigitation ? Spectacle qui nous a presque tous happés dans le puits des rêves, comme Alice au pays des Merveilles ?
En voici. Depuis neuf mois, des prestidigitateurs en boubou vogue 1960 nous éblouissent de leurs discours moralisateurs sur « la probité » conjugués à tous les temps simples et composés de « la vertu » et accordés aux 1res personnes du singulier et du pluriel. En clair, ce que ça donne ? C’est cela : « Je fus et suis vertueux. Nous… nous seulement, hein ! (c’est-à-dire eux) nous fûmes et nous sommes vertueux ! » Et, Père fouettards de surcroît, nos maîtres magiciens n’ont pas cessé de nous reprocher notre « déficit » de… sacrifice patriotique. Pour eux… c’est eux qui le disent dèh ! « Vous autres (ça, c’est quand ils parlent de nous) ne fûtes et n’êtes pas assez vertueux ! »
Alors, nos maestros de l’illusionnisme de battre, sous notre regard collectif épaté, des cartes sur la gouvernance exemplaire. Dans leurs mains habiles, toute la panoplie de la magie endormante y est. De-ci, l’As de Trèfle sur la droiture ; de-là, le Roi de Carreau sur le comportement irréprochable ; entre le pouce et l’index, la Dame de Cœur sur le patriotisme désintéressé ; entre le médius et l’annulaire, l’As de Pique sur le favoritisme zéro. Sacrés prestidigitateurs que les nôtres ! Leur prestation d’enchantement avait si bien réussi ! Jusqu’à ce que… oups ! Un échafaudage du dispositif de magie s’effondre subitement, laissant voir l’envers du décor et le sombre arrière-fond de derrière le rideau.
Du coup, le charme magique s’est brisé en mille débris qui sont allés, comme une pluie de scandale, tombés sur les toits des Logements sociaux. Donc, à nos dépens… mais qu’est-ce qui nous a pris de croire à la magie ! nous découvrons… oh ! excuses ! nous redécouvrons l’univers factice et la fiction déroutante dans lesquels nos prestidigitateurs nous avaient plongés. Pauvres de nous ! Pendant que nous étions totalement fascinés et transportés par leurs slogans du “eux ” plus blancs que neige, nous réalisons dja dja ! que nos prestidigitateurs étaient en train de partager « le gâteau » des Logements sociaux pour leurs propres assiettes.
Mais bon… ainsi va la magie… ainsi opère le prestidigitateur. Nous sublimer pour nous séduire, nous fasciner pour nous impressionner, nous éblouir pour nous entraîner dans le monde de son égocentrisme politique et de ses intérêts particuliers.
Après tout, ne faut-il pas de tout pour faire un monde ? Quand bien même, moi, en ce qui me concerne, revenu du conte de fées où je me trouvais, j’ai pris la résolution suivante : « Moi, au cirque de la prestidigitation ? Plus jamais ! » Et vous ?
MOHAMED MEBA TEMBELY
Source: lesechosmali
