Comme annoncé dans notre dernière parution, un procès est ouvert au tribunal de la commune IV entre le propriétaire légal du domaine, et un usurpateur de circonstance. Lundi dernier, où devrait avoir lieu l’ouverture des débats, le procès a été reporté de trois semaines, au 21 mars, non pas pour que les protagonistes apportent chacun le droit de propriété sur la parcelle (notamment la lettre d’attribution), mais que seul l’accusé auquel les lieux sont attribués, apporte le permis d’occuper dont, tout le monde le sait, la livraison est actuellement suspendue. Peut-on autoriser Amady Camara à construire sur la parcelle attribuée à Moussa Coulibaly ? Ou même admettre qu’il se prévale d’un titre de propriété sur la parcelle d’autrui ? A quoi sert ce report alors que la décison de suspension ne sera pas levée ? Lisez plutôt !
Le rappel des faits
L’affaire oppose Moussa Coulibaly, résidant à Sébénikoro depuis 1985 au Colonel de douane à la retraite Amady B. Camara qui se dit propriétaire des lieux, lui qui auparavant avait envoyé à deux reprises un intermédiaire pour négocier l’achat desdits lieux.
Moussa Camara, ouvrier dans le bâtiment, pauvre certes mais honnête, réside à Sébénikoro dès son célibat en 1985 et y vit toujours au même endroit jusqu’à nos jours. Le quartier étant spontané à l’époque, on a procédé à un redressement qui a été finalisé en 1996 et à l’issue duquel Moussa Coulibaly a bénéficié de la parcelle BC/4 sur laquelle il vit avec sa famille par décision du Gouverneur du District de Bamako.
Quand les autorités communales ont initié une mise en valeur, elles ont proposé un redressement au lieu d’un lotissement dans lequel tous les lots seraient rasés et uniformisés. Redressement que les pauvres habitants ont accepté car ne sachant où aller si tout est rasé.
Après la mise en place d’une commission de lotissement, celle-ci a procédé d’abord à un recensement des propriétaires occupant ou non les différentes concessions. Moussa Coulibaly a été recensé sous le n°D231.
Ensuite il y a eu les tracés des routes et des rues. Les lots concernés par les tracés ont été compensés dans une zone réservée au recasement. Certains lots dont les trois quart ont été engloutis par la route ont été tous compensés, sauf ceux dont les propriétaires ont demandé à conserver leur lot en refusant la parcelle de compensation.
En fait à la suite du tracé de la route RN5 et de la rue 565, la concession de Moussa Coulibaly a été amputée du côté Sud par la route RN5 et de l’Ouest par la rue 565 et le voisin de l’Ouest. En revanche, le reste de la concession à l’Est appartenant au sieur Tiémoko Camara, le grand frère à Amady, recensé sous le n°D232 a été ajouté à la concession de Moussa Coulibaly et désigné sous la parcelle BC4. Tiémoko a alors été compensé par la parcelle NN/2 située dans la zone de recasement. Il pouvait s’il le voulait en son temps renoncer à la compensation et conserver le restant de sa concession. Ce qu’il n’a pas jugé utile de faire n’ayant certainement pas vu la valeur qu’aurait ce bout de terrain au futur.
Après le recensement et les tracés, ce fut la démolition. Il a été demandé aux déguerpis de démolir leur maison avant l’arrivée du bulldozer et aussi celles qui maintenant se trouvent chez le nouveau propriétaire sous peine d’en perdre le bénéfice à la fin de tous les travaux de redressement. Autrement dit, le lieu querellé appartient totalement à Moussa, et Amady n’y a plus aucun droit depuis toutes ces années..
Tout fut fini en 1996 avec la décision du gouverneur du district. Mais quatre ans plus tard, en l’an 2000, un certain Amady Camara, se vantant d’être Colonel, ami personnel d’ATT et troisième personnalité de la douane, expert de la CEDEAO, convoque Moussa à la mairie de la commune IV pour revendiquer les lieux dont le sieur Tiémoko Camara était précédemment propriétaire. Il s’est avéré que M. Amady Camara n’est autre que le petit frère de M. Tiémoko Camara, propriétaire légitime et bénéficiaire du lot de compensation NN/2. Doit-on et peut-on indemniser pour une parcelle deux membres d’une même famille ?
En tout cas tout laisse à croire que c’est pour cette raison que les différentes administrations, depuis sous Feu Bocoum en passant par Issa N’Guindo et Moussa Mara jusqu’à ce jour, ont refusé d’indemniser le Colonel.
En effet, à l’issue de cette confrontation, le Chargé de l’affaire Issa Guindo, 2ème adjoint du maire pourtant un proche du Colonel a reconnu Moussa comme propriétaire légitime des lieux et l’a fait signifier au Colonel par le sieur Kossa Camara. Celui-ci a contacté Moussa à deux reprises pour négocier l’achat de la partie pour le Colonel. En 2015, alors que l’on pensait tout fini, Amady a commencé à harceler Moussa par ses différentes intrusions dans sa famille, prenant des photos, faisant des tracés bidons, essayant d’établir des documents qui ne résisteront à une expertise pertinente. Il le convoque une deuxième fois à la mairie de la commune IV avec les mêmes résultats de 2000. Enfin il se résout à lui donner une assignation en justice en omettant délibérément d’y joindre les pièces justifiant sa demande.
