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« C’est possible au Mali », les antidotes de Mamadou Igor Diarra au chaos du Mali

Le nouveau livre de Mamadou Igor Diarra (Cherche midi) a ceci d’intéressant qu’il s’agit d’un livre témoignage- mais pas que- qui lève le voile sur sa part de gestion du pouvoir, qu’il a eu la chance d’exercer en tant que ministres (Energie, eau et mines et économie et finances) sous ATT et sous IBK. Au-delà des mises au point et clarifications sur des affaires le concernant, il fait un diagnostic un rien sévère de l’état actuel du Mali qu’il juge grave et propose ses antidotes avant le chaos. Une radiographie de ce qu’est devenu le Mali.

D’abord, son histoire personnelle est un rien exceptionnelle. Lui qui est né dans la neige de l’Ukraine d’une mère ukrainienne se retrouve sur la terre aride du Mali de son père Cheik Oumar Diarra, ingénieur en aviation, étudie et dévient un cadre de banque qui sera rapidement l’homme des missions difficiles, à qui le président Amadou Toumani Touré fera appel pour lui confier le portefeuille de l’énergie et de l’eau, en 2008. Ainsi, on apprend dans le livre d’Igor qu’au-delà des reformes qui ont conduit à une séparation du secteur de l’eau et de l’électricité, le financement du projet de la station de pompage de Kabala fut bouclé sous ATT ainsi que celui du projet Taoussa.

La jeunesse, moteur du changement

On y apprend aussi que le président Keïta lui a fait appel, en janvier 2015, pour redresser l’économie d’un pays en guerre et surtout en froid avec les partenaires impressionnés par les affaires d’achat de l’avion présidentiel et du marché des armements, avant qu’il refuse le poste de ministre du développement industriel. Une fin de mission problématique riche en enseignements dont l’un des plus importants est que « certaines responsabilités nécessitent la droiture, la vigueur et l’audace de la jeunesse. » Il plaide pour une implication des jeunes, talentueux, dans la gestion de l’administration, de l’Etat.

Il puise dans le passé des exemples de jeunes dirigeants comme Soundjata, Ngolo Diarra, Askia Mohamed….qui étaient jeune quand ils arrivaient au pouvoir, faisant ainsi écho à ce qu’écrivait Ismaïla Samba Traoré dans la préface à son roman Les Amants de l’esclaverie « les jeunes ont toujours été à la base des mutations sociales en Afrique précoloniale », et leur révolte « est une constante dans les récits fondateurs du Sahel ». La jeunesse doit être au cœur des actions, du changement d’esprit. Surtout qu’elle se politise de plus en plus, n’est plus complexée et s’exprime sur tous les sujets sur les réseaux sociaux.

« Fossé vertigineux »

Les maux du Mali sont profonds : un Etat construit sur le modèle jacobin de l’Etat français, la démocratie, « souvent identifiée au droit de faire n’importe quoi » qui « traça sa voie dans un certain désordre », des institutions empruntées à l’histoire européenne créant ainsi des difficultés structurelles, ressources limitées de l’Etat, l’environnement entravant la capacité à diriger efficacement.

Son explication de l’effondrement de l’Etat en 2012 ? « Un seul me semble clair : ces bouleversements révèlent le fossé vertigineux qui sépare le Mali d’en haut à celui d’en bas, au point d’engloutir dans un scepticisme généralisé les indubitables avancées du pays dans la période qui précède. Combler ce gouffre persistant est une urgence absolue. D’un côté, une jeunesse en colère et sans boussole, de l’autre, un Etat atteint de surdité, et le chaos peut ressurgir à tout moment. », écrit-il.

Pour Igor, l’environnement dans lequel sont les gouvernants entrave leur capacité à gérer efficacement. Les limites vont du manque d’argent aux revendications catégorielles, du fait religieux à la dispersion des moyens et des missions en passant par celles du temps et de l’environnement.

« Ces sept limites non exhaustives, écrit-il, je les ai concrètement expérimentées et elles ont fait naître en moi une certitude : il est temps que le pouvoir se débarrasse de ses habits de cérémonie, de plus en plus dérisoire ; il est temps qu’il comprenne ses limites et les gère positivement ; il est temps pour lui d’enfiler sa tenue de travail ; il est grand temps qu’à la dévotion aux Excellences se substitue la mobilisation des excellents. »

Mais le premier remède qu’il propose est le travail à faire sur nous-mêmes, notamment en changeant nos comportements, nous débarrasser de la nyengoya dont parle Alioune Ifra N’Diaye dans On ne nait pas Banyengo, on le devient. C’est donc un appel du pied que Mamadou Igor Diarra lance à la jeunesse, au peuple d’un pays qui est à la croisée des chemins où il est impossible de ne pas choisir. Une seule question vient à l’esprit en refermant ce livre : Mamadou Igor Diarra est-il candidat à la fonction de président ?

BS

Le Pays

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