Les Sierra-Léonais élisent samedi leur président, avec quatre jours de retard sur le calendrier initial. Ce second tour qui oppose l’héritier du président sortant et le candidat du principal parti d’opposition, arrivé de peu en tête au premier tour, s’annonce très indécis.
Quelque 3,1 millions d’électeurs sont appelés à choisir le successeur du président Ernest Bai Koroma, qui ne pouvait plus se représenter après deux mandats à la tête de ce pays très pauvre d’Afrique de l’Ouest, gangrené par la corruption. Les premiers résultats sont attendus la semaine prochaine.
Au premier tour, le 7 mars, marqué par une participation de plus de 84 %, le peu connu Samura Kamara, homme lige de M. Koroma et candidat de l’APC, le parti au pouvoir, remporte 42,7% des suffrages. Il est devancé par celui du principal parti d’opposition, le SLPP, l’ancien général Julius Maada Bio, avec 43,3% des voix.
Le second tour, entre les deux partis qui se succèdent au pouvoir depuis l’indépendance de cette ancienne colonie britannique en 1961, est programmé pour le 27 mars.
Report du scrutin
Mais alors que la campagne, marquée par des échauffourées entre partisans des deux camps et une montée des tensions ethniques, vit ses dernières heures, les préparatifs du vote sont suspendus le 24 mars par la justice à la suite d’un recours d’un avocat de l’APC.
Malgré le rejet de ce recours lundi, compte tenu du retard pris dans l’organisation du scrutin, la Commission électorale nationale (NEC) réclame et obtient un délai de quatre jours pour tenir le second tour.
M. Bio fait monter la pression en accusant le président Koroma de «pousser la Sierra Leone au bord du chaos» par des manoeuvres dilatoires, mais lui et M. Kamara acceptent finalement de bonne grâce le report du scrutin.
Bon déroulement souhaité
Depuis, tout le pays retient son souffle et espère un vote sans violence, alors que le bon déroulement général du premier tour, qui combinait élections présidentielle, législatives et locales, a été salué par les observateurs internationaux.
«J’aimerais simplement demander aux deux candidats qu’ils expliquent les choses à leurs partisans pour qu’ils restent calmes. Ce dont nous avons besoin, c’est d’avoir des élections pacifiques», a déclaré à l’AFP un commerçant du centre de Freetown, Emmanuel Kalokoh.
Si l’administration sortante a réussi à attirer les investisseurs pour reconstruire le pays, dévasté par la guerre civile (1991-2002) qui a fait quelque 120’000 morts, l’économie reste fragile après les chocs de l’épidémie d’Ebola en 2014-2016 et de la chute des cours mondiaux des matières premières.
«Ce pays a connu la guerre civile. Nous avons aussi eu ce glissement de terrain» (plus de 1000 morts à Freetown en août, ndlr) «donc nous ne voulons plus de bagarre», expliquait un autre commerçant, Mohammed Alpha Bah, espérant «une transition pacifique d’un gouvernement démocratique à un autre», à l’instar de celle qu’a connue le Liberia voisin en janvier.
Réserve de voix décisive
En l’absence de sondages crédibles, tout pronostic sur le vainqueur s’annonce hasardeux. L’issue est d’autant plus incertaine que si le candidat de l’opposition a viré en tête à la présidentielle, l’APC frôle la majorité absolue à l’Assemblée nationale, selon les résultats des législatives, encore partiels, ceux d’une poignée des 132 sièges étant encore attendus.
En outre, les deux nouveaux partis arrivés respectivement troisième et quatrième, cumulant à eux deux près de 10 % des suffrages, soit une réserve de voix décisive pour les deux protagonistes, n’ont pas donné de consigne de vote, malgré les sollicitations des deux camps, selon les médias locaux.
Le futur président et son gouvernement «devraient se focaliser davantage sur l’éducation et venir en aide aux jeunes», estime un enseignant de Freetown, Bawah Kahnu. «Il faudrait aussi améliorer les services de santé. Parce que ces choses-là nous touchent directement», souligne-t-il. (ats/nxp)
Source: 24heures