Le président élu Roch Marc Christian Kaboré devra relever de nombreux défis après son investiture. Outre les promesses de campagne, M. Kaboré devra se lancer dans la reforme de l’armée et laisser la justice gérer les dossiers des assassinats de Thomas Sankara, de Norbert Zongo et d’autres victimes du régime Compaoré.
Interrogé par Jeune Afrique après sa victoire dès le premier tour avec un bon écart devant son principal rival Zéphirin Diabré de l’Union pour le changement (Upc) -, le président élu du Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré qui a compéti comme candidat du Mouvement du peuple pour le progrès(Mpp) a été clair : «Ma priorité est de remettre le Burkina au travail. Nous avons fait une insurrection et tout le monde est conscient que l’ancien système politique était gangrené par différents maux. Nous devons veiller à ce que la bonne gouvernance et la réduction du train de vie de l’État soient aussi des priorités, afin de montrer la volonté de changement comportemental des dirigeants. Pour pouvoir demander des efforts aux autres, il faut commencer par la tête. Nous travaillerons également à une nouvelle Constitution de rupture pour passer à une cinquième République», a souligné Roch Marc Christian Kaboré.
Mettre en place un Burkina nouveau
A la question de savoir si sa victoire est une revanche personnelle vis-à-vis de Blaise Compaoré et de son clan, Roch marc Christian Kaboré répond : «Pas du tout. Nous n’avons pas l’esprit revanchard. Nous avons créé le Mpp parce que nous étions en rupture sur le plan de la vision et de l’orientation politique du parti au pouvoir(…) Nous avons tranquillement continué notre travail politique. Cette campagne n’a pas été une campagne opposée à Blaise Compaoré. Il a fini son travail, il a apporté ce qu’il devait apporter, et aujourd’hui il n’est plus là. Maintenant, à nous de mettre notre pierre à l’édifice(…) Un travail pour mettre en place un Burkina nouveau.» Blaise Compaoré avait été contraint à la démission par une insurrection populaire le vendredi 31 octobre 2014. Blaise Compaoré et son épouse Chantal Comparé ont pu trouver refuge en Côte d’Ivoire.
Avant de d’indiquer qu’«il faudra rapidement répondre aux préoccupations de notre peuple dans tous les domaines : la santé, l’école, l’université, l’habitat, l’énergie… Toutes ces questions sont prioritaires et des urgences doivent être traitées dans l’ensemble de ces secteurs », a-t-il ajouté, conscient de la responsabilité l’attend demain. Au sujet d’un éventuel gouvernement d’union nationale, M. Kaboré veut jouer franc- jeu : «Nous travaillerons avec ceux qui ont participé à l’insurrection populaire avec nous. Il est évident que nous sommes nombreux et que tout le monde ne pourra être membre du gouvernement. Mais chacun, à différents niveaux, pourra participer à l’œuvre collective, dont l’objectif est d’apporter un véritable changement dans notre pays».
L’armée à l’écart des dossiers politiques ?
Installée mardi par le président de la transition Michel Kafando, la commission de la réforme des armées est composée de vingt membres, tous militaires, et devra présenter ses conclusions d’ici juin 2016. Elle est chargée de formuler des propositions pour que l’armée se tienne à l’écart des dossiers politiques au Burkina. Il est question d’«Interdire définitivement l’implication du militaire dans la politique », a souligné Michel Kafando. C’est le principal objectif de la commission de réforme de l’armée. Secrétaire général du ministère burkinabé de la Défense, le colonel-major Allassane Moné a la charge de présider cette commission. «Il s’agit de travaux qui seront basés sur de grandes orientations, notamment sur l’interdiction définitive de l’implication du militaire dans la politique, le renforcement de la responsabilité et le renforcement de la bonne gouvernance », a-t-il souligné.
Poursuivant ses propos, le colonel-major Allassane Moné rappelle que «Les forces armées ont connu des épisodes sombres marqués par un certain nombre de mutineries caractérisées par des actes d’indisciplines, de violences, d’une extrême gravité quelquefois. Enfin, nous voulons que l’armée retrouve sa mission régalienne et républicaine qui consiste à la défense du territoire et à l’appui à la sécurité nationale.» Cette commission est composée uniquement d’officiers militaires et de généraux. Mais, le colonel-major Allassane Moné a précisé que «la commission peut faire appel à toute autre personne en cas de besoin. La commission pourrait faire appel à des personnes ressources extérieures à notre département ministériel sur le plan national ou sur le plan international.» La composition de cette commission ne rassure pas la société civile burkinabé qui penche pour l’organisation des états généraux impliquant des civils. Surtout après le coup d’Etat manqué du général Gilbert Diendéré récemment inculpé dans le dossier Thomas Sankara.
Edmond Kamguia K.
Source: La Nouvelle Expression