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Le Mali est-il en train de prendre rendez-vous avec l’Histoire autrement que par les urnes ?

Avril 2017, plus de cinq ans déjà…
Occupation des 2/3 du pays en 2012 par des forces indépendantistes et djihadistes ; Accord pour la paix signé en 2015 après des mois de pourparlers ; attentats terroristes ; recrudescence des attaques contre les populations ; heurts intercommunautaires ; émergence de mouvements éthnicisés armés ou non armés ; non-réinstallation de l’autorité de l’Etat dans certaines régions septentrionales ; conférence d’entente nationale fin mars 2017 qui laisse présager la création de commissions de suivi en copié-collé de celles mises en place pour veiller à l’application de l’Accord pour la paix…

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Avril 2017, les gens tirent la sonnette d’alarme
Ils n’en peuvent plus que la difficulté de leurs réalités quotidiennes soit occultée par la difficulté à résoudre la crise sécuritaire. Pendant que certains vivent de plats bien garnis, les autres tentent de faire bouillir la marmite du soir. Pendant qu’une minorité mange, grossit, se fait soigner dans les cliniques privées ou en Occident, et roule en 4×4 rutilants, trop de gens n’ont pas accès à l’électricité, trop de gens font la queue devant les points d’eau en ville et en brousse, trop de gens voient leurs petits mourir car ils n’ont pu payer les médicaments qui les auraient sauvés.
Pendant que les enfants des uns étudient dans les écoles privées, les écoles d’autres sont fermées depuis des années. Pendant que les enfants des uns partent faire des études à l’étranger, les enfants des autres partent à travers les sables pour un voyage qui se termine trop souvent au fond de la mer. Pendant que les enfants des uns obtiennent des postes qu’ils ne méritent pas, les enfants des autres confient leur avenir aux trafiquants qui sévissent partout dans le pays.
Face à la détresse de l’immense majorité des populations, les beaux discours des uns, et l’absence de propositions d’alternatives socio-économiques concrètes de la part de ceux de «l’opposition». Des grèves, des marches, le ras-le-bol se généralise, le ras-le-bol s’installe. Le fatalisme semble disparaître. Des voix citoyennes grondent en ville, en brousse, sur les réseaux sociaux. Malgré le coût du crédit et la mauvaise qualité des communications téléphoniques, malgré la lenteur de la connexion à l’internet, l’information circule, la gronde enfle. Le citoyen lambda exprime son mécontentement face à l’injustice sociale que l’immense majorité subit.
Les gens se mobilisent contre l’immobilité de l’Etat. Un peuple qui ne peut ni manger à sa faim ni être soigné est un peuple qui n’a plus grand-chose à perdre. La gronde enfle et commence à souffler lentement sur les braises sur lesquelles le Mali est assis depuis trop longtemps. Les gens sont fatigués des conférences et rencontres de «haut niveau» qui se succèdent sans que rien ne change pour eux. Les gens sont fatigués des revendications des groupes armés, et des avantages qu’ils obtiennent.
Les gens sont fatigués, car, du sud au nord et de l’est à l’ouest du Mali, ils souffrent tous des mêmes maux pour les mêmes raisons. Les gens veulent du concret, du concret pour que leurs réalités quotidiennes changent, pour que la réalité quotidienne de TOUS change. Les Maliens sont patients, très patients, mais l’Histoire a montré que lorsque le point de non retour est atteint, les Maliens savent se révolter.
La situation socio-économique est telle aujourd’hui qu’il ne serait pas étonnant qu’à terme, le Mali prenne à nouveau rendez-vous avec l’Histoire autrement que par les urnes.
Françoise WASSERVOGEL

Source: Le Reporter

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