Dionké Yarnangoré, plus connu sous le nom de Babou Yara, est un célèbre commerçant de Bamako. Depuis plus de quarante ans, l’homme importe et vend des produits pétroliers et, comme tout bon Malien, il investit dans l’immobilier en prévision de ses vieux jours. C’est ainsi qu’il achète avec monsieur Cheick Sadibou Cissé une parcelle sise à la Cité du Niger, commune 2 de Bamako, et objet du titre foncier n° 11247. Depuis qu’il a acquis ce titre, Babou Yara a perdu le repos.

Des loubards contre Babou Yara

En effet, le titre foncier susvisé appartenait à un certain Bazoumana Fofana qui devait de l’argent à la Banque Commerciale du Sahel (BCS SA). Comme Bazoumana n’arrivait pas à payer sa dette, la BCS fit pratiquer une saisie sur le titre. Par jugement n° 415 en date du 6 novembre 1996, le tribunal de la commune 2 de Bamako adjuge le titre à Cheick Sadibou Cissé pour la somme de 143. 110. 000 FCFA. Cissé, à son tour, vendra le titre par acte notarié à Babou Yara. Ce dernier mute le titre en son nom; de bonne foi, il se croit à l’abri de tout tourment, étant bénéficiaire d’une vente notariée ordinaire et non d’une vente judiciaire. Il se trompe lourdement !
Au moment où il entame des travaux de mise en valeur du terrain, ses ouvriers se heurtent à une opposition inattendue: un groupe de loubards empêchent tous travaux et s’attaquent violemment aux ouvriers. Dénoncés par leurs victimes, les loubards sont interpellés par la police du 3ème Arrondissement qui trouve sur l’un des suspects des balles de fusil. Cette dangereuse affaire pend devant le parquet de la commune 2 qui semble traîner les pieds pour sévir, alors qu’on a sans doute frôlé des meurtres. Les loubards étaient-ils au service de Bazoumana Fofana ? En tout cas, leur action lui profite largement. Car ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que Bazoumana ne désespère pas de récupérer, un jour, le titre foncier dont BCS l’a exproprié en 1996.

Guérilla judiciaire contre Babou Yara

Pour arriver à ses fins, Bazoumana entretient une véritable guérilla judiciaire contre Babou Yara, l’actuel propriétaire du titre foncier n° 11247. Dans un premier temps, Bazoumana exerce un pourvoi contre le jugement n° 415 du 6 novembre 1996 par lequel le tribunal de la commune 2 de Bamako l’a exproprié. Peine perdue: son pourvoi est rejeté par Arrêt n°209 en date du 23 septembre 2002 de la Cour Suprême. Contre cet Arrêt, Bazoumana exerce un recours plutôt rare: le rabat d’Arrêt. Ce nouveau recours sera également rejeté par la Cour Suprême par Arrêt n° 208 du 17 octobre 2005.
Ne trouvant plus de moyen juridique de contester personnellement son expropriation, Bazoumana lance dans la bataille deux de ses amis: Moustapha Cissé et Alima Diallo. Ces derniers font une surenchère : en clair, ils demandent au tribunal de la commune 2 que le titre foncier adjugé à Cheick Sadibou Cissé à 143 millions FCFA leur soit revendu à un prix supérieur. Une manière de déposséder Cissé et de retourner le titre dans le patrimoine de Bazoumana. Problème: la surenchère, qui doit intervenir légalement dans les dix jours suivant le jugement du 6 novembre 1996, était impossible à examiner tant que le pourvoi exercé par Bazoumana contre le même jugement n’était pas épuisé. Si bien qu’aujourd’hui, la surenchère n’est plus recevable plus d’une décennie après la vente !
L’autre grave vice dont souffre la surenchère de Moustapha Cissé et d’Alima Diallo réside dans le fait que la loi ne permet pas à deux personnes de surenchérir ensemble. Seule une personne peut le faire à titre individuel. Il n’empêche! Bazoumana et ses amis comptent bien user d’artifices pour que le tribunal de la commune 2 accepte la surenchère et dépossède Babou Yara du titre litigieux. Le tribunal les suivra-t-il ? Ce n’est pas du tout sûr car non seulement Yara a, dans cette affaire, le droit de son côté, mais en outre, il n’est pas le premier dindon venu.

MLSIDIBE

Source :Koulouba.com