Au moment où les sociétés exploitatrices d’or au Mali commencent les négociations sur les différentes conventions collectives du secteur, un lanceur d’alerte anonyme lève le voile sur le vrai visage d’un ancien baron de l’exploitation d’or au Mali : Philippe Liétard. Ce qu’on apprend suffit amplement pour justifier le plan d’assainissement drastique proposé par les experts nationaux dans le nouveau code minier.
Le cycle des négociations sur les conventions collectives du secteur minier a commencé le week-end dernier, si les choses ne trainent pas trop longtemps, il sera bouclé au bout de trois à quatre semaines, confie une source proche du dossier.
Les experts de l’Etat malien sont en face d’opérateurs qui ne voulaient pas entendre desdits
documents et avaient tout fait pour décourager l’Etat. C’est donc peine perdue. Le gouvernement s’est adjugé le service d’anciens hauts responsables des multinationales qui exploitent l’or au Mali.
C’est dire que la partie ne sera du tout facile. Et c’est dans ce contexte, qu’un lanceur d’alerte anonyme vient de lever le voile sur les pratiques pas très orthodoxes d’un ancien baron du secteur au Mali, le Français Philipe Liétard, un ancien de la Banque mondiale, qui a crée Randgold, riche des informations
économiques sur le sous-sol malien et la mauvaise santé des finances nationales.
Au départ Commençons par le commencement. En 1985, la mine d’or de Kalana, est la première mine industrielle mise en service au Mali alors que dès 1981, le pays, fortement endetté, doit mettre en place des plans d’ajustement structurel (Pas) pour obtenir de nouveaux prêts de la part des institutions financières.
Sous les injonctions de la Banque mondiale, le régime d’alors, qui n’avait vraiment pas le choix, accepte cette mise en place décrite comme “heurtée” et jusqu’aux années 1990, l’économie malienne
reste fortement administrée. Mais ces prêts stériles (car ils servent surtout à rembourser les emprunts
précédents) provoquent une explosion du stock de la dette, qui passe à 2467 millions de dollars
américains en 1990.
La Banque mondiale a imposé le Plan d’ajustement structurel aux pays africains surtout francophones pour libéraliser ce secteur stratégique et limiter la participation de l’Etat dans les compagnies
d’exploitation pour enfin de compte prendre le contrôle des économies nationales.
L’un des patrons de la Banque mondiale, le Français Philippe Liétard à l’époque directeur énergie,
mine et eau démissionne de son poste pour créer Randgold. Au courant donc des choses, Philippe
Liétard s’associe à AngloGold pour prendre la mine d’or de Syama, puis celle de Morila avec comme
répartition des actions 40 % pour Randgold, 40 % pour AngloGold et 20 % pour l’Etat malien.
On connait la suite. AngloGold va prendre Sadiola en joint-venture avec IamGold et la participation de
la Banque mondiale via sa structure ISF, la Société financière internationale et Randgold prendra à lui seul la mine de Loulo.
Mais, au lieu de créer deux mines, Randgold, qui s’est spécialisée dans l’exploitation des mines d’or
principalement au Mali, contourne la loi pour en faire une seule mine et la vend ensuite à Barrick en
septembre 2018 pour 6,5 milliards de dollars, en échange d’actions.
Aujourd’hui, le Complexe minier de Loulo-Gounkoto est un des plus grands du genre dans le
monde, et s‘est élargi avec la super fosse de Gounkoto et le nouveau gisement satellite de
Baboto qui viennent s’ajouter aux mines souterraines de Yaléa et de Gara.
2e producteur mondial d’or Lors d’une conférence de presse sur le site, Mark Bristow, directeur
exécutif, a affirmé que la mine a fait un record de performance enregistré en 2017 et a réalisé un bon début d’année alors que les prévisions de teneur étaient des plus basses et que les ingénieurs
espéraient une augmentation de la teneur et de la production pour le reste de l’année afin d’atteindre
l’objectif de 690 000 onces pour 2018.
Le Complexe Loulo-Gounkoto représente de nos jours le plus gros investissement étranger dans
l’économie malienne et Randgold continue de rechercher l’extension de la vie des gisements connus aussi bien que la découverte de nouveaux gisements dans son
large portefeuille de titres miniers
au Mali.
Pour l’année 2022, Barrick Gold a annoncé des objectifs de production d’or de 637 à 700 000 onces à Loulo-Gounkoto, la plus grande mine d’or du Mali et devient le deuxième producteur mondial d’or,
avec une production d’or attribuable de 4,14 millions d’onces sur l’ensemble de ses opérations, incluant une contribution de 547 000 onces du complexe aurifère malien Loulo-Gounkoto.
Selon les calculs de l’Agence Ecofin, la production totale grimpe à 683750 onces, grâce à l’intégration de la participation de 20 % de l’Etat malien dans la mine.
Le nouveau code minier sera l’ultime occasion de séparer le bon grain de l’ivraie, de faire en sorte
que l’or brille pour les Maliens d’abord.
O. Bakel
Le Focus