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Jean-Yves Le Drian à la tribune des nations unies: « la mise en œuvre de l’accord de paix a connu d’importants progrès »

MINUSMA

INTERVENTION A TITRE NATIONAL
DE M. JEAN-YVES LE DRIAN
MINISTRE DE L’EUROPE ET DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
AU CONSEIL DE SECURITE

New York, le 11 juin 2020

Monsieur le Secrétaire général,
Monsieur le Haut-Représentant,
Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,

C’est un grand plaisir pour moi de présider cette réunion du Conseil de sécurité sur le Mali à l’occasion de la présidence française.

M. le Secrétaire général, la France vous remercie de l’honneur que vous nous faites de participer à cette session. Je me réjouis également de la présence du Haut représentant de l’Union africaine pour le Sahel et le Mali et de la présence de nombreux ministres. C’est le signe de l’intérêt que nous portons collectivement à la situation au Mali et, au-delà, au Sahel.

Je souhaiterais tout d’abord évoquer avec vous le chemin parcouru depuis huit ans. Car il faut se souvenir d’où nous partons. En 2012, le nord du Mali était occupé par les terroristes et le vide politique s’était installé. En 2013, la France, à la demande des autorités maliennes, est intervenue pour arrêter l’avancée des djihadistes vers Bamako. La force africaine MISMA, puis la MINUSMA, se sont déployées pour sécuriser le territoire et des élections ont été organisées. Un accord de paix a été trouvé, sous l’égide de l’Algérie, en 2015. Depuis cette date, la mise en œuvre de cet accord a connu d’importants progrès. Cette année, pour la première fois depuis cinq ans, mille soldats de l’armée malienne reconstituée, c’est-à-dire intégrant d’anciens rebelles, ont fait leur retour dans les villes du Nord, dont celle, symbolique, de Kidal. Et les avancées sur les autres volets de l’accord de paix se poursuivent, que ce soit sur la décentralisation, le développement du Nord ou la participation des femmes au processus de paix.

Pour autant, à l’image de ces avancées parfois obtenues de haute lutte, la situation au Mali et au Sahel reste extrêmement fragile. Les groupes terroristes poursuivent leurs actions de harcèlement. Les populations civiles et les armées du Sahel, dont je salue le courage et l’engagement, paient un lourd tribut et j’ai aussi une pensée spéciale et des condoléances à transmettre à toutes les victimes civiles et militaires au Sahel, comme ces derniers jours dans le centre et le nord du Burkina. Je voudrais aussi, à cet instant, avoir une pensée particulière à l’égard de Soumaïla Cissé, toujours en détention aux mains des terroristes. La situation humanitaire, aggravée par la pandémie de la COVID-19, continue de se détériorer, engendrant une augmentation du nombre de déplacés internes et de réfugiés. La réconciliation des différentes communautés reste un défi. Enfin, le changement climatique rend le Mali et l’ensemble de la région particulièrement vulnérables.

La France est cependant confiante. Au Sahel, nous travaillons avec des États, parfois fragilisés, mais engagés. Et la communauté internationale a accru son soutien avec le lancement cette année de la Coalition pour le Sahel. Nous tiendrons demain sa première réunion ministérielle. Sur le terrain, cette dynamique s’est traduite par la mise en place d’un mécanisme de commandement conjoint entre la force française Barkhane, forte de 5 100 soldats, et la Force conjointe du G5 Sahel. Les résultats sont là, avec des victoires dans la lutte contre le terrorisme, dont la neutralisation, la semaine dernière, d’Abdelmalek Droukdal, chef d’Al Qaida au Maghreb islamique. La Task Force Takuba, qui réunit des forces spéciales européennes, a également été lancée. Nous avons enfin poursuivi nos efforts en matière de gouvernance et de retour de l’État, avec le Partenariat pour la stabilité et la sécurité au Sahel, lancé avec l’Allemagne, et aussi avec les actions de développement dans le cadre de l’Alliance Sahel.

Mesdames et Messieurs,

Le mois de juin revêt une importance majeure pour le Mali, car c’est celui du renouvellement du mandat de la MINUSMA. Face aux enjeux persistants auxquels est confronté le pays, la MINUSMA reste le meilleur outil dont dispose la communauté internationale pour appuyer les Maliens sur le chemin de la paix et de la sécurité. Le plan d’adaptation de la MINUSMA, que j’invite l’ensemble des États membres à soutenir, devrait améliorer encore ses capacités.

Dans la négociation de ce mandat, qui s’ouvrira dans les jours qui viennent, nos priorités seront de conforter la MINUSMA dans ses tâches prioritaires : mise en œuvre de l’accord de paix et appui au redéploiement de l’État et à la protection des civils dans le centre du pays.

Mais nous cherchons aussi à marquer, dans ce mandat, nos attentes envers les parties maliennes, qu’il s’agisse du gouvernement ou des groupes armés. Cinq ans après la signature de l’accord de paix, la communauté internationale attend encore des progrès significatifs de leur part. Les agissements de certains acteurs, en substitution flagrante de l’autorité de l’État au Nord, ne sont pas admissibles. Leur désarmement doit se poursuivre, dans les conditions agréées par les parties. D’un autre côté, les réformes politiques et institutionnelles prévues par l’Accord se font encore attendre. Je le redis ici : l’Accord de paix issu du processus d’Alger doit rester notre boussole, et c’est vers sa mise en œuvre pleine et entière que nous devons tendre. Ceux qui s’y opposeraient, de quelque camp qu’ils soient, s’exposeraient à des sanctions.

Ce renouvellement du mandat doit aussi être l’occasion de rappeler nos exigences concernant la protection des civils et le respect du droit international humanitaire, l’accès humanitaire, ainsi que le respect des droits de l’Homme et la lutte contre l’impunité. Le gouvernement malien a annoncé des enquêtes concernant plusieurs allégations de graves violations des droits de l’Homme, dont certaines seraient imputables à des éléments des forces de défense et de sécurité. Il est essentiel que les responsables de ces actes inacceptables soient traduits devant la justice, comme le gouvernement malien s’y est engagé.

Alors que nous célébrons cette année le 20e anniversaire de l’Agenda Femmes, Paix et Sécurité, je rappelle également l’importance d’une participation pleine, active et effective des femmes, sans lesquelles il ne peut y avoir de paix durable.

Parce que la MINUSMA agit en lien avec d’autres présences de sécurité, il est enfin important que des synergies adéquates se mettent en place. Par souci d’unité de ce Conseil, nous défendrons le maintien de l’appui apporté par la MINUSMA à la force conjointe, ainsi qu’une clarification concernant la manière dont ce soutien est fourni au-delà du territoire malien.

Mesdames et Messieurs,

La MINUSMA accomplit un excellent travail, dans un environnement des plus difficiles qui soit. Je salue votre engagement, M. le Secrétaire général, ainsi que celui de votre représentant spécial, Mahamat Annadif, ainsi que l’engagement de l’ensemble des casques bleus.

La France, consciente de sa responsabilité sur ce dossier, aura à cœur de travailler étroitement avec chacun des membres [de ce Conseil] pour parvenir à un consensus sur le renouvellement du mandat.

Je vous remercie.

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