« Le Parti rappelle qu’il ne peut y avoir de scrutin sans qu’un certain nombre de réformes d’ordre politique et institutionnel soient entamées ». Cette déclaration a été faite par l’honorable Amadou Thiam, président de l’ADP-Maliba, dans un communiqué diffusé le 24 octobre 2018. A lire la déclaration du président de l’ADP-Maliba, l’on a l’impression que ce dernier souhaite que les élections législatives ne se tiennent jamais.
Comment comprendre que le Président de l’ADP-Mali puisse penser que le Mali doit d’abord ouvrir « un dialogue national inclusif portant sur l’ensemble des sujets majeurs de réforme politique, économique, sécuritaire et institutionnelle », avant d’organiser les élections législatives. Surtout, qu’il estime que « ce dialogue doit se concevoir comme étant une étape majeure dans le rétablissement de la confiance entre le citoyen et l’Etat d’une part et entre les acteurs politiques d’autre part ». Avec une telle exigence maximaliste, l’on est en droit de se demander si l’honorable Thiam n’est pas de ceux qui ne veulent plus voir organiser des élections législatives au Mali.
Amadou Thiam, dans son communiqué qui enterre les élections législatives au Mali pour toujours, a indiqué que son parti « suit avec intérêt l’évolution de la situation sociopolitique nationale et tout particulièrement les débats sur le report des élections législatives, initialement prévues pour novembre et décembre 2018 ».
Il y a rappelé au nom de son parti et avec force qu’il « ne peut y avoir de scrutin sans qu’un certain nombre de réformes d’ordre politique et institutionnel soient entamées ». Pire, il présente ces réformes comme des préalables qui ont été longtemps évoqués par son parti. « Afin de pouvoir régler ces préalables longtemps évoqués par l’ADP-Maliba pour la tenue d’élections crédibles, libres, transparentes, équitables et assurant la plus large représentativité des populations dans les instances de décision, notre parti est favorable à un report des élections législatives prévues pour novembre et décembre 2018 ».
Mais, l’on pourrait simplement demander à Amadou Thiam pourquoi son parti a participé à l’élection présidentielle sans avoir attendu que les préalables qui lui tiennent tant à cœur ne soient levés ? Est-ce parce que le parti ADP-Maliba était convaincu que le pouvoir était à terre et qu’il fallait simplement s’abaisser pour le ramasser ? En tout cas, nous nous souvenons que lorsque des acteurs politiques avaient tenté de voir la possibilité de surseoir à l’organisation de la dernière élection présidentielle et travailler à l’amélioration de la sécurité et du dispositif institutionnel, l’ADP-Maliba a été parmi les partis politiques qui se sont opposés à cette idée.
Parce que Amadou Thiam et son mentor, qui fut le candidat malheureux à l’élection présidentielle, étaient convaincus que le peuple malien allait leur confier la destinée du pays. Et, comme ils ont été amèrement déçus de leur échec à ravir le fauteuil présidentiel, ils vont se battre pour que cette assemblée nationale, dans laquelle lui et ses camarades occupent quelques sièges, perdure. N’a-t-il pas raison ? Quand on sait qu’il n’a aucune garantie d’être réélu haut les mains en commune V du district de Bamako ?
Comment des gens qui se disent légalistes et qui se battent pour le changement peuvent-ils de façon maladroite cautionner la reconduction de cette assemblée nationale pour 6 mois ? Et qui sait s’ils ne vont pas se battre pour une prolongation de 12, 18 voire 24 mois, ou même pour l’éternité.
Amadou Thiam devait avoir le courage de dire qu’il ne veut pas des élections législatives au Mali, sachant pertinemment que ses exigences ne pourront jamais être satisfaites, même dans 10 ans. Sinon comment comprendre cette exigence de réformes profondes qui permettront l’enracinement durable de la démocratie au Mali. Surtout qu’il est formel : « ces réformes ne peuvent et ne doivent être le fait d’un camp ou d’une Majorité. Toute réforme majeure doit faire l’objet du consensus le plus large possible ». Mon œil, Amadou Thiam sait pertinemment qu’aucun « consensus » n’est actuellement possible au Mali, à plus forte raison un consensus le plus large possible.
Comment de façon raisonnable, au terme du mandat actuellement de l’Assemblée nationale dont il est membre, Amadou Thiam se réveille brusquement, au nom de son parti, pour poser une condition maximaliste à la ténue des élections du genre : « l’ouverture d’un dialogue national inclusif portant sur l’ensemble des sujets majeurs de réforme politique, économique, sécuritaire et institutionnelle ». Ils savent pertinemment que cela ne sera jamais possible. Est-ce une stratégie pour bloquer le processus ? Et, dans quel intérêt ?
S’il est vraiment convaincu que « ce dialogue doit se concevoir comme étant une étape majeure dans le rétablissement de la confiance entre le citoyen et l’état d’une part et entre les acteurs politiques d’autre part », Amadou Thiam ne devait jamais en faire une condition préalable à la tenue des élections, sachant pertinemment que ces conditions ne seront jamais remplies. Heureusement que des exigences maximalistes de la sorte n’auront pas leur place dans la balance au moment de la prise des décisions finales.
Donc, qu’Amadou Thiam le prenne pour dit : les élections auront belle et bien lieu. S’il veut revenir à l’Assemblée nationale pour un autre mandat, qu’il s’organise dans sa commune pour se faire réélire. Sinon aucun petit jeu ne pourra lui assurer un siège permanent à l’Assemblée nationale. Ce qui est valable pour Amadou Thiam est valable pour un certain nombre de députés qui pensent que les six mois ne vont pas finir. Et que si les six mois venaient à prendre fin, ils allaient s’octroyer un autre bail de 6 mois et ainsi de suite…Pousse-pousse s’arrête au mur.
Assane Koné
Source: Azalai Express