Aux dires des notables de Sabalibougou situé 1.5 km de l’Hôpital du Mali– à ne pas confondre avec Sabalibougou en C VI -de petits malins tenteraient en ce moment d’usurper la chefferie traditionnelle et bénéficient, pour cela de complicité. Interview de Yacouba Keïta, un des Conseillers du chef de quartier.
Le Sphinx : Est-il vrai qu’il existe ici un problème de chefferie traditionnelle ? Si oui, pouvez-vous nous en dire davantage ?
Yacouba Keïta : Oui, il existe ici un problème de cette nature ! Voilà : Il est de coutume chez nous les Keïta, d’élire en notre sein le chef coutumier. C’est une tradition. Il revenait à mes aînés à moi d’occuper la chefferie. Mais puisqu’il s’avère qu’au moment des faits, tous ceux-ci n’étaient présents au Mali, la famille a donc confié ses responsabilités à un autre, à savoir, feu Daouda Traoré. Et lorsque nos autres frères sont arrivés au pays, ils ont eu la sagesse de le laisser continuer à assumer les responsabilités que nous lui avions momentanément confiées. Question d’éviter tout litige susceptible de naître d’éventuelles frustrations.
Je rappelle qu’au moment de son investiture, il n’y avait à Sabalibougou que quatre familles. L’on constate aujourd’hui que la localité s’est agrandie. Aujourd’hui, Daouda Traoré est décédé (Paix à son âme). Après les obsèques, nous nous sommes réunis et on a convenu d’introniser l’aîné des Keïta et par surcroit le plus autochtone des anciens de la localité.
Et quand ce dernier a été élu, le sieur Amadou Traoré, un ancien maire très fortuné, possédant de nombreuses relations politiques et aidé en cela par les héritiers de feu Daouda Traoré, a contesté la décision. Nul parmi eux ne s’est rappelé des conditions dans lesquelles feu Daouda Traoré a été investi. Et puisqu’ils sont riches et influents, ils tentent aujourd’hui, par tous les moyens d’usurper la chefferie. Il s’avère qu’Amadou Traoré est cité dans de nombreux cas de spéculations foncières à Sabalibougou. Et il aspire à devenir chef coutumier dans le but de poursuivre ses œuvres.
- Mais dans quelles conditions peut-il hériter de ce poste et avec qui manigance-t-il ?
Je signale qu’il ne remplit aucune condition pour devenir chef coutumier à fortiori conseiller du chef de quartier. Aucune ! Nous connaissons bien son défunt père. Il arrivé ici en tant que marabout et a bénéficié du respect et de la considération des premiers habitants. Mais de là à prétendre devenir chef coutumier ! C’est le défunt Daouda Traoré qui a demandé et obtenu à être accompagné par certains de ses proches, le temps de son mandat intérimaire. Mais dans les faits, nul parmi eux n’est éligible.
- Qui, selon vous et à l’heure actuelle, est le véritable Chef de quartier de Sabalibougou ?
Suite au décès de feu Daouda Traoré, et conformément à la tradition, c’est Seydou Keïta qui a été investi. Ce sont les notabilités les plus respectables qui l’ont choisi pour être non seulement l’aîné, mais aussi le plus autochtones des natifs de Sabalibougou. Le choix porté sur lui a fait l’unanimité. Une décision que conteste l’autre camp qui estime, au demeurant que l’argent peut tout régler.
- Aviez-vous approché les autorités compétentes en vue de leur soumettre la question ?
Je signale qu’avant la mise en place de Seydou Keïta, nous avions adressé une correspondance au sous-préfet lequel nous a envoyé un accusé de réception en bonne et due forme. Et lorsque nous avions procédé à la mise en place, nous avions encore adressé des lettres au sous-préfet, au préfet et au Maire. Tous ont attesté avoir reçu le document. C’est par la suite et lorsque Amadou Traoré et les siens ont intervenu que nous avions reçu une autre correspondance des mêmes autorités et du sous-préfet en l’occurrence, nous invitant à procéder à Kalanbacoro à la mise en place de notre chef coutumier. Incompréhensible !
Aujourd’hui âgé de plus de 70 ans, je n’ai jamais entendu ou vu pareille chose. Ça, c’est une trahison ! Nous à Sabalibougou, nous ne reconnaissons qu’un seul chef coutumier : c’est celui que nous avions régulièrement mis en place, à savoir Seydou Keïta ! Nous en restons-là. Nous nous sommes entretenus avec le commandant de cercle lequel nous a invités à poursuivre nos activités. Il n’a rien ajouté d’autre.
Je dois dire qu’auparavant, Amadou Traoré a fait appel à des personnes extérieures qui sont venues nous menacer avec des armes. Nous avions alors immédiatement appelé le sous-préfet afin qu’il prenne les dispositions qui s’imposent. Mais on n’a vu personne. Nous pensons, très logiquement que le sous-préfet aurait dû prendre les dispositions après avoir reçu l’alerte. Son silence s’est avéré pour nous, très instructif. Pour notre part, nous nous sommes appliqués à calmer nos jeunes afin d’éviter l’affrontement. Je précise que les agresseurs en question sont étrangers à Sabalibougou. Nous ne les connaissons pas parce qu’ils viennent d’ailleurs.
Qu’est-ce que les autorités disent à propos de Seydou Keïta ?
Elles nous ont juste adressé une décharge par rapport à la correspondance que nous leur avions adressée. Rien d’autre ! Nous avions également joint d’autres responsables pour leur expliquer les faits et surtout évoquer les agissements d’Amadou Traoré. Je signale, en passant, qu’il a été déjà été convoqué par le tribunal à propos d’une affaire portant sur plus de 100 millions F CFA relative à un cas de spéculation foncière… Dites, un tel individu peut-il devenir chef coutumier ? Aussi, il est jeune, très jeune par rapport à ses aînés. Les autorités gardent en tout cas et à l’heure actuelle, le silence.
Quel message avez-vous à transmettre à ces autorités ?
Je rappelle que le Préfet nous autorisé à mener nos activités. Mais nous ne sommes pas tranquilles en voyant toutes ces agitations. Nous avions même rencontré Madame la Gouverneure. Il nous a rassurés à propos du Préfet, un homme intègre selon elle.
Propos recueillis par A. Dramé
Encadré
«Qu’on nous laisse en paix»
Tahirou Keïta est lui aussi notable de Sabalibougou. Il a tenu à apporter ces précisions :
Je confirme tous les propos de Yacouba. J’ajoute cependant ceci : aux sacrifices du 40ème jour du défunt Daouda Traoré, toutes les notabilités de Sabalibougou ont pris part. Ce qui est tout à fait normal. Mais sur place, nous avions compris qu’il se manigançait quelque chose. L’on nous a informés qu’un nouveau chef coutumier nous allait être présenté. Et pourtant, c’est à nous qu’il revenait de choisir le chef en question.
Ils ont alors fait appel à une centaine de jeunes d’une localité, (Dourakoro à l’est de Sabalibougou)… Et c’est là qu’ils ont fait habiller de blanc un certain Abdoul Wahab en prélude à son investiture. On était naturellement surpris. S’en est suivi un incident. Et tout le monde est reparti sans attendre le repas. Après ces échauffourées, Abdoul Wahab ne s’est plus manifesté.
En réaction, on a organisé une grande réunion à l’Ecole de Sabalibougou pour faire toute l’historique de la chefferie. Etaient présents, le maire délégué, les notabilités et non moins témoins. Sur place, on a mis une commission de Sages sur place. Et nous avions adressé une correspondance au préfet pour lui rendre compte de la situation et surtout, notre opposition. Nous avions également joint le sous-préfet de Kati. Toutes les autorités compétentes ont été informées. C’est dans le pur respect de la tradition que Seydou Traoré a été investi.
Ce qui nous a choqués, c’est que dans l’émission de télévision «Notre cité en marche», nous avions été surpris de voir Amadou Traoré intervenir en qualité de chef de quartier par intérim de Sabalibougou. Nous respectons les autorités, mais pas au point de les laisser nous imposer nos responsables. Non, non et non !
Nous avons un message à faire passer : qu’ils nous laissent en paix !
Source: Le sphynx