A Monsieur le Directeur de Publication de
« Le Reporter ».
Monsieur le Directeur de Publication,
Au titre de mon droit de réponse, par respect pour vos lecteurs, je vous prie de bien vouloir publier cet éclairage.
Dans un article publié le mardi 17 novembre 2015 dans votre journal « Le Reporter », précisément dans le numéro 179, intitulé « avocats du régime et conseils contre l’Etat », Monsieur Boubacar SOW, s’est livré à un véritable travail de démolition à mon endroit.
Vous m’aviez jusqu’ici gratifié d’un abonnement gratuit à votre journal, sans doute en contrepartie de conseils juridiques (amicaux et gratuits) avisés de prudence et de respect des règles applicables en matière de presse que je n’ai eu de cesse de vous prodiguer. Il est vrai que c’est le plus souvent que je lis des pamphlets dans vos colonnes invectivant, injuriant et diffamant d’honnêtes citoyens à tour de bras, sans la moindre retenue, sans le moindre esprit de responsabilités, en usant d’arguments bilieux et gluants consistant à jeter en pâture leur réputation.
Cette forme de lâcheté qui consiste à profiter d’une « plume » et d’un « papier » pour s’arroger le droit d’insulter pour s’assurer une notoriété fangeuse sur quiconque a le malheur de ne pas avoir les mêmes fréquentations et de ne pas partager les mêmes opinions.. Du reste, alors même que je traverse une douloureuse épreuve personnelle et familiale en ce moment, j’ai accepté, strictement par respect pour vos lecteurs qui ont, eux, droit à une saine information que je me suis résolu, après avoir longtemps hésité entre mépris et indifférence de répondre à cette farce plumitive, plus militante que journalistique au service de commanditaires tapis dans l’ombre.
Après avoir évoqué : « le pillage des ressources économiques et financières qui n’a rien à envier à la Ndrangheta Calabraise, à la Cosa Nostra Sicilienne, à la qainte couronne unie des Pouilles, à la Camora napolitaine, à la Brastsva russe, au Milieu ( mafia Corse) », pour mieux assurer l’amalgame, Monsieur SOW écrit à mon égard en des termes peu amènes que je serai, en tant que avocat, en situation de conflit d’intérêts puisque représentant des clients opposés dans le cadre de procédures contre l’Etat du Mali, par-devant un tribunal arbitral, tout en étant par ailleurs le défenseur du régime (sic) et du Président Ibrahima Boubacar Keita dans une affaire qui le concerne personnellement en France.
Tout cela pourrait prêter à sourire si ce n’était pas si dramatique pour la pratique, le style et le niveau journalistiques dans notre pays pour ceux qui s’adonnent à ce genre d’exercie. Monsieur SOW qui en est adepte, utilise des concepts dont il n’a manifestement pas la maitrise. Il parle de conflit d’intérêt avec l’Etat. C’est à se demander s’il sait ce que recouvrent exactement l’un et l’autre terme. Pour sa gouverne, et au risque de lui déplaire et d’apparaître comme il m’affuble, celui qui sait tout et absolument tout, je me hasarderai à clarifier ce concept.
Pour le sens commun, le conflit d’intérêts est synonyme de magouille ou de corruption. Il ne s’accorde pas avec la confiance.
Dans la vie publique et politique, il est considéré comme une déviance de nature à discréditer les fondements du régime démocratique, sachant que la confiance du citoyen dans l’Etat et dans la probité de ses représentants et serviteurs est la base du système.
Si dans la vie publique, la prévention du conflit d’intérêts, son contrôle, sa répression, voire tout simplement sa définition demeurent encore en chantier, cette question a été abordée il y a déjà bien longtemps par les avocats, pour qui la définition du conflit d’intérêts et son traitement sont bien établis :
« L’avocat ne peut être ni le conseil ni le représentant ou le défenseur de plus d’un client dans une même affaire s’il y a conflit entre les intérêts de ses clients ou, sauf accord des parties, s’il existe un risque sérieux d’un tel conflit.
Sauf accord écrit des parties, il s’abstient de s’occuper des affaires de tous les clients concernés lorsque surgit un conflit d’intérêt, lorsque le secret professionnel risque d’être violé ou lorsque son indépendance risque de ne plus être entière ».
Il ne peut donc accepter l’affaire d’un nouveau client si le secret des informations communiquées par un ancien client risque d’être violé ou lorsque la connaissance par l’avocat des affaires de l’ancien client favoriserait le nouveau client.
C’est la définition singulière du conflit d’intérêt de l’avocat.
En conséquence, le conflit d’intérêt s’appréhende non seulement de manière statique (existence d’un conflit apparent) mais également de manière dynamique (risque de conflit).
