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Interview du secrétaire général du GATIA « Nous ne sommes à la solde d’aucun gouvernement»

Dans l’interview qui suit, Fahad Ag Almahmoud explique comment la Platefotme est entrée à Kidal et ce qu’elle y fait. Il aborde de nombreuses autres questions liées au processus de paix au Mali.

Fahad Ag Almahmoud secretaire general gatia

Qu’est ce qui a motivé l’entrée de la Plate-forme à Kidal ?

Le processus d’Anéfis a prévu le partage et la gestion de certaines localités du nord avant le redéploiement de l’armée nationale en ces lieux. On a été à Aguelhok, à Halile, à Tinzawatène; Kidal restait la seule localité où nous n’avions pas été. On subissait, du coup, une très forte pression de nos parents de Kidal qui nous demandaient d’y venir. Nos parents-là ont toujours gardé leur identité malienne malgré ce qui cela leur coûtait. Ils ne comprenaient pas que 4 mois après la signature des accords d’Anéfis, nous ne soyons pas présents à Kidal. Nous avons alors fermé les yeux sur toute autre considération, et nous nous sommes rendus à Kidal.

Pourquoi votre entrée à Kidal n’a-t-elle entraîné aucun combat ?

La Plateforme est arrivée à Kidal le 2 février 2016, de la façon la plus pacifique possible. Cela ne pouvait se faire sans l’accord de nos frères de la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA). S’ils ne voulaient de nous à Kidal, ils allaient tirer sur nous comme cela était déjà arrivé. Cela veut dire que nous avons désormais dépassé la période des affrontements armés pour nous assoir et débattre de tous nos différends. Cela a été possible grâce aux accords issus du processus d’Anéfis.Il faut rappeler que les accords d’Anéfis ont impliqué aussi le gouvernement malien et le représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies au Mali.Ces accords sont nés du constat que malgré les accords d’Alger, les affrontements continuaient entre la CMA et la Plateforme. Ce sont les accords d’Anéfis qui ont mis fin aux affrontements entre les deux groupes armés.

Que prévoient les accords d’Anéfis ?

Initiés par les communautés et concrétisés par la CMA et la Plateforme, les accords d’Anéfis prévoient essentiellement les points suivants:

– s’accepter et tout partager en termes de responsabilités et d’intérêts politiques;

– tout mettre en œuvre pour faciliter l’application des accords issus du processus d’Alger ;

– respecter la libre circulation des personnes et des biens, mais principalement les hommes en armes dans les zones occupées par l’une ou l’autre des parties signataires.

Comment se passe la collaboration entre vous et la CMA pour la sécurisation de Kidal ?

Nous sommes en parfaite entente avec la CMA pour la sécurisation de Kidal. Nous contrôlons la partie nord de la ville et la CMA les autres parties. Pour ce qui est de l’administration de la ville à travers des commissions conjointes, la CMA a accepté que le Plateforme fasse partie de ces commissions qui gèrent, entre autres, l’environnement, l’énergie, le transport, l’humanitaire, etc.

Pourquoi, dans le communiqué publié avec la CMA, vous déclarez que l’accord d’Anéfis est le « principal gage » de sortie de crise ? Que faire alors des accords d’Alger ?

Les accords d’Anéfis se sont pas à comparer aux accords issus du processus d’Alger. Les accords d’Anéfis sont un arrangement entre communautés pour nous permettre de gérer entre nous-mêmes nos préoccupations et nos problèmes, en attendant l’application des accords d’Alger, qui est de nos jours très lente. Les accords d’Anéfis sont là aussi pour gérer les problèmes qui n’ont pas été pris en compte par les accords d’Alger.

Que répondez-vous à ceux qui pensent que la Plateforme a lâché le gouvernement malien?

Je ne pense pas qu’une telle déduction soit juste. La Plateforme et la CMA sont parties prenantes des accords d’Alger qui consacrent l’unité et l’intégrité territoriale du Mali. Nous n’avons pas connaissance de différends entre la CMA et le gouvernement malien où nous aurions pris parti pour la CMA. Il faut préciser que contrairement à ce qui se dit, nous n’avons jamais été pro-gouvernement; nous sommes plutôt pro-Mali. Nous n’avons jamais été l’émanation de quelque gouvernement que ce soit. Nous sommes des Maliens qui se battent pour le Mali, qui estiment qu’il n’est pas utile de diviser le pays : cela n’a pas été compris par certains médias occidentaux, qui nous dénigrent tout le temps. Nous ne sommes à la solde d’aucun gouvernement et si le gouvernement malien trouve son compte dans notre idéologie, c’est tant mieux !

Vous parliez de lenteurs dans l’application des accords d’Alger …

Bien sûr ! Des choses qui devaient avoir lieu deux ou trois mois après la signature des accords n’ont toujours pas eu lieu. Il faut reconnaître qu’à partir de la 6ème session du Comité de suivi des accords, le gouvernement a donné quelques signes, notamment par la prise de décrets pour la mise en place de certaines commissions. Le gouvernement doit avancer. Il faut qu’il mette en place la période intérimaire, le cantonnement, le processus de DDR (désarmement, démobilisation et réinsertion, ndrl). Le développement du nord ne peut commencer que lorsque la sécurité y sera assurée et que l’armée malienne aura accueilli en son sein les éléments des groupes armés.

Comment, malgré votre présence aux côtés de la CMA, l’insécurité persiste-t-elle à Kidal ?

A Kidal, il y a la MUNISMA et la force Barkhane qui sont mieux armées que la CMA et la Plateforme. Bien avant que nous ne soyons à Kidal, l’insécurité y régnait. D’ailleurs, nulle part au Mali, on n’est en sécurité. Les gens pensent que Kidal était contrôlée par la CMA avant notre arrivée, mais la réalité est autre. A Kidal, malgré la présence de la CMA, des groupes terroristes comme Ançar Dine et des narco-trafiquants exercent une grande activité. Ils gardent toutes leurs capacités de nuisance. Ils menacent Kidal; malheureusement, avec la lenteur observée dans la mise en oeuvre des accords d’Alger, d’autres groupes naissent et cherchent leur compte dans l’insécurité. Il faut que les forces onusiennes et celles de Barkhane sortent des camps pour patrouiller afin d’améliorer la sécurité à Kidal.

Que répondez-vous à ceux qui suggèrent de négocier avec Iyad Ag Ag Ghali pour retrouver la paix?

Je ne sais pas trop, mais je me demande si cet homme est prêt à négocier. Est-il prêt à abandonner la voie qu’il a décidé de suivre ? Pour pouvoir négocier avec quelqu’un, il faut que personne le désire ! Pour moi, Iyad suit un chemin qu’il ne peut plus quitter, au risque de périr.

Comme dernier mot…

Tout le monde doit dépasser son égo afin que notre pays recouvre son intégrité territoriale et que de Tinzawatène à Zégoua, les populations aient accès aux services sociaux de base. La vraie bataille est celle du développement, de la lutte contre l’analphabétisme et l’exclusion

Source: Le Procès Verbal

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