Une première rencontre tenue secrète jusqu’à la dernière minute. Emmanuel Macron et Giorgia Meloni se sont vus en catimini, dimanche 23 octobre, à 20 heures, dans une suite privée de l’hôtel Villa Agrippina Gran Melia, sur les hauteurs de Rome. La nouvelle cheffe du gouvernement italien est arrivée par une porte de service, accompagnée d’une petite délégation, quand Emmanuel Macron était entouré d’une vingtaine de personnes.

Comme s’il n’avait rien d’une évidence, ce tête-à-tête entre la dirigeante d’extrême droite et le libéral proeuropéen a duré une bonne heure, s’est tenu à l’écart des caméras et « en marge », dit-on à l’Elysée, d’une conférence de la communauté de Sant’Egidio, à laquelle le chef d’Etat participait en fin d’après-midi. Il venait de prononcer une ode à la paix et à l’universalisme kantien devant 2 500 personnes : « La paix est impure », a-t-il assuré, en expliquant qu’elle suppose « un pas vers l’autre », même en direction de « l’ennemi », dans le contexte de la guerre en Ukraine.

Jusqu’à ce que la cheffe du gouvernement italien quitte le palais Chigi pour le rejoindre, Emmanuel Macron feignait d’ignorer, publiquement, l’invitation qui lui était faite. Les proches de Giorgia Meloni avaient ébruité l’imminence d’une entrevue, sans confirmation de l’Elysée, où l’on mettait en avant des contraintes de protocole, avant une audience avec le pape, lundi. La mise en scène de ce faux suspense avait débuté il y a plusieurs jours, à Paris, jusqu’à la prestation de serment plaçant Emmanuel Macron au pied du mur. Il se trouve être, ainsi, le premier chef d’Etat à s’entretenir à Rome avec la leader postfasciste.

Embarras et prudence de l’Elysée

Signe d’embarras, la rencontre n’a donné lieu à aucune photo officielle côté français. Seul un cliché des deux responsables politiques, face à face dans la nuit, a été diffusé par le compte Twitter du président de la République. « En Européens, en pays voisins, en peuples amis, avec l’Italie nous devrons poursuivre tout le travail engagé », a-t-il commenté. Autour du chef de l’Etat, on évoquait une discussion « franche et exigeante », en attendant de juger Giorgia Meloni « sur les actes ». « Les relations entre l’Italie et la France sont plus importantes que celles de leurs dirigeants », a réagi Emmanuel Macron auprès d’une agence de presse italienne.

La prudence de l’Elysée contraste avec la satisfaction de l’entourage de Meloni, où l’on se félicite de « paroles finalement encourageantes de la part des Français ». « Cela devait être un café rapide et cela s’est transformé en une longue conversation cordiale, avec une nette convergence de vue sur les principaux dossiers européens », se réjouit un de ses proches. Un communiqué de la présidence du conseil affirmait, dans la foulée, que les deux dirigeants ont convenu de s’accorder au niveau européen, dans le respect de leurs « intérêts nationaux réciproques ». Ils ont évoqué la crise énergétique, la défense, la conjoncture économique, le contrôle des flux migratoires et le soutien à l’Ukraine.