De l’achat de l’avion présidentiel à l’achat d’équipement militaire pour l’armée malienne en passant par la sulfureuse affaire d’acquissions des pick-up, les tracteurs, l’engrais frelaté … Le régime de Ibrahim Boubacar Keita s’est abonné tout au long de son mandat aux magouilles, détournements de deniers publics et aux surfacturations.
En cinq ans de mandat, le régime IBK présente un tableau peu réjouissant à matière de gouvernance. En effet, les scandales financiers se sont multipliés et sont restés impunis. Cela en dépit des promesses du candidat IBK qui jurait de mener une lutte implacable contre la corruption et la délinquance financière. Celui-ci avait été plébiscité par une large majorité de ses concitoyens. Ceux-ci voyaient en lui, presque le messie, avec à l’esprit, certainement l’image du IBK, ce premier ministre rigoureux qu’ils avaient connu entre 1994 et 2000. Mais, très vite après son accession au pouvoir, les espoirs s’affaissent, le doute plane avant de faire place au désespoir total.
En effet, les Maliens ont découvert dans les premiers actes de « l’Homme de la situation » des signes évidents de rupture entre son discours électoraliste et la réalité. Le peuple découvre un régime corrompu avec des scandales à répétitions,
Des scandales en cascades
Les affaires opaques les plus emblématiques restent celles liées à l’achat de l’avion présidentiel, acquis à la suite d’un montage financier opaque de type mafieux mêlant sociétés-écrans et hommes d’affaires douteux, Hors de toute inscription budgétaire, 20 milliards de francs CFA ont été sortis des caisses de l’Etat pour acquérir un Boeing 737 non encore immatriculé au nom du Mali, alors même que le pays dispose d’un avion présidentiel (Boeing 727) en bon état et dont l’assurance contractée auprès de l’assureur londonien, Allianz, avait été renouvelée jusqu’en 2015. Le FMI (Fonds monétaire international) et la Banque mondiale étaient sortis de leur réserve pour exprimer leur mécontentement. Le Bureau du Vérificateur général a été commis par le FMI pour auditer cette affaire, ainsi que la section des comptes de la Cour suprême par le gouvernement malien. Les rapports de ces deux structures de contrôle sont accablants des surfacturations comprises entre 29 milliards et 38 milliards sont décelées. Pis, aujourd’hui encore, nul ne sait si l’avion appartient au Mali.
Au même moment, était révélée aux Maliens et au monde entier la nature d’un marché de gré à gré de 69 milliards de FCFA attribué, en violation des règles des marchés publics, à un proche de la famille présidentielle, Sidi Mohamed Kagnassy, directeur général de la société Guo-Star Sarl et promu aussitôt conseiller spécial du président. Avec l’avenant, le marché a finalement porté sur 108 milliards de FCFA. Le fait que le marché soit attribué de gré à gré est un piétinement flagrant des principes élémentaires de passation de marché public. Pire, dans le même contrat, les Maliens apprendront que le ministre des Finances, Mme Fily Bouaré, a couvert ce marché par une garantie de 100 milliards de francs CFA. Des personnalités, avaient profité de ces affaires pour se sucrer en se livrant à des surfacturations dont seules les Républiques bananières ont le secret.
Bien d’autres marchés de ce genre existent, surfacturés et couverts par l’impunité. En avril 2016, le gouvernement a remis au MOC (Mécanisme opérationnel de coordination) 42 véhicules destinés aux patrouilles mixtes. La presse a rapporté que lesdits véhicules ont coûté à l’État 2, 300 milliards de FCFA, soit plus de 50 millions l’unité. Le Parena (Parti pour la renaissance) a publiquement critiqué ce marché et sollicité l’intervention des pouvoirs publics pour sauver l’argent public. En vain!
Après l’affaire de l’avion présidentiel et des équipements militaires surfacturés, le Malien lambda était loin de s’imaginer qu’un autre scandale, portant lui aussi sur des milliards de FCFA, éclaterait. Ce énième scandale portait sur une soixantaine de milliards F CFA destinés à l’achat de l’engrais pour les paysans, sous forme de prêts à rembourser dès la fin des récoltes dans les opérations de développement rural.
C’est un minuscule GIE (Groupement d’intérêt économique) qui était chargé de l’attribution, à travers un avis d’appel fort douteux, de ce gros et juteux marché à des fournisseurs, parfois sans foi ni loi. Il a fallu qu’un concurrent mécontent crache dans la soupe, en soumettant au test de conformité l’engrais d’un rival à un laboratoire de la place, pour que le pot aux roses soit découvert et que la vérité commence à être étalée sur la place publique. Le président de la République a promis la fermeté dans ce dossier, au cours de la session du Conseil supérieur de l’agriculture qu’il a présidée le 16 mai 2016. L’opinion a longtemps attendu sa réaction. En vain.
L’impunité encourageant de nouvelles atteintes à la morale publique, une nouvelle affaire dite « des 1000 tracteurs » a été révélée à l’opinion malienne par le Parti pour la renaissance nationale (Parena) qui, après investigations, est parvenu à la conclusion que la passation dudit marché n’a pas respecté les règles régissant le code des marchés publics. Selon le Parena, il y a eu une procédure irrégulière et frauduleuse de gré à gré déguisé, un délit d’initié et des surfacturations qui ont fait perdre à l’État plusieurs milliards de francs CFA.
