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LE MARIAGE ENDOGÈNE OU ENDOGAME : Épouvantail pour les uns, nec plus ultra pour les autres

Malgré le risque élevé de consanguinité attaché à ces unions entre sujets de même famille, le mariage endogène, endogame ou par parenté est un type de mariage assez courant au Mali. Il est principalement répandu au sein des ethnies peulh, soninké, diawando (ou jgramԑ), sonrhaï et tamasheq. Si, autrefois, ce type d’union était noué pour renforcer les liens de parenté et prôner la cohésion et l’entente au sein des familles, il est, de nos jours, dévié de son sens premier à cause des mutations sociales. Chose qui explique la multiplicité des échecs des mariages endogames. Mais il en faut plus comme argument pour dissuader les défenseurs de l’endogamie. Eux en sont profondément convaincus d’un fait : le système endogame est le mode matrimonial le plus sûr et qui circonscrit drastiquement le champ des divorces par les temps qui courent.


Une chose est sûre, le mariage endogène ou endogame n’intéresse plus, autant que cela, la population jeune. Si ce type de mariage réussissait à merveille jadis, force est de reconnaître que les mariages issus de cette pratique ont un fort taux d’échec aujourd’hui. Une situation qui s’explique, selon certaines personnes, par les mutations sociales du pays.

Sur le plan général, les conjoints concernés se marient sur contrainte. Évidemment, parce que l’initiative est généralement prise par les parents qui sont les gardiens de cette tradition. Pour les adeptes de la pratique, le mariage endogène est la meilleure manière de prôner l’entente et la cohésion au sein de la famille. Or, d’après la majorité de nos sources, cette réalité est une autre chose actuellement. Parce que les temps ont changé et les jeunes n’ont plus la même mentalité ni la même vision de la vie. C’est dans ce sens que ces mariages donnent naissance, la plupart du temps, à l’adultère, aux disputes incessantes, à l’infidélité, aux violences conjugales… Finalement, le mariage qui est censé être une renaissance positive se verra dévié de son sens et fera de la vie des deux parties un véritable enfer.

En soutenant les précédentes affirmations, Afssatou Sanogo ajoute que le mariage endogène est, de nos jours, butté à plusieurs problèmes. « Ce sont, en général, des unions sans consensus des deux conjoints, donc, des mariages difficiles à réussir. Même en cas de malentendu, aucune des parties ne fournit l’effort de s’excuser parce que chacun aimerait tout de suite en finir avec le mariage et trouver sa liberté », avance-t-elle.

Qu’en est-il, des conséquences ? Plusieurs faits réels, produits dans la capitale malienne, prouvent à suffisance que le mariage endogène recouvre de multiples effets néfastes. En commune VI du district de Bamako, Mahamadou Sylla avoue avoir amèrement regretté d’imposer ce choix à ses enfants. Soulignant que trois de ses fils ont déjà connu l’échec dans leur premier mariage, le père de famille dit s’être actuellement résolu à laisser le libre choix à ses progénitures. « J’ai opté pour le mariage endogame pour mes enfants afin de suivre la tradition et renforcer les liens de parenté entre nos différentes familles. Mais c’est la pire des décisions que j’ai prises dans ma vie », confie-t-il avec tristesse. À présent, poursuit-il, cette pratique a bouleversé beaucoup de liens de parenté dans la communauté soninké. Et, pas que moi, plusieurs parents regrettent profondément ce choix qu’ils ont imposé à leurs enfants.

Pour certains, cette tradition a perdu son sens au fil des années. Interrogée, Djénèba Sidibé fait savoir que le mariage endogène était une très bonne pratique dans le temps. Par ce que le but, qui était le renforcement des liens de parenté, était atteint dans la majorité des cas. Par contre, de nos jours, la plupart des personnes qui ont tendance à recourir à cette pratique courent le risque de voir leur famille se disloquer. « Ce type de mariage a tendance à échouer parce que les jeunes ont changé de mentalité. Ils veulent eux-mêmes choisir leur conjoint.e. Chose qui fait que l’endogamie tend beaucoup plus vers la dégradation que vers la perfection. Et, personnellement, je ne suis pas de ceux qui aiment cette pratique », ajoute la jeune dame.

Tradition solidement ancrée dans les mœurs maliennes, le mariage endogame est actuellement devenu un véritable problème de société à cause des nombreux cas litigieux qui en découlent.

Mais cet argument est vigoureusement balayé d’un revers de main par ceux et celles (et ils sont très nombreux) qu’il convient de considérer comme les défenseurs et continuateurs de cette pratique. Pour eux, le contre-argumentaire est simple, et ils le disent sèchement. « Qui a dit que le mariage endogame créait plus de problèmes que le mariage exogame ? Ne voyez-vous pas tous les jours des couples formés selon les critères de l’exogamie s’entredéchirer et finir au tribunal pour y exiger le divorce ? N’allez pas croire à ces fadaises venues d’Occident. L’endogamie est un système matrimonial parmi les plus sûrs qui soient. Nos ancêtres ne l’auraient pas perpétué sinon, eux dans le noble vocabulaire de qui le mot “divorce” était banni », tonne Souleymane Traoré, sexagénaire et influent membre des regroupements banambais qui ont lieu régulièrement en    commune I du District. Massa Solo, comme on le surnomme, n’est pas tendre avec tous ceux et celles qui, selon lui, cherchent à trouver des vices au mariage endogame. « Ce sont des gens qui se sont laissé désorienter de nos valeurs par les idées de Blanc. Qu’on soit pour l’exogamie, ça, je veux bien le concevoir. C’est chacun son choix. Mais qu’on pousse le rejet de nos coutumes jusqu’à se dresser contre l’endogamie, je suis farouchement opposé à cette perception venue de chez les BlancsVous voulez un avantage de l’endogamie ? En voici : j’ai 5 filles qui sont dans leurs foyers respectifs aujourd’hui. Mais, à aucun moment, depuis sept ou huit ans qu’elles sont mariées, je n’ai jamais été appelé pour un souci entre elles et leurs maris. Imaginez si seulement c’était votre système de mariage par choix ! Je serais déjà mort d’anxiété à force d’être réveillé chaque nuit à 2h du matin par mes filles en pleurs », fulmine-t-il. Et Massa Solo de conclure avec un accent catégorique : « Je vous parie, moi, 50 000 FCFA à récupérer dans ma boutique, que si vous poussez vos recherches, vous vous rendrez compte qu’il y a deux voire trois fois plus de divorces résultant du mariage exogame que du mariage endogame. » Des propos de Massa Solo forgés dans le moule de la conviction et qui n’ont guère besoin d’être interprétés. Un discours qui montre à quel point le mariage endogame a encore de beaux jours à vivre dans notre société.

 

Fatoumata Boba Doumbia, Siguéta Salimata Dembélé et 2MT

 Source: Les Échos- Mali

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