Le plaignant a-t-il déposé auprès de la Cour des documents d’attribution de parcelle et d’autorisation de construire ? Sinon, sur quoi le Tribunal serait fondé à recevoir la plainte ? Y a-t-il lieu d’un litige entre celui à qui la parcelle est attribuée et un contrevenant avéré ?
Les motifs de la plainte
Voici donc ce que dit en substance par voie d’huissier l’assignation en justice formulée par le Colonel contre Moussa :
” Attendu que le Colonel Amady B. Camara a construit un appartement avec des annexes sur une parcelle attenante à la RN5 à Sébénikoro ;
Que lors des travaux de la route, une partie de la parcelle a été engloutie ;
Que l’autre partie qui aurait dû revenir à Amady B. Camara, a été ajoutée à la parcelle de son voisin, par une décision administrative du Gouverneur du District ;
Que ce voisin, un certain Moussa Coulibaly, perçoit depuis 2001 les loyers de la maison bâtie par Amady B. Camara, pourtant témoin privilégié de cette situation puisqu’ils ont toujours été voisins jusqu’à l’élargissement de la route ;
Que l’Administration ayant refusé d’indemniser Amady B. Camara après l’avoir dépossédé de son bâtiment au profit de Moussa Coulibaly, ce dernier se refuse non seulement à toute réparation d’impenses, mais aussi perçoit les loyers qui lui sont dus ;
– Qu’il y a donc lieu de constater que les loyers perçus par Moussa Coulibaly sur la maison bâtie par Amady B. Camara, reviennent de droit à ce dernier ;
– Que Moussa Coulibaly doit s’obliger à indemniser Amady B. Camara en lui payant la valeur des constructions qu’il exploite indument “.
Où va donc le Mali si de tels brigandages ont cours dans notre société ? Comment peut-on courir derrière des droits qui n’existent point ? Sachant bien que Amady B. Camara n’avait de droit sur la maison que celui de la démolir à temps. A-t-il même oublié que son frère, le véritable propriétaire des lieux avant le redressement, a été compensé par l’Administration par la parcelle NN/2 ? Pourquoi entretient-il le flou ?
Le Colonel en douane en exercice à l’époque, l’expert de la CEDEAO et ami personnel d’ATT à la même époque, peut-il nous faire croire :
– Que lui, supposé avoir rendu de loyaux services au sein de l’Administration, a été dépossédé abusivement de son dû, de surcroît par ses pairs au profit d’un simple ouvrier ?
– Que lui cadre supérieur ne sait pas comment attaquer en temps réel une décision administrative inique ?
Ignore-t-il que Moussa Coulibaly n’est pas le gouverneur du District et n’est qu’un simple bénéficiaire et que seul le coupable doit être puni ?
Sachons raison garder.
Par ailleurs, un voisin est celui à côté duquel on vit tous les jours, or Moussa affirme n’avoir connu le Colonel particulièrement en tant que propriétaire avant la tentative d’usurpation. Aussi, le lot BC/4 étant la propriété de Moussa Coulibaly jusqu’à preuve du contraire (l’annulation de la décision administrative) comment le Colonel peut-il parler d’impenses sur la propriété d’un tiers ? Sait-il de quoi il parle ? D’ailleurs, comment peut-il lever la tête et déclarer avoir construit un appartement avec ses annexes sur une parcelle non lotie, au sort incertain et ne lui appartenant pas ne serait-ce de droit coutumier, sans aucune attestation de vente ? Ne sait-il pas que le lot de Moussa a aussi été diminué d’un côté au profit d’un voisin qui est maintenu et agrandi de l’autre côté par le restant d’un déguerpi qui a été compensé ? Beaucoup d’autres sont dans la même situation. Et alors, devrait-on troubler la quiétude des braves personnes à travers un nouveau redressement, car il y aurait un effet domino certain dans les revendications? Le tribunal pourra-t-il dénier aux nombreux bénéficiaires de terrain leurs propriétés respectives au motif qu’ils n’ont pas de permis de construire alors que cet état de fait est aujourd’hui imputable à l’Etat ? Nous disposons en cas d’une longue liste d’habitations dans cette situation, notamment dans cette zone où personne n’a attendu le permis avant de construire. Tout comme dans les autres ”sozorobougou “.
En tout cas nous ne comprenons pas pourquoi le Tribunal persiste à demander à Moussa d’amener le permis d’occuper et ne demande rien au Colonel qui n’a même pas de lettre d’attribution selon ses propres déclarations. Enfin, Amady devrait aller constater que Moussa a fait ses propres installations en lieu et place de la construction qu’il revendique. Nous estimons que le juge ne manquera pas d’aller y faire un tour et de prendre tous les renseignements sur l’ensemble de la zone.
Affaire à suivre !
Mamadou DABO
Source: Zenith Balé