Dans le cas de l’espèce, je n’ai jamais été l’avocat de l’Etat encore moins du Régime. J’ai été désigné par le Président Ibrahima Boubacar KEITA (qui m’honore de son amitié fort appréciable, en plus des liens de cousinage qui nous lient par ailleurs et au réel), jamais pour porter plainte contre qui que ce soit, mais pour réunir un pool d’avocats afin de lui exprimer une opinion éclairée au sujet des incidences de cet article de presse du journal « Le Monde » qui l’avait évoqué. Mais auparavant, j’ai occupé en tant que avocat, par Monsieur Cesse KOME et la société Koira Techno Telecom dont il est l’Administrateur. Pour mémoire, je suis l’avocat de M KOME depuis près de (15) quinze ans aujourd’hui. KOIRA et KOME ont été irrégulièrement exclues du processus de la 3ème licence de téléphonie globale par le pouvoir de transition tandis que le Président IBK n’était même pas assuré d’arriver au pouvoir et d’être le chef de l’Etat qu’il est aujourd’hui. A la demande de M KOME, j’ai saisi la Chambre de Commerce Internationale en vue d’installer un tribunal arbitral, ce qui a été fait. Les deux affaires n’ont donc aucun lien. D’un côté, une procédure arbitrale qui a débuté en 2013 et de l’autre, une consultation au sujet d’un article de presse en 2014. L’avocat défend son client, mais il ne compte pas qu’un client et sa clientèle est évolutive : de nouveaux clients s’ajoutent aux présents, et d’anciens clients peuvent migrer vers d’autres avocats. L’avocat peut ainsi être le défenseur de nouveaux clients, dont les intérêts sont opposés à d’anciens clients. Mais le souci d’éviter le conflit d’intérêt reste au coeur de ses interventions dans chaque nouvelle affaire où il est sollicité. L’avocat s’inscrit dans le rapport de loyauté qu’il doit entretenir à l’égard de son client et, plus généralement à l’égard de la justice, à laquelle il contribue en qualité d’auxiliaire.
Monsieur Boubacar SOW qui se targue de faire partie de cette belle profession de journaliste devrait pourtant le savoir. Comme il devrait savoir que « l’Etat ce n’est pas IBK » même s’il en est le plus haut représentant aujourd’hui. L’Etat et ses démembrements dans une démocratie sont des concepts impersonnels et détachables de la personne même des gouvernants et du chef de l’Etat auxquels ils survivent. Les hommes passent les Institutions demeurent.
Or, évoqué comme le fait Monsieur SOW dans son article, une supposée affaire personnelle du Président de la République pour le mettre en rapport avec l’existence d’un contentieux dans lequel l’Etat du Mali est partie prenante et en conclure l’existence d’un conflit d’intérêt, constitue non seulement la preuve d’une absence totale d’Esprit d’analyse mais surtout, l’attitude qui l’accompagne est alors dramatiquement révélatrice d’une paresse intellectuelle (si tant il faut parler d’intellectuel pour des pamphlets de niveau scolaire, d’une plume tenue par un sombre personnage se voulant illustre).
Au Mali, la presse est libre. Elle est libre de parler de tout. Elle est libre de parler de l’opinion et des agissements politiques ou sociaux d’une personne, même si celle-ci ne le souhaite pas. Elle est libre de porter un jugement sur un fait social, un fait politique, un évènement, un produit, un spectacle ou un service sans le consentement de la personne concernée ou qui est évoquée, du fabricant, du producteur ou du prestataire… Mais si l’on pense qu’il est parfaitement normal que l’on dénonce un homme politique corrompu ou une entreprise, que l’on critique une personne dans ses agissements, et bien il faut aussi accepter cette règle lorsqu’elle vient à toucher un journaliste dans l’exercice de sa profession. Monsieur SOW étale tout le long de son article une insolente désinvolture qui, non seulement n’honore pas votre journal mais frise l’incompétence et l’amateurisme.
Il y a de nombreux garde-fous à ce genre de pratiques. Le délit de diffamation qui interdit à un éditeur de publier de fausses accusations envers un individu ou une personne morale. Rajoutez à cela que la déontologie des journalistes impose de fines règles telles que l’intégrité, l’équité, la vérification des faits, l’objectivité et l’analyse préalable des faits, toutes choses qui échappent vraiment à l’auteur de l’article, objet de mon droit de réponse.
L’ensemble des propos contenus dans ce torchon est de nature diffamatoire et injurieux.
Cependant, je ne ferai pas à Monsieur SOW, le plaisir d’un procès en diffamation car à mes yeux, ce sont des journalistes qui méritent de telles procédures judiciaires.
En tous les cas pas pour le moment.
Veuillez agréer, Monsieur le Directeur l’expression de mes sentiments distingués.
Mamadou I Konate
source : La Rédaction