Dans l’ombre du tumulte régional, une tragédie humaine se déroule loin des projecteurs : de décembre à nos jours, des milliers de réfugiés burkinabè ont trouvé refuge dans le cercle de Koro, fuyant les violences jihadistes qui ravagent des villages du nord du Burkina Faso.
Cette migration forcée révèle une crise humanitaire silencieuse qui mérite l’attention de la communauté nationale et internationale. Aujourd’hui, plus de 50 000 refugiés burkinabè sont dans cette ville en attendant…
Ils n’ont pris avec eux que l’essentiel : leurs enfants, leur foi, et l’espoir que quelque part, de l’autre côté de la frontière, ils seraient en sécurité. Des milliers d’âmes chassées de leurs villages burkinabè par les attaques jihadistes, ont trouvé refuge dans le cercle de Koro, au Mali. Mais ce qu’ils ont trouvé, c’est une autre forme de combat : celui pour la dignité, la survie, l’oubli.
Dans les villages de Koro, les regards sont fatigués, les voix sont basses, chargées de douleurs que les mots peinent à traduire. Oumou, la quarantaine, assise à l’ombre d’un arbre, serre fort la main de sa fille. « Ils sont arrivés à moto. Ils ont tiré. Nous avons couru. Je ne sais même pas si mon mari est encore en vie », s’est indignée Mariam.
Comme elle, des milliers de Burkinabè ont fui l’indicible. Ils ont quitté leurs terres, leurs maisons, leurs souvenirs, pour ne pas mourir. Pour sauver leurs enfants. Mais à Koro, le salut est fragile. Les familles dorment sous des abris de fortune, partagent un repas par jour quand la chance le permet, et attendent, dans le silence d’un monde qui semble avoir tourné la tête.
Les habitants de Koro les accueillent avec ce qu’ils peuvent. Mais comment partager ce qu’on n’a déjà pas ? L’eau est rare, les soins presque inexistants, et les écoles débordent. « On fait ce qu’on peut, mais on a aussi peur. Eux ont fui la guerre, et nous vivons avec son ombre », confie un chef de village malien.
Ce drame humain se joue dans l’oubli. Aucun gros titre. Peu de caméras. Et pourtant, ce sont des milliers de vies suspendues, de destins bouleversés, de cœurs brisés par la violence et l’exil.
Combien de temps encore ces familles devront-elles attendre qu’on les voie ? Combien de cris doivent encore résonner avant qu’on tende la main ?
Silence diplomatique
Malgré la gravité de la situation, cette crise reste peu médiatisée. La frontière poreuse entre le Mali et le Burkina Faso devient un corridor de survie pour des milliers de familles, mais aussi une zone de non-droit où les aides peinent à parvenir. Le manque de coordination entre les autorités maliennes et burkinabè complique davantage la réponse humanitaire.
Face à cette urgence silencieuse, il est impératif d’agir. Les Etats de la région, l’Union africaine, les Nations Unies et les partenaires internationaux doivent intensifier leur aide, sécuriser les zones frontalières, et mettre en place des mécanismes de protection pour ces populations vulnérables.
Ces populations, majoritairement issues des zones frontalières entre le Mali et le Burkina Faso, ont été contraintes de fuir après une recrudescence des attaques terroristes dans les régions du Sahel burkinabè. Les groupes armés, souvent affiliés à Al-Qaïda ou à l’Etat islamique, ciblent les civils, les services publics et les villages entiers, poussant des milliers de familles à tout abandonner.
« Nous avons marché pendant deux jours avec nos enfants sans rien à manger », témoigne, une mère de cinq enfants réfugiée dans le village malien de Dinangourou. « Nous avons tout laissé derrière nous : notre maison, nos champs, notre bétail ».
Il est temps de regarder cette crise en face. D’écouter ceux qu’on n’entend pas. De se rappeler que derrière chaque chiffre, il y a une histoire, un visage, un enfant qui a peur la nuit.
Le cercle de Koro n’est pas seulement une frontière. C’est aujourd’hui un refuge fragile pour des vies brisées. Et un appel muet au monde : ne nous oubliez pas.
(Correspondance particulière)