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Au nord du Mali, les rebelles affaiblis face aux djihadistes

Le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, filiale d’Al-Qaida au Sahel, s’est félicité du ralliement d’un chef séparatiste. Un cas isolé ou le début d’une hémorragie ?


Après avoir été chassés, en novembre 2023, de leur fief de Kidal par l’armée régulière et les mercenaires russes de Wagner, les rebelles du nord du Mali sont-ils en train de perdre du terrain face aux djihadistes ? Dans un communiqué daté du lundi 11 mars et diffusé sur les réseaux sociaux, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), s’est félicité du ralliement d’un chef séparatiste, Houssein Ghoulam, présenté par la filiale d’Al-Qaida au Sahel comme un « commandant militaire chevronné » et un « homme aux positions honorables ».

D’après le Cadre stratégique permanent pour la paix et le développement (CSP), l’organe regroupant les mouvements rebelles majoritairement touareg et arabes opposés à la junte malienne au pouvoir et contre qui cette dernière a provoqué une reprise des hostilités en août 2023, Houssein Ghoulam n’est pas vraiment un combattant de premier plan. Mais la défection du chef militaire du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), l’un des groupes membres du CSP, dans le camp des djihadistes commandés par le chef terroriste malien Iyad Ag Ghali, interroge : est-elle un cas isolé ou le début d’une hémorragie ?

Au sein des groupes rebelles comme chez les diplomates occidentaux et les sources sécuritaires maliennes, les avis divergent. Le ralliement d’Houssein Ghoulam est assurément « un coup de pub que s’offrent les djihadistes dans l’objectif de montrer qu’ils sont en position de force au Nord, contrairement aux groupes rebelles qui peinent à se remobiliser depuis leur défaite à Kidal », analyse une source sécuritaire malienne, à Bamako. « Le grand gagnant de l’histoire, c’est le GSIM. Beaucoup de gens ayant quitté Kidal ont rejoint Iyad [Ag Ghali] pour chercher sa protection », abonde une source sécuritaire ouest-africaine.

Lutte contre l’Etat central
Mi-novembre 2023, la ville du nord du Mali, fief de toutes les rebellions touareg depuis l’indépendance du pays en 1960, a été reprise sans combats par la junte et le groupe de sécurité privé russe Wagner. Scellant ainsi la défaite du CSP au terme de trois mois d’affrontements autour de la récupération des bases militaires de la Mission des nations unies au Mali (Minusma).

Depuis la fin de l’opération de reconquête du nord du Mali lancée par la junte à l’été 2023, qui avait rompu un cessez-le-feu maintenu tant bien que mal par l’accord de paix d’Alger signé en 2015 par l’Etat et les groupes rebelles indépendantistes, le GSIM a perpétré plus de 290 attaques ayant entraîné la mort de près de 530 personnes, selon l’ONG Acled. Les deux tiers d’entre elles ont été menées au centre et au sud du pays, menaçant de plus en plus la capitale, Bamako, d’encerclement.

La junte, elle, ne fait plus de distinction entre les djihadistes du GSIM et les rebelles du CSP, les qualifiant tous de terroristes alliés dans leur lutte contre l’Etat central. Le 8 mars, le ministère de l’économie a ainsi annoncé par voie de communiqué avoir inscrit sur une « liste nationale de sanctions financières » Alghabass Ag Intalla, Bilal Ag Acherif, Fahad Ag Almahoud et Achafagui Ag Bouhada, quatre chefs du CSP, accusés d’avoir commis des « actes de terrorisme ». A leur côté, le djihadiste Iyad Ag Ghali et son plus fidèle lieutenant, Amadou Koufa.

Fin novembre 2023, Alghabass Ag Intalla, Bilal Ag Acherif et cinq autres chefs rebelles signataires de l’accord de paix d’Alger avaient été poursuivis par la cour d’appel de Bamako pour « association ayant pour but de semer la terreur, de porter atteinte à l’unité nationale, à l’intégrité du territoire et à ternir l’image des forces armées maliennes » en collaboration avec le GSIM. Les rebelles, eux, n’ont de cesse de réfuter toute collusion avec le groupe de Iyad Ag Ghali.

« Il n’y a plus de troisième voie possible »
L’acte final de la rupture avec Bamako a été posé le 25 janvier par le régime militaire. Le ministre de l’administration territoriale et porte-parole du gouvernement de transition, le lieutenant-colonel Abdoulaye Maïga, avait annoncé d’un ton martial sur les antennes de la télévision nationale la « fin avec effet immédiat » de l’accord de paix d’Alger, suite au « changement de posture de certains groupes signataires (…) devenus des acteurs terroristes ». Conséquence de cette rupture : les autorités intérimaires mises en place dans le nord du Mali en vertu de l’accord d’Alger ont été démises par le gouvernement de transition lors du conseil des ministres du 13 mars.

« Le régime militaire considère désormais qu’au Nord, les groupes armés sont, soit dans son camp, soit terroriste. Il n’y a plus de troisième voie possible. C’est une stratégie contreproductive », déplore un diplomate occidental à Bamako, craignant que ce « mauvais calcul » pousse des rebelles dans les bras des djihadistes, découragés de voir une option pacifique de résolution du conflit s’éloigner.

Le monde.fr

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