Les sages de Gao, les vieux et les femmes sympathisants des groupes d’autodéfense, apportent leur soutien total aux jeunes combattants qui se multiplient dans la région. Ils expliquent la prolifération de ces milices par l’absence ou l’inaction criarde de l’Etat malien dans la gestion de la situation sécuritaire de la région.
» L’Etat a démissionné dans son rôle de protection des personnes et de leurs biens. On ne sent plus en sécurité depuis plus de deux mois. Nos jeunes se sont constitués pour nous défendre et nous les soutenons entièrement « , ont indiqué plusieurs intervenants.
Au cours de leur visite, lundi dernier dans la Cité des Askia, les responsables de l’opposition malienne composée de l’honorable Soumaïla Cissé, Tiébilé Dramé, Ahmadou Abdoulaye Diallo et d’autres ont rencontré, au Cadre de concertation des mouvements d’autodéfense, les responsables et acteurs de ces groupes. Ceux-ci sont encore sur les nerfs suite aux derniers événements. Certains de ces jeunes arboraient fièrement des T-shirt portant des slogans : » Je suis Gao, MINUSMA : assassin ! « . Ils sont visiblement remontés contre la mission onusienne et contre l’Etat malien qu’ils accusent de les avoir abandonnés. Cela transparait dans le discours.
Le porte-parole des jeunes combattants, Mohamed Alhousseyni Maïga, sera plutôt incisif : « Vous de l’opposition, vous êtes bien placés pour comprendre ce qui se passe ici. Aujourd’hui, nous sommes déçus. Nous avons été délaissés. Rien ne fonctionne à Gao. L’Etat est informé mais ne fait rien. Or, tout le monde sait comment nous avons défendu l’Etat et ses emblèmes ici. C’est nous qui avons sécurisé l’Etat malien avec nos cailloux et nos protestations, nous avons défendu la République et volé au secours de la région. Nous avons risqué nos vies contre l’occupation. C’est dommage ! « , a-t-il fulminé.
S’asseoir et se parler
Le Chef de Bureau de la MINUSMA de Gao, Francisco Osler, s’est longuement entretenu avec les responsables de l’opposition mais loin des dictaphones et caméras. Ils ont certainement prôné l’apaisement et la cohabitation pacifique qui ont toujours caractérisé les rapports entre la mission onusienne et les populations.
Pour Soumaïla Cissé, le Mali va mal partout. « Ce n’est pas seulement à Gao que ça ne marche pas, où il y a l’insécurité. Avant Gao, il y a eu Nampala, Tenenkou, Dioura et ailleurs. La situation sécuritaire de notre pays nous inquiète. Mais c’est nous qui devons rester dans ce pays. Ceux qui nous aident vont partir un jour. Nous devons tout mettre pour le renforcement des capacités de notre armée. Mais cela ne doit pas se faire avec la colère. Nous devons nous asseoir et nous parler… « , a-t-il déclaré.
Tiébilé Dramé a, pour sa part, déclaré que tout le Mali soutient la résistance de Gao depuis la période de l’occupation par les criminels du MUJAO. « Ce que vous faites ici est su partout. C’est vous qui avez maintenu haut le drapeau du Mali par votre mobilisation et votre patriotisme. Votre opposition, les mains nues, à l’occupation doit être saluée. Nous sommes tous Gao, Gao la fière, Gao, la résistante ! « , a-t-il martelé.
Faire baisser la tension
Au sortir de cet entretien avec la délégation des leaders politiques, Francisco Osler a poliment décliné l’invitation de la presse à s’exprimer. Il s’est juste contenté de dire que ce sont ses chefs de Bamako qui peuvent communiquer par rapport à tout ce qui s’est passé.
Le maire de Gao, Sadou Harouna Diallo a assuré que ce qui s’est passé est regrettable et que, s’il était présent, cela ne serait pas arrivé. Il était en mission à Paris quand il y a eu ces douloureux événements. Il a ajouté qu’il faut faire en sorte que la tension baisse et la confiance revienne.
La dernière partie de la visite de la délégation de l’opposition malienne s’est déroulée au siège du PDES. Ici, le président de ce parti, Ahmadou Abdoulaye Diallo et les autres ont appelé les populations au calme en promettant de dénoncer partout le fait que l’Etat a fui ses responsabilités au plan sécuritaire. « Ce n’est pas bon que prolifèrent les milices dans notre pays. Ce serait la porte ouverte à un désordre. Il urge que notre outil de défense et de sécurité soit être totalement remis sur pied « , a conclu Soumaïla Cissé.
Auparavant, les hôtes du jour ont fait un tour à la mosquée pour des prières et bénédictions pour le retour de la paix au Mali. Soumaïla Cissé et les autres membres de la délégation ont été gratifiés d’un bélier blanc par Issa Abdallah Maïga, l’un des dignitaires religieux de cette mosquée.
Bruno D SEGBEDJI
Source: L’Indépendant