La zone d’opération du Groupe d’autodéfense des Touaregs Imghad et alliés (Gatia) est la plus instable et la plus meurtrière au nord du Mali de nos jours. Les communautés visées sont connues. Des dizaines de crimes sont perpétrées sur tous les axes menant à la Cité des Askia. Gao dont les populations excédées en appellent au gouvernement et s’apprêtent à défendre leur survie.
Des crimes horribles au vu et au su de tous
Il y a un peu plus de 3 mois, sur les antennes d’une radio de la place, à Gao, le général Elhadji Gamou, chef de la milice Gatia, demandait pardon aux populations de la région. Motif : un de ses lieutenants venait de trouver la mort en s’attaquant à un élément d’un mouvement d’autodéfense sédentaire qui venait d’arrêter en flagrant délit ses complices en train de braquer des forains sur la route de Bourem.
Le malheureux est un ex-rebelle intégré à l’armée nationale. Quelques semaines après c’est à Intahaka à mi-chemin de Gossi, que trois éléments du Gatia dont un intégré aux FAMa sont pris en flagrant délit, posant une mine sur la route où passent véhicules des FAMa et bus de passagers voyageurs. Ils sont maîtrisés et lynchés par les populations en colère.
Juillet 2019, le sous-préfet de Gao perdait son épouse, assassinée à bout portant, c’était pour enlever le véhicule qui la transportait, toutes les pistes pointent les mêmes éléments. Dans la nuit de samedi à dimanche dernier, les FAMa arrêtent en flagrant délit cinq braqueurs tous éléments du Gatia, s’apprêtant sur la route de Djebock à torturer et à tuer des forains sédentaires.
Les éléments du Gatia, aidés de leurs congénères intégrés aux FAMa sont les auteurs des 2135 attaques sur les axes menant à Gao, avec 308 meurtres, 46 cas de viols et près de 12 milliards de biens emporté depuis que Elhadji Gamou a élu ses quartiers à Gao. Les rapports de gendarmerie, de la police et ceux des FAMa en font foi.
Gamou en est conscient et certains pensent même que son mouvement ne survit que grâce aux revenus de ces activités criminelles. En effet, aujourd’hui l’escorte de la drogue ne rapporte plus. Sous la pression des Américains, le trafic de stupéfiant bat de l’aile dans cette partie du Sahel. Tous ceux qui s’enrichissaient de cette activité se retrouvent soit au chômage, soit en prison tantôt partent voir ailleurs.
La bombance de l’âge d’or de la cocaïne est bien terminée. Les potentats locaux ne peuvent plus prendre la charge des pistoleros qu’ils engageaient. La milice Gatia retourne donc à ses anciennes amours : sous couvert de défense du Mali, terroriser et exproprier les communautés laborieuses. Dans cette entreprise sans lendemain se trouvent des intégrés dans l’armée nationale, qui servent de passeurs et de couverture aux check-points à leurs complices.
Le héros Gamou : un mensonge qui a montré ses limites
On se rappelle que la propagande des médias français avait fait de cet officier un héros, après qu’il ait séjourné au Niger lors de l’occupation du Nord du Mali par le MNLA et les troupes d’Iyad Ag Ghaly et ses alliés jihadistes. Gamou ayant rallié les séparatistes pour vite se raviser qu’Iyad, rancunier, ne l’absoudrait pas de sa “trahison”. La frontière la plus proche étant celle du Niger, ce que beaucoup de nos concitoyens avaient pris alors comme un sauvetage de soldats maliens n’était en réalité qu’un ticket pour entrer sur le territoire nigérien et y trouver refuge.
Venir en compagnie de soldats d’un pays frère était une très bonne intention qui ouvrirait à la fois les cœurs des Maliens et les frontières nigériennes, tout en effaçant le doute que pouvait avoir les compagnons d’arme. C’était bien beau si la propagande de RFI et de France 24 n’avait pas trahi le plan des stratèges français qui se cachait derrière Gamou. L’utiliser lui et sa milice pour déstabiliser et terroriser durablement les populations restées fidèles à l’unité du pays.
Les médias français n’ont à cette époque jamais bien parlé de ceux qui agissaient en bien pour le Mali. Bien au contraire, ils ouvrirent leurs antennes pour proclamer l’indépendance de la république imaginaire et couvrir par leur bruit les cris de détresse des populations qu’on amputait et violait. Subitement, ils se trouvent d’amour pour “un officier loyal, héros qui œuvre aux côtés du Mali”.
C’était sans compter sur la mémoire encore vive pour des événements tout encore très récents : Gamou avait été choisi et armé par ATT face à l’agitation meurtrière des Iyad, Bahanga et Fagaga dans l’Adrar des Ifoghas. Au lieu de combattre les récalcitrants d’alors, Gamou, alors colonel, retourne ses armes contre les communautés peules de Fafa, en conflits avec les Imghad, sa communauté.
Les pillages et assassinats qui en avaient suivi ont marqué d’un signe de fer les rapports entre ces communautés qui, aujourd’hui encore, se combattent et se regardent en chiens de faïence. Aujourd’hui, personne ne peut dire la seule guerre que le général-héros a mené honnêtement ou a gagné pour le Mali. Mais notre pays est tombé sous le charme d’une propagande interne et externe savamment menée avec des moyens dont les Maliens ignorent la provenance.
L’étau se resserre sur le Gatia
Aujourd’hui les crimes du Gatia sont connus et reconnus par tous les acteurs sur le terrain. La police malienne dont certaines hautes autorités les couvrent, la gendarmerie impuissante, l’Armée désabusée et trahie et les forces internationales dont le silence en dit long. Sans compter le gouvernement qui se refuse tout commentaire, abandonnant à leur sort des populations qui se défendent comme elles peuvent contre des hommes armés à qui on a tacitement confié leur sécurité et qui les haïssent mortellement.
Mais Gamou sait que les enquêtes de terrains se multiplient depuis que 7 militaires des FAMa ont été arrêtés soi-disant pour avoir participé au lynchage des poseurs de mines de Intahaka. Il sait aussi que les populations locales préparent la riposte aux crimes de son mouvement. Conscient de ce fait, le chef du Gatia déclare dans une audio sciemment distillée par ses partisans qu’il irait “sécuriser” Gao et Ménaka. Beaucoup parmi les populations en rient, tellement elles connaissent la couleur de la “sécurisation” des éléments de Gamou.
Des complicités dans la haute administration
Très forts dans la manipulation de masse et avec des subterfuges insoupçonnés et savamment calculés, Gamou et ses communicateurs tentent encore de berner. Ne pouvant montrer aucune victoire gagnée au nom du Mali ou même une simple bataille menée résolument, ils s’investissent dans la communication à outrance. Mais ici la communication ne peut vaincre l’information donnée par votre serviteur.
Mais les agissements de Gamou sont couverts par des hommes acquis à sa cause et tapis dans l’administration aussi bien militaire que politique. Les officiers courageux qui tentent de s’opposer à ses jeux criminels contre notre pays sont soit mutés ailleurs soit victimes d’attentat.
En tout état de cause, c’est aux autorités maliennes de prendre leur responsabilité. Les populations excédées peuvent réagir pour protéger leurs vies et leurs biens, et, le sang innocent tombe toujours sur ceux qui, ayant les moyens de mettre fin aux crimes, ont fermé les yeux parce que n’ayant ni enfants ni femmes dans les contrées concernées. Nous reviendrons sur d’autres révélations sur les crimes au nord du Mali, les réseaux et ceux qui en profitent.
A suivre…
Ali M DIARRA
Source: La Lettre du Mali