Chaque semaine, Stéphane Besançon, nutritionniste et directeur de l’ONG Santé Diabète au Mali, présente sa chronique nutrition dans Priorité Santé.
Caroline Paré : Après nous avoir fait découvrir deux céréales le mil et le sorgho, pouvez-vous nous présenter cette autre céréale ancestrale : le fonio ?
Le fonio est une plante herbacée qui mesure en moyenne 80 cm. Cette céréale est principalement cultivée dans 4 pays en Afrique de l’Ouest : le Burkina Faso, la Guinée, le Mali et le Sénégal. Contrairement à beaucoup d’autres céréale, le fonio a la particularité d’avoir un grain minuscule qui mesure à peine 1,5 mm. Il faut donc presque 2 000 graines pour obtenir un simple gramme de fonio. C’est cette petite graine qui doit être décortiquée pour donner un grain de fonio complet ou un grain de fonio blanchi qui pourra être consommée soit sous forme de couscous, de pate que l’on appelle tô ou encore mélangé avec de la pâte d’arachide pour former un plat que l’on appelle le diouga.
Caroline Paré : Est-ce que cette céréale présente une composition intéressante pour la santé ?
Si on analyse la composition globale du fonio blanchi, qui est la forme la plus consommée, on s’aperçoit qu’il est composé à 92% de glucides complexes c’est-à-dire de l’amidon. Cette haute teneur en glucides est proche de celles d’autres céréales comme le mil ou le sorgho par exemple. Mais il est intéressant de noter que, contrairement à de nombreuses autres céréales, le fonio contient très peu de sucres « rapides ». En effet, en comparaison, le riz blanc contient 10 fois plus de sucres rapides, le mil et le sorgho en contiennent 30 à 40 fois plus. Le fonio contient très peu de protéines, de lipides, de vitamines et de minéraux mais en revanche une quantité de fibres 7 fois supérieures à celle du riz. Il faut aussi noter que contrairement à d’autres céréales, le fonio cumule plusieurs caractéristiques qui lui confèrent une digestibilité bien supérieure à de nombreuses autres céréales comme le riz par exemple.
Enfin, le fonio ne contient pas le gluten qui provoque l’intolérance au gluten c’est-à-dire la maladie cœliaque.
Caroline Paré : Est-ce que cette céréale présente d’autres caractéristiques intéressantes ?
Il est souvent dit, en Afrique de l’Ouest, que le fonio est pas un aliment pour lutter contre le diabète. Mais, il faut être très clair : le fonio n’est pas un aliment antidiabétique et ne permet pas de soigner le diabète. En revanche, dans l’alimentation du patient diabétique, il présente des caractéristiques intéressantes par rapport à d’autres céréales comme le riz ou le Mais par exemple. En effet, sa faible teneur en sucres « rapides » et sa forte teneur en amidon permettent au fonio de présenter un index glycémique (l’élévation de la glycémie, c’est-à-dire du taux de sucre dans le sang, suite à l’ingestion d’un aliment) plus faible que celui du riz, du maïs ou du sorgho.
Malgré ceci, il faut bien se rappeler que le fonio coûte quasiment deux fois plus cher au kilogramme que les autres céréales. Il ne faut donc pas que des patients se privent d’une alimentation diversifiée et équilibrée ou d’un achat régulier de leur traitement juste pour se procurer du fonio en espérant un effet miracle sur l’évolution de leur diabète.
Caroline Paré : que conseillez-vous donc à nos auditeurs ?
Je conseille de ne pas avoir une consommation monotone d’une céréale mais de bien diversifier par une consommation régulière de différentes céréales. Ainsi, les caractéristiques nutritionnelles du fonio en font une source de diversification très intéressante. Il faut bien rappeler que la consommation de fonio, comme des autres céréales, ne doit pas dépasser 50% de l’apport calorique journalier soit environ 300 g par jour. Il faut aussi bien rappeler que la composition de la sauce qui accompagne les céréales est très importante. Elle doit contenir beaucoup de légumes et contenir peu de sucre, de sel et de graisses. Pour les personnes intolérantes au gluten, il représente aussi un très bon substitut au blé.
Enfin, il faut bien redire que le fonio n’est pas un aliment antidiabétique et ne doit donc pas être utilisé comme un traitement du diabète.
RFI