Comme il fallait s’y attendre, le dossier relatif à cette affaire reprend le chemin souhaité et voulu par Me Mohamed Aly Bathily, le Ministre de la justice de notre pays. La chambre d’accusation de la Cour Suprême vient, en effet, d’annuler l’ordonnance de mise en liberté provisoire du prévenu, Idrissa Haïdara, PDG de la société. Mieux, le Contentieux du gouvernement s’est porté partie civile dans l’affaire et réclame la tenue d’un Conseil d’administration extraordinaire pour sonner le glas du PDG. Auparavant, c’est le juge d’instruction qui avait été congédié. Sous les regards des défenseurs des droits de l’Homme!
Le feuilleton judiciaire de l’affaire dite du PMU-Mali se poursuit et se ressemble. Le 27 mai dernier, la Chambre d’accusation de la Cour suprême était appelée à se prononcer sur une requête du Contentieux du gouvernement. Cette requête, faut-il le rappeler, avait trait à l’annulation de la mesure de mise en liberté provisoire du sieur Idrissa Haïdara, PDG de la société, incarcéré depuis le 27 décembre 2013, sans plainte de qui que ce soit.
Il avait fallu attendre le 06 mai 2014 pour que le prévenu recouvre la liberté pour » raisons médicales « . Apparemment, cela ne fut pas du goût de certains, en particulier l’actuel Ministre de la Justice, Me Mohamed Aly Bathily, dont les déclarations radiophoniques ressemblaient à des condamnations. C’est ainsi que curieusement, le Contentieux du gouvernement est sorti de son silence pour pouvoir s’ériger en partie civile. Paraîtrait-il que c’est une femme, mère de famille, qui officie aujourd’hui au Contentieux. Son mari ne serait autre que le » Chef » de la Chambre d’accusation devant siéger dans l’affaire.
Les avocats du prévenu sont en tout cas avertis de la nouvelle attitude du Contentieux. Mme le contentieux exigerait non seulement l’annulation de la mesure de mise en liberté provisoire, mais aussi et surtout, réclamerait la tenue d’un Conseil d’Administration extraordinaire du PMU-Mali pour faire débarquer le PDG-prévenu. Au passage, madame révéla désormais partie civile dans l’affaire d’autant plus qu’elle posséderait des nouveaux éléments à charges. Sa hargne à en finir avec le prévenu sera consolidée par d’autres éléments à charges venant encore du bureau du Vérificateur Général.
Le 27 mai 2014, la Chambre d’accusation siégea comme prévu. Le délibéré était annoncé pour le mardi 2 juin 2014. Dans le Mali d’aujourd’hui, c’est le contraire qui aurait étonné. L’arrêt rendu est allé tout droit dans le sens souhaité par les pouvoirs publics. La mesure de mise en liberté provisoire est annulée. Autrement dit, Mme le Contentieux a eu gain de cause tout comme le Ministre de la Justice, la tutelle.
Acharnement politico-judiciaire
On le sait, le prévenu venait de passer cinq bons mois en prison sans qu’il n’ait été question de » vol ou de détournement » d’argent. Laconiquement, l’opinion publique apprit que l’on parlait de » mauvaises gestions « . Les chiffres claironnés sur les médias se sont effondrés au fil du temps. De 34, l’on est descendu à moins de 3 milliards de F CFA. Et pendant que le PDG séjournait en prison, ni le bureau du Vérificateur général, ni le Contentieux n’avaient osé porter plainte, à fortiori se constituer » parties civiles « . Idem pour la société, PMU-Mali, à capitaux mixtes.
L’Etat, actionnaire majoritaire n’y avait rien vu. Les actionnaires privés n’avaient également rien à reprocher à la gestion du PDG. Pour preuve, les différents Conseils d’Administration de la société n’avaient jamais fustigé sa gestion. Au contraire, c’est un homme comblé, pour avoir donné naissance et rendu services au PMU-Mali qui s’apprêtait à faire valoir ses droits à la retraite.
Dès leur accession au pouvoir, ils commencèrent par jeter l’opprobre sur les régimes précédents alors qu’eux-mêmes étaient bien présents. Par voix de presse, des poursuites judiciaires sont engagées. L’affaire PMU-Mali en était une. Devant les bailleurs de fonds, les plus hautes autorités ne se privèrent pas de porter des accusations. » Mettez-le en prison, on verra après « , semblait-on dire au sommet de l’Etat. Très malade derrière les barreaux pendant que les choses trainent, Idrissa Haïdara finira par réclamer une mesure de mise en liberté provisoire. Histoire de pouvoir se faire soigner.
Malgré les pressions, en l’absence de nouveaux éléments à charges, le juge d’instruction n’hésita pas à lui accorder un tel droit avec l’aval du Parquet. Le juge, un jeune, l’apprendra à ses dépens puisqu’il fut aussitôt muté loin de Bamako, la capitale. Aujourd’hui, les derniers développements de l’affaire ne trompent personne. Et c’est le crédit de la justice malienne qui en pâtit. Incapables de faire face à l’essentiel, les pouvoirs publics ne font qu’exceller dans l’acharnement. C’est le Procureur général, lui-même, qui avait dénoncé l’intrusion de l’actuel Ministre de la Justice dans la conduite de certaines affaires.
Daniel Téssougué avait dénoncé l’interpellation des citoyens par des policiers et gendarmes, sans mandat de justice et curieusement sur instruction du Ministre. Il n’y a pas eu de démenti. La presse a régulièrement rapporté les propos accusateurs du même ministre contre des élus communaux et autres cadres du pays. Pas de démenti encore. Tout cela se déroule sous les regards des défenseurs des droits de l’Homme. L’administration de la justice passerait-elle par régler les comptes ? Politiques et autres ? Mesurerait-on le degré de dépérissement de notre pays ? Ne pourrait-on pas avoir un peu de retenue ? Cet acharnement n’aurait-il pas pour but de dévier les gens sur les carences des tenants du pouvoir ?
B.Koné
SOURCE: Le Malien