Le grand hôtel de Bamako a abrité ce samedi 1er octobre 2022 une rencontre de Conversations citoyennes sous le thème « Le Mali à la recherche d’une identité politique ». Initiée par l’Observatoire citoyen sur la gouvernance et la sécurité (OCGS), cette rencontre avait comme panéliste, Moussa MARA, ancien Premier ministre ; Dr Mariame SIDIBÉ, Chercheure ; et Assétou Founé SAMAKÉ MIGAN, ancienne ministre.
Selon les initiateurs, cette rencontre, « Conversations citoyennes », est un espace qui se veut être un lieu de réflexion et d’échange utile et enrichissant pour appréhender des situations complexes dans des contextes volatiles.
Les débats du jour qui ont porté sur « Le Mali à la quête d’une identité politique » se voulaient un cadre de réflexion collective sur le Mali de demain.
Cette rencontre qui s’est tenue au lendemain du récent coup d’Etat au Burkina Faso a été une occasion de porter un regard global sur l’instabilité politique et sécuritaire qui caractérise la région du Sahel.
Aussi, dans une dynamique de refondation dans notre pays, au-delà de son caractère institutionnel, il s’agit pour l’OCGS de faire en sorte que les citoyens s’approprient ce processus à travers l’organisation des débats du genre.
Dans son propos, l’ancien Premier ministre a souligné que dans notre pays, la responsabilité publique est considérée par les élites comme un moyen de réalisation personnelle, clanique, familiale. D’où la recrudescence des coups d’Etat dans la sous-région.
Selon lui, il y a des aspects structurels caractérisés par un faible accès de la majorité des populations aux ressources naturelles. Cette instabilité est également le signe d’une remise en cause de la gouvernance politique, le rapport entre l’Etat et les citoyens.
« Il n’est plus possible aujourd’hui de gouverner dans nos pays comme par le passé. Il va falloir composer avec des sociétés civiles impliquées et revendicatives », a-t-il tranché.
Il a expliqué que la gouvernance s’est caractérisée par le manque de vertu des leaders politiques dans l’action publique qui se traduit, dit-il, par la prévarication, la fraude, l’enrichissement inexpliqué. Une gouvernance où l’élite ne donne plus l’exemple.
Par ailleurs, souligne-t-il, nos États sont centralisés avec des rapports de violence et non de collaboration avec le citoyen. D’où l’origine de l’instabilité.
Pour Assétou Founé SAMAKÉ MIGAN, ancienne ministre, nous sortons d’une certaine glaciation politique avec des scènes de rupture.
Selon elle, il y a une dichotomie dans nos pays : d’un côté l’élite qui comprend ce qui se passe et de l’autre côté la grande masse qui suit.
« La question du sens et de la cohérence est importante en matière de politique. », a affirmé Assetou F. SAMAKE.
Elle a dénoncé le mimétisme des élites politiques qui ne parviennent pas à saisir et comprendre l’évolution de nos populations. En plus des scènes de rupture, nos Etats font face à l’obscurantisme religieux.
Pour elle, nous avons des systèmes éducatifs démodés où les possibilités de comprendre ce qui se passe fait défaut à tous les niveaux.
« Les populations sont assez fatiguées. On ne peut rien faire avec des peuples en détresse », a-t-elle dit.
Aussi, elle estime que le débat sur la laïcité chez nous est un faux débat.
« Nous devons plutôt réfléchir à comment prendre notre multiculturalisme, ethnique pour en faire une idéologie qui concerne et inclut tout le monde », a-t-elle affirmée.
Selon elle, la société civile a le devoir d’expliquer le sujet politique, faire comprendre ce qui le dépasse.
« Quand vous avez des Organisations de la société civile inféodées aux partis politiques, c’est un échec », a-t-elle décrié.
Parlant de refondation, l’ancienne ministre pense que nous avons plutôt besoin des partis politiques forts pour apporter le changement.
« Les Maliens et même les partenaires du Mali se demandent pourquoi on n’avance pas. La réponse est pourtant simple : parce que tout le monde fait semblant. Parce qu’au-delà des belles paroles, il y a très peu de patriotisme dans ce pays », a lancé l’ancienne ministre.
De son côté, Dr Mariam SIDIBÉ, trouve que dans les hautes sphères de l’Etat, voire au sein de la classe politique, personne ne veut ouvrir les yeux sur les vrais problèmes du pays. Entre les deux, a-t-elle fait savoir, il y a ce peuple dont une partie s’est déjà transformée en une « brigade d’acclamation ».
«La question principale qu’il faut se poser, c’est quel modèle de citoyen nous voulons ou avons-nous besoin ? Sans quoi nous serons toujours dans des: plus de Dialogue national, plus d’Assises », a asséné Dr Mariam SIDIBÉ, qui ajoute que «Tout commence par le formation de l’individu ».
Par Abdoulaye OUATTARA
Source : Info-Matin