Un autre scandale qui a éclaboussé le mandat d’IBK : l’attribution des 1552 logements sociaux de Tabacoro, dans laquelle il a été orchestré une véritable magouille à ciel ouvert. En plus des ministres de la République et des cadres de l’administration, le ministre de l’Habitat de l’époque Dramane Dembélé a distribué des villas « sociales » à la famille de l’ancien Premier ministre Modibo Kéïta. Ainsi, sous IBK, le Mali est entré dans une nouvelle ère des logements sociaux. Désormais, tous les bénéficiaires doivent avoir un caractère particulier : être militant ou sympathisant d’un parti de la mouvance présidentielle, ou avoir un lien avec un président ou un membre des institutions de la République.
Détournement de ressources publiques destinées à l’armée
En février 2018, la Cour suprême avait condamné l’Etat à payer plus de 20 milliards de FCFA à un fournisseur de l’armée cet achat de matériel militaire à une société malienne, ainsi que l’acquisition d’un avion présidentiel pour 40 millions de dollars, tous deux sans appel d’offres, avaient valu en 2014 au Mali des sanctions des institutions financières. Comme si cela ne suffisait pas, un autre se scandale pointe à l’horizon. En effet, lors d’une conférence de presse le mercredi 25 avril dernièr, le Parti pour la renaissance nationale (Parena) a fait état de détournements et de magouilles à grande échelle dans l’achat d’hélicoptère et d’avions de combat pour l’armée malienne.
Les Maliens “ont le devoir de s’interroger sur la vraie destination des centaines de milliards votés par l’Assemblée nationale pour mettre l’armée dans les conditions” pour faire face à la menace djihadiste, a déclaré Tiébilé Dramé, président du Parena, en référence à la loi quinquennale de programmation militaire adoptée en 2015, d’un montant de 1.230 milliards de FCFA (1,875 milliard d’euros). Ainsi, dans un document étoffé, le leader du Parena s’est en particulier interrogé sur l’exécution d’un contrat signé en juin 2015 au salon du Bourget (France) avec l’entreprise brésilienne Embraer pour la vente de six avions de combat A-29 Super Tucano.
La société s’apprête “à livrer quatre appareils”, a-t-il indiqué, ajoutant : “Où sont donc passés les deux autres avions?”. Il a également dénoncé les conditions d’achat de deux hélicoptères Super Puma, dont un d’occasion, en espèces. Selon lui, exigeant que le président Ibrahim Boubacar Keita rende publics des rapports attestant de détournements des dépenses militaires. Le rapport a aussi mis en exergue des disfonctionnement au niveau de la formation des pilotes. La formation d’un pilote, selon des experts américains se situe entre 20 et 35 millions de FCFA. Mais, selon le document du Parena, le Mali a signé un contrat de 3,78 milliards de F CFA pour la formation de 15 pilotes. Ce qui fait que la formation de chaque pilote est facturée à 250 millions FCFA…
Les révélations accablantes du vérificateur
Le dernier rapport du Vérificateur général confirme, une fois de plus, l’ampleur du phénomène de la corruption et de la délinquance économique et financière, dans notre pays.
Comme dans les rapports précédents, les vérifications financières au titre de l’année 2017 font également état de graves faits de gestion issus de l’appréciation de la régularité et de la sincérité des transactions financières effectuées par les différentes entités vérifiées, ainsi que du respect des normes, textes législatifs et réglementaires. Ainsi, ont-elles mis en exergue des irrégularités financières d’un montant total de 23,28 milliards de FCFA dont 6,96 milliards de FCFA au titre de la fraude et 16,32 milliards de FCFA au titre de la mauvaise gestion.
En somme, il ressort des deux rapports, une déperdition financière d’un montant total cumulé de 75,75 milliards FCFA, dont 11,55 milliards au titre de la fraude et 64,19 milliards au titre de la mauvaise gestion. Cependant, en 2013-2014, dans son rapport, le vérificateur général était très précis. En deux ans, 153 milliards de francs CFA ont manqué dans les caisses de l’Etat malien à cause de la corruption et de la mauvaise gestion. Par exemple, afin de détourner des centaines de millions de francs CFA, des travailleurs ont fabriqué des faux documents pour justifier des dépenses.
Le vérificateur et son équipe ont découvert également de nouvelles formes de fraudes. Plusieurs services de l’Etat sont concernés. Leur astuce ? Commander par exemple officiellement, sur papier, une machine dernière cri, et à l’arrivée, avec le fournisseur, s’arranger pour réceptionner une machine d’occasion. Cela permet de détourner la différence. Autre procédé pour s’enrichir, plus simple celui-ci : le non reversement au Trésor public des ressources collectées.
Le rapport donne beaucoup d’autres exemples et l’on se rend compte que les délinquants à col blanc sont plus nombreux que jamais au sein de l’administration malienne.
En 2015, lors de son rapport, le Bureau du Vérificateur général (BVG) a effectué des vérifications financières dans des services de différents ministères et autres, relativement à certaines opérations d’exécution budgétaire. Ces vérifications ont mis en lumière plus de 70, 13 milliard de FCFA dont 32,78 milliards de Fcfa par fraude et 35,5 milliards pour mauvaise gestion.
Par sa gestion calamiteuse, le président IBK et ses gouvernements successifs ont conduit le pays au désastre. Conséquence : Les injustices flagrantes, les détournements des biens publics au vu et au su de tous, l’extension de la pauvreté, le chômage des jeunes, ont créé un profond mécontentement du peuple malien.
Mémé Sanogo
Source: L’ Aube