Après le lancement de leur livre, il y a un an, Choguel Kokalla MAIGA et Issiaka SINKARE sont revenus sur des chapitres dudit bouquin qui font toujours l’actualité, le samedi 29 juin, à la faveur d’une conférence de presse. Dans une complicité très bien cadencée, les deux écrivains ont accusé la communauté internationale d’être en partie responsable du glissement de l’insécurité du nord vers le centre du Mali. « Rébellions au nord du Mali des origines à nos jours », est l’intitulé du livre co-écrit par le premier responsable du MPR et Issiaka SINKARE lancé il y a un an. Lors du 1er anniversaire dudit livre, les deux écrivains étaient face à la presse, ce samedi 29 juin 2019, à la Maison de la presse.
Démission collective
À cette occasion, Choguel et son co-auteur sont revenus sur des chapitres qui collent à l’actualité du pays, notamment la crise dans le nord qui s’est glissé vers le Centre. L’histoire de cette crise est tronquée par de nombreux non-dits, des contre-vérités, a déclaré le conférencier. Pire encore, des faits sont sciemment dissimulés au peuple. Ni l’État malien, ni les mouvements armés encore moins la communauté internationale ne jouent clairs dans la gestion de cette crise pour la stabilité du pays, a estimé M. MAIGA. Une situation assimilable à une démission collective
Pour lui, la communauté internationale n’est pas franche avec le Mali pour l’avoir obligé à discuter avec des séparatistes défaits et qui s’étaient exilés au Burkina Faso notamment.
« La Communauté internationale a créé un sanctuaire à Kidal. C’est qui ce a donné de nouveau souffle à des mouvements armés comme le MNLA qui n’était plus une force politique ni une force militaire et à des éléments de Ançar-dine qui était déclaré organisation terroriste internationale », a expliqué le président du MPR.
Aussi, pour avoir la mainmise sur la région de Kidal et de couvrir des éléments des mouvements séparatistes pour lesquels elle a beaucoup de sympathie, la France a tout fait pour empêcher la force d’attente de la CEDEAO forte de 3000 hommes d’intervenir au Mali au motif que cet effectif est disproportionné par rapport 500 rebelles.
Le Sabotage de la France
« Elle a saboté puis bloqué le processus de la CEDEAO », a dénoncé M. MAIGA, précisant que des officiels français, à l’image d’Alain Juppé, n’ont jamais cessé de plaider pour l’octroi de l’autonomie à des séparatistes.
Ainsi, la sincérité de la France au Mali dans la gestion de crise est mise en doute par le conférencier voire de façon générale la communauté internationale. Pour lui, comme la France, la communauté internationale n’a pas cessé de couvrir les rebelles. Pour preuve, en 2015, le Gatia a été empêché par la MINUSMA de prendre Ménaka de même que l’armée malienne a été exclue de Kidal.
« (..) Et chaque fois que les forces séparatistes se sont retrouvées en difficulté, ce sont les forces internationales qui sont venues à leur recours pour organiser la défaite de l’armée malienne », s’est-il attristé. Curieusement, a-t-il décrié, au lieu de venir aider le gouvernement malien, la communauté internationale est venue perpétuer la rébellion, l’insécurité tout en jouant aux pompiers pyromanes. Et par leur faute, la situation s’est déplacée du nord vers le centre du pays parce que c’est une partie des éléments terroristes qu’elle protégeait qui est en train de terroriser la population dans le centre du pays, depuis 2015, a-t-il accusé.
Accord en catimini
Quant à l’État malien, il a été obligé de signer des accords qui l’interdisent de rentrer à Kidal, mais aussi par sa naïveté, il a laissé du terrain et le pouvoir à des mouvements armés. En effet, en juin 2016, le gouvernement, en catimini, a signé un document pour donner le pouvoir politique à des mouvements armés. Ce qu’ils n’ont pas pu obtenir par la négociation par les armes leur a été donné sur un plateau d’argent par le gouvernement malien, s’est indigné Choguel Kokalla MAIGA.
« Un Premier ministre et deux ministres se sont organisés pour négocier un document appelé entente sur les autorités intérimaires qui n’a été discuté par aucune institution où ils ont trahi la confiance du président et celle du peuple. C’est ce document qui a servi de base pour dissoudre des conseils de cercles dans toutes les régions du nord pour les remplacer par les personnes désignées par les mouvements armés et le gouvernement », a révélé M. MAIGA.
Parlant de l’accord pour la paix, selon Choguel, quatre ans après sa signature, c’est un échec total. Car soutient-il, aucun des objectifs de l’accord n’a été atteint. La paix n’est pas revenue. Le territoire n’est pas conquis et la réconciliation n’est pas à l’ordre du jour. Donc, l’accord a échoué sur toute la ligne, s’est lamenté.
« Il y a une impérieuse nécessite de réécrire cet accord, de reprendre cet accord afin de l’adapter aux intérêts supérieurs de la nation au lieu de nous rabâcher chaque fois de la mise en œuvre de l’accord. Pour le 4e anniversaire de l’accord, personne n’a pu faire le bilan », a préconisé le responsable politique malien.
L’autosaisine de la France
De son côté, le Pr Issiaka SINKARE a déploré la piètre capacité de négociation des représentants de l’État malien lors des pourparlers en Algérie. Ils ont été dans l’incapacité de préparer des contre-propositions au texte de l’accord pour la paix.
« C’est la CEDEAO qui a remis aux représentants de l’État malien ses contre-propositions de plus 10 pages. Ils ont également trainé avec ce texte jusqu’à l’épuisement du temps qui a été donné à cet effet. Donc, l’État malien n’a pas pu donner à temps ses contre-propositions », a confessé le Pr SINKARE. De révélation en révélation, il a affirmé que contrairement à beaucoup d’informations, ce n’est pas Dioncounda Traoré qui a rédigé la fameuse lettre d’appel au soutien de la France au Mali en 2012. C’est plutôt, l’ambassadeur français de l’époque, au Mali, qui en a rédigé. Autant dire, selon le conférencier, contrairement à ce qu’elle fait croire aux yeux des Maliens et de la communauté internationale, c’est la France qui s’est autosaisi, pour intervenir militairement au Mali, brandissant une lettre du président de la transition, rédigée par ses diplomates à Bamako. Pour confirmer cette version du conférencier, certains participants ont même mis au défi, quiconque qui pourrait retrouver, dans les archives du Mali, la copie de cette lettre.
Par Sikou BAH
Info